Paris et Berlin veulent réformer les règles européennes de concurrence
Présentée par les ministres de l’économie Bruno Le Maire et Peter Altmaier, la nouvelle stratégie industrielle commune plaide pour un renforcement des investissements et une meilleure protection des technologies et des entreprises européennes. Une filière franco-allemande des batteries devrait aussi voir le jour.
Après l’échec de la fusion entre Alstom et Siemens, les ministres de l’économie français et allemand Bruno Le Maire et Peter Altmaier ont présenté ce mardi 19 février une offensive visant à renforcer la compétitivité des entreprises européennes face à la Chine et aux États-Unis. Un soutien qui passe selon eux par une réforme des règles de concurrence européennes, afin de mieux prendre en compte les enjeux actuels. "Comme nous l’avons vu récemment, ces règles sont aujourd’hui inadaptées et dépassées", a martelé Bruno Le Maire, en déplacement à Berlin.
L’objectif sera donc de fixer un certain nombre de critères offrant un droit de recours pour contester des décisions de la Commission européenne, notamment en cas de veto de fusions entre entreprises européennes. "Nous ferons des propositions concrètes dans les prochains mois", a précisé Peter Altmaier. Selon les premières informations, ces critères établis dans des conditions strictes et bien définies pourraient par exemple être liés à la protection ou au développement d’une technologie ou d’un marché-clé ou encore au maintien de l’emploi…
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Renforcer les financements de la recherche et l'innovation
Bruno Le Maire a d’ailleurs rappelé que ce droit d’évocation existe déjà à l’échelle nationale dans plusieurs pays et qu’il en a fait usage en 2018 lors de la fusion dans l’agroalimentaire entre William Saurin et Cofigeo "pour sauver des emplois", a-t-il précisé.
Autre axe d’action listé dans le "manifeste franco-allemand pour une politique industrielle européenne adaptée au XXIe siècle" proposé par les deux pays : renforcer les mécanismes de financement des grands projets de recherche et d’innovation, via les PIIEC (projets importants d'intérêt européen commun). Il s’agit "d’un outil utile pour financer des projets innovants de grande envergure, mais sa mise en œuvre est très complexe, souligne le texte. Il peut être opportun de réviser les conditions de mise en œuvre pour faire en sorte que le PIIEC soit plus facilement et plus efficacement mis en œuvre". D'autres idées devraient être explorées, telles que "l'intervention temporaire potentielle d'acteurs publics dans des secteurs spécifiques et à des moments précis pour assurer le développement des entreprises à long terme".
Protéger les champions industriels nationaux
Comme l’a montré la "Stratégie industrielle nationale 2030" présentée par l’Allemagne début février, la France et son voisin allemand semblent donc désormais s’accorder sur la nécessité pour les États de protéger davantage leurs champions industriels, y compris financièrement. Une position nouvelle outre-Rhin, dans un pays qui a longtemps été opposé à tout interventionnisme économique. Mais face à l’appétit chinois pour le "Made in Germany", Peter Altmaier souhaite permettre des prises de participation de l’État dans des sociétés faisant l’objet de tentatives de rachat par des investisseurs non européens, grâce à la création d’un fonds investissement public. Une volonté réaffirmée dans le texte franco-allemand, qui incite les autres États membres à se joindre à ces efforts. « Les intérêts européens sont vulnérables lorsque certains États membres n'agissent pas dans ce domaine », assure le manifeste.
"Après des mois de travail, nous nous sommes mis d’accord sur la définition d’une stratégie industrielle pour l’Europe que nous proposerons à nos partenaires européens", s’est félicité le ministre français. La première illustration concrète de cette volonté franco-allemande portera sur la création d’une filière européenne de batteries, sur le modèle d’Airbus, également ouverte aux autres pays, comme la Pologne, l’Italie ou l’Espagne.
1,7 milliard d'euros sur la table
Conformément à ce qui avait été annoncé en décembre dernier, l’Allemagne a pour cela mis sur la table un milliard d’euros, la France 700 millions d’euros. Les deux pays attendent désormais l’approbation de l’Union européenne, espérée avant le 1er avril, pour nommer les industriels français et allemands de l’extraction, de la chimie et de l’automobile souhaitant participer au projet. Aucun emplacement n’a encore été annoncé pour l’implantation de la première usine.
Tandis que les projets privés se multiplient, à l’image du partenariat entre Varta Microbattery, BASF et la filiale allemande de Ford ou d’un consortium qui pourrait voir le jour en Lusace entre la Pologne et l’Allemagne, cette filière franco-allemande est présentée comme une alternative à plus long terme, dans des technologies de rupture dans les batteries lithium-ion liquide et solide. Par la suite, d’autres domaines pourraient bénéficier du même soutien des gouvernements français et allemand, dans l’intelligence artificielle, le stockage de l’énergie renouvelable et des données numériques.
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