"La France conçoit les brevets comme une reconnaissance du droit de l'inventeur", explique l'historien Gabriel Galvez-Behar
Professeur d’histoire à l'Université de Lille, Gabriel Galvez-Behar a récemment publié "Posséder la science. La propriété scientifique au temps du capitalisme industriel", ouvrage lauréat du prix 2021 de l’Académie François Bourdon pour le patrimoine industriel. Il revient pour L'Usine Nouvelle sur les évolutions des brevets et de la valorisation scientifique.
L’Usine Nouvelle - Dans le cas des vaccins contre le Covid-19, de nombreuses voix se sont élevées en faveur de la levée des brevets. Ces demandes d'ouverture sont-elles nouvelles ?
Gabriel Galvez-Behar - Non. Certains pays, dont la France, n’ont longtemps pas eu de brevets sur les remèdes pharmaceutiques. Il était alors inconcevable de créer des monopoles sur des innovations favorables à la santé humaine et il a fallu attendre la fin des années 1960 pour que le médicament en France soit parfaitement brevetable. Cela est lié à l’internationalisation des firmes pharmaceutiques et à la nécessité d’avoir un cadre permettant les échanges de technologies et de savoir-faire. Par ailleurs, des brevets ont déjà été suspendus. Lors de la Première Guerre mondiale, quand les États-Unis ont été exposés à des pénuries de traitements antisyphilitiques, ils n’ont pas hésité à suspendre les brevets détenus par les entreprises allemandes qui en dominaient alors la production. Dans la santé, les pouvoirs publics sont capables, quand ils le jugent nécessaire, de reprendre la main en matière de propriété intellectuelle.
Dès les années 1880, la part de brevets accordés à des individus chute aux Etats-Unis et les grandes entreprises obligent leurs employés à leur céder par avance les brevets qu’ils pourraient mettre au point dans le cadre de leur travail.
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