Metaverse : pendant que la France hésite, le monde bouge !
Depuis plusieurs mois, les géants des technologies et de nombreux pure players unissent leurs forces pour accompagner l’émergence des métavers. Ce sujet, qui fait les choux gras des médias et agite les milieux économiques, est un défi majeur pour nombre d’entreprises et les États. Cela pourrait s'avérer un tournant sociétal, estime Philippe Cassoulat, le directeur général de Talan.
Les métavers, multivers ou metaverses, selon les dénominations, sont des univers virtuels entièrement numériques connectés au monde réel. Évolution naturelle des réseaux sociaux, des jeux en réseau de l’internet, et plus généralement de la digitalisation de la société, ils ont pour rôle principal de faciliter l’interaction entre les personnes dans la sphère personnelle et professionnelle, avec une accélération liée aux restrictions dues à la pandémie de ces dernières années. Il est possible de participer aux mêmes activités que dans le monde réel ou d’y inventer de nouvelles pratiques. Popularisés il y a une vingtaine d’années à travers des moteurs comme Second Life, ces mondes virtuels reviennent aujourd’hui sur le devant de la scène, alimentés par de nombreuses avancées technologiques et par le développement de nouveaux usages. L’explosion des cryptomonnaies et des NFT (Non fungible tokens), reposant sur les technologies blockchain, y a également largement contribué.
À LIRE AUSSI
Les NFT font tourner la tête des géants du luxe
Terres promises
Et pour cause. En quelques mois, les métavers ont suscité un véritable engouement des marques, à l’image de l’expérience Gucci Garden, du groupe Kering, qui s’est déroulée en mai 2021 dans le métavers de Roblox et a attiré près de 20 millions de visiteurs. Des concerts virtuels géants ont également eu lieu, comme celui du rappeur Travis Scott, qui a comptabilisé plus de 45,8 millions de visionnages. Ces chiffres expliquent pourquoi les acteurs de la technologie voient leurs projets valorisés en milliards d’euros.
Des investissements de plusieurs dizaines de milliards ont été annoncés, notamment par Meta (Facebook), Microsoft, Epic Games, Baidu et bien d’autres. Leur objectif est clair : se positionner rapidement face à l’ampleur du phénomène et ne pas rater ces « terres promises ». Car à l’heure actuelle, plusieurs milliers d’initiatives de métavers fourmillent à travers la planète.
À LIRE AUSSI
Qu'est-ce que le metaverse, le concept dans lequel Facebook investit des milliards ?
Profusion d'idées et de créativité
Certaines se basent sur la « gamification » des interactions sociales, d’autres sur une évolution profonde des pratiques professionnelles autour de bureaux virtuels, de salles de réunion multifonctions… Des poids lourds de l’industrie se sont positionnés pour y développer des programmes de formation pendant que d’autres s’appliquent à concevoir de nouveaux produits et services. Les métavers deviennent un prolongement naturel du jumeau numérique et en démultiplient les perspectives, par exemple en offrant de nouvelles approches d’optimisation ou de pilotage des processus industriels (cf. l’expérience de BMW avec l’Omniverse de Nvidia). Les métiers évoluent pour faire face au besoin considérable de main-d’œuvre, par exemple, dans la modélisation des espaces virtuels ou l’interaction entre les métavers. Les acteurs de l'e-commerce s'y intéressent pour mieux comprendre les nouveaux mécanismes d’achat qui s’y mettent en place, avec comme particularité la multiplication des monnaies virtuelles…
Face à cette profusion d’idées, de créativité et de moyens, la présence de différents publics (catégories socioprofessionnelles, âge, etc.) va rapidement devenir un indicateur clé. Car les enjeux majeurs de cette nouvelle vague sont d’attirer les participants et surtout de les fidéliser. À cet égard, l’expérience de Second Life a révélé qu’un manque de présence humaine dans les interactions peut rapidement faire fuir le public.
Craintes françaises
Et le match ne fait que commencer. Comme on peut le voir dans « Les Français et le métavers », un sondage Ifop pour Talan paru en janvier 2022, 41 % des 18-49 ans avaient entendu parler du métavers, 63 % avaient une crainte vis-à-vis de l’émergence des mondes virtuels numériques. En parallèle, un sondage mené par l’agence Wunderman Thomson, en juillet 2021, indique que sur le panel de 3 011 Américains, Anglais et Chinois, ces derniers sont prêts à dépenser en moyenne 76 000 dollars pour acheter une maison numérique dans le métavers ! Les perceptions liées au numérique varient considérablement selon les pays. Et si les Français opposent souvent une réticence face au changement, l’expérience a montré qu’ils sauront prendre le train en marche afin d’exploiter le potentiel de ces évolutions.
Cette différence de perception peut être un atout et faire de la France un réel moteur, notamment sur la question de la gouvernance des métavers et sur leur utilité dans la société. Car la technologie doit s’envisager avant tout au service de l’humain et en tenant compte de l’impact climatique du numérique.
Nous avons la chance de compter de grands acteurs du divertissement, comme Vivendi et Ubisoft, des start-up technologiques innovantes, des acteurs économiques majeurs dans leurs secteurs, des laboratoires de recherche comme l’Inria, qui sont bien souvent précurseurs, et des cabinets de conseil reconnus qui accompagnent les acteurs économiques dans leurs transformations.
Philippe Cassoulat, directeur général du groupe Talan
Les avis d'experts sont publiés sous l'entière responsabilité de leurs auteurs et n'engagent en rien la rédaction de L'Usine Nouvelle.
SUR LE MÊME SUJET
Metaverse : pendant que la France hésite, le monde bouge !
Tous les champs sont obligatoires
0Commentaire
Réagir