Airbus mise sur le design génératif d'Autodesk pour concevoir une nouvelle usine à Hambourg
Autodesk vient d'annoncer un nouveau partenariat avec Airbus lors de son université, qui se déroule à Las Vegas entre le 19 et le 21 novembre. L'avionneur français a fait appel à l'éditeur de logiciels de simulation pour l'aider à optimiser la conception d'une future usine d'assemblage de nacelles d'A320, à Hambourg, grâce à ses logiciels de design génératif. Celle-ci devrait voir le jour l'année prochaine.
L’annonce aurait presque pu passer inaperçue au milieu du show du PDG d’Autodesk Andrew Anagnost dans le hall D du centre des congrès Sands, à Las Vegas, ponctué de jeux de lumières, de musiques dignes des plus grandes discothèques et de vidéos promotionnelles concoctées par l’éditeur de logiciels à l’occasion de son Autodesk University, du 19 au 21 novembre. Pourtant, elle est de taille : Airbus, le plus grand fabricant d’avions du monde, s’associe à Autodesk pour créer par design génératif les plans d’une future usine de peinture et d’assemblage de nacelles d’Airbus A320 à Hambourg, dont l’ouverture est prévue pour 2020.
« Airbus s’est engagé auprès d’Autodesk pour une raison simple : le seul terrain disponible pour construire cette usine est triangulaire et assez étroit », précise Andrew Anagnost, alors que six écrans géants diffusent derrière lui les schémas dudit lopin de terre. Chez Autodesk, Airbus est venu chercher le spécialiste du design génératif et ses logiciels qui, à partir d'une liste de contraintes fournies en entrées, sont capables de générer de multiples versions d’une pièce ou d'une architecture répondant au mieux à ces contraintes.
Deux architectures d'usines choisies par le design génératif
En l’occurrence, l’équipe de chercheurs d’Autodesk a identifié dix contraintes : la superficie du bâtiment par rapport à l’ensemble de la parcelle, le coût de construction (empreinte totale, nombre et tailles des différentes structures, matériaux utilisés…), la durabilité (présence d’un toit-terrasse « vert » et d’une zone de stationnement des vélos, acoustique du bâtiment, confort thermique, zones de biodiversité…), les conditions de travail des employés (distance entre les postes de travail et les toilettes, vue sur les espaces verts extérieurs depuis les salles de réunion, le café-bar, les salles de pause et la cuisine), les flux (logistique, de peinture, moteur), l’expérience client, la lumière du jour et la possibilité d’agrandissement du bâtiment à l’intérieur de la parcelle.
« Au vu de la forme inhabituelle du lopin de terre disponible, il était très difficile de concevoir un bâtiment rectangulaire traditionnel », commence David Benjamin, directeur au département recherche d’Autodesk lors d’une conférence de presse commune avec Bastian Schaefer, responsable de l’équipe innovation chez Airbus, quelques heures après l’annonce. Parmi les milliers de choix possibles, les logiciels de simulation d’Autodesk – comme Netfabb, Inventor ou encore Simulation Mechanical -, boostés aux algorithmes de design génératif, ont permis aux ingénieurs de choisir deux options répondant au mieux aux dix contraintes identifiées par Bastian Schaefer et son équipe. « La première est de construire un grand bâtiment triangulaire, inhabituel pour ce type d’usines, et la seconde est d’opter pour un bâtiment rectangulaire mais plus petit. »
Des résultats probants sur les composants d'avions
« En plus d’améliorer la productivité et de réduire le coût de construction d’un tel bâtiment, ces deux options visent aussi à proposer un endroit plus agréables dans lequel travailler et se veulent plus durable, avec une ventilation naturelle afin de se passer de climatisation, une grande place pour la lumière du jour et des matériaux renouvelables sans utiliser aucune once de béton », insiste David Benjamin.
Ce n’est pas la première fois qu’Airbus fait appel au design génératif d'Autodesk. La collaboration entre les deux entreprises remonte même à 2012, indique Bastian Schaeffer, lorsqu’elles ont commencé à travailler sur une cloison bio-inspirée séparant le galley - l'office dans lequel travaille le personnel de cabine, situé à l’arrière de l’appareil - de la cabine imprimée en 3D, modélisée grâce aux logiciels de design génératif d’Autodesk et dévoilée en décembre 2015. Celle-ci était 45% plus légère qu’une cloison classique [à retrouver sur Industrie & Technologies ] et les deux entreprises travaillent actuellement sur une nouvelle version, encore plus résistante. L’avionneur a ensuite requis de nouveau l’expertise de l’éditeur américain pour concevoir, toujours imprimée en 3D et toujours conçue grâce au design génératif, une dérive d’A320 plus stable et plus aérodynamique.
Résoudre des problèmes à 50 contraintes
Depuis le début de l’année 2019, les équipes d’Airbus et d’Autodesk ont décidé de tester le design génératif à une plus grande échelle, celle de l’usine. Ils ont commencé par une preuve de concept sur une ligne d’assemblage d’ailes d’A350, à Broughton, au Royaume-Uni, avant de s’attaquer à la conception d’une usine entière, à Hambourg. Et l’aventure ne semble pas près de s’arrêter là si l’on en croit les mots de Bastian Schaeffer : « Nous avons étendu notre partenariat de recherche pour les cinq prochaines années, se réjouit-il. A l’avenir, nous allons certainement tester le design génératif pour concevoir des architectures complexes, comme une cabine ou une usine entière, plutôt que de simple composants. L’objectif est de résoudre des problèmes impliquant non plus dix mais cinquante contraintes. »
A Las Vegas, Kevin Poireault