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L’étrange synergie entre les gilets jaunes et Facebook décortiquée
Le nouvel algorithme de Facebook a dopé les gilets jaunes. Et ceux-ci ont livré à la firme de Mark Zuckerberg "une bombe démocratique à retardement". Etrange synergie décortiquée par le chercheur Olivier Ertzscheid sur son blog, affordance.info.
Enseignant-chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’IUT de la Roche-sur-Yon, Olivier Ertzscheid a un faible pour l’algorithme qui sélectionne le contenu du fil d’actualité (newsfeed) de l’utilisateur de Facebook : il le décrypte depuis des années. Et depuis trois semaines dans le contexte de la mobilisation des gilets jaunes, incubée au sein du réseau social.
"L’algorithme des pauvres gens"
"L’algorithme des pauvres gens", voilà comment Olivier Ertzscheid avait qualifié en début d’année "la nature du changement du modèle algorithmique du newsfeed" introduit par Facebook. Le réseau social, faisant encore une fois acte de contrition, annonçait la réduction des messages dits publics (médias et annonceurs) par rapport aux messages privés (des "amis"). "Nous donnerons la priorité aux messages qui suscitent des conversations et des interactions significatives entre les gens […] et également aux messages d'amis et de membres de la famille", avait expliqué Facebook.
"Cet énième changement du News Feed et son recentrage sur les interactions grégaires me semble surtout être un message de nature politique adressé à la communauté qu'il préside de fait, pour lui faire accroire que ces algorithmes de plus en plus critiqués et honnis sont aussi, en un sens, ceux des pauvres gens. L'algorithme des pauvres gens", écrivait le chercheur. Les bulles informationnelles sont renforcées et les échanges a priori triviaux favorisés. Sans compter que Facebook renforce aussi les groupes et leurs administrateurs.
"Le terreau d'un changement de société"
Avec le mouvement des gilets jaunes, Olivier Ertzscheid fait une lecture plus politique : "’l'algorithme des pauvres gens’ n'est pas simplement un changement technique mais il dessine en creux un changement de sociabilité. Et à l'échelle du nombre d'utilisateurs de la plateforme, il serait fou de ne pas y voir le terreau d'un changement de société ou à tout le moins de la manière et des moyens de ‘faire société’." Pointant comment Facebook - avec son ergonomie, son accessibilité par smartphone, l’acceptation tacite des fautes d’orthographes et, désormais, sa priorité aux échanges entre amis - s’est imposé comme "l'internet des familles modestes".
"A chaque étape de l'histoire de l'internet et du web, il y a toujours eu une aristocratie de la publication. Seuls certains, seuls les plus éduqués, seuls ceux disposant de suffisamment de temps libre, seuls ceux protégés par une institution ou une situation sociale stable se sont exprimés […] Mais comme pour la lecture, le peuple, le peuple "modeste", ne disposait pas d'un espace d'écriture à son image. Tout comme le peuple hésite souvent à se rendre en médiathèque ou en bibliothèque parce qu'il ne s'y sent pas légitime ou qu'il en ignore les codes et les usages. C'est cet espace d'écriture que Facebook a offert au peuple. Un espace confiné, confinant, mais aussi un espace confiant, un espace confident."
"Un usage serviciel qui est un usage de classe"
En outre, rappelle le chercheur, le changement d’algorithme faisait partie pour Mark Zuckerberg d’un projet politique. Dans une lettre aux utilisateurs publiée début 2017, "Mark Zuckerberg avait en effet notamment explicité son intention de bâtir deux types ‘d'infrastructures sociales’ : ‘La première pour encourager l'engagement dans les processus politiques existants. […] La seconde pour établir de nouveaux processus participatifs dans des prises de décisions collectives pour les citoyens du monde’."
S’il ne se méprend pas sur les intentions derrière la construction de ces infrastructures "appelées d'abord à accompagner le processus de consultation et de décision politique pour pouvoir mieux ensuite s'y substituer entièrement", Olivier Ertzscheid estime que "ces ‘nouvelles infrastructures - techniques – sociales’ sont, de fait, les seules dimensionnées pour collecter et agréger à la fois la parole et les colères de populations déclassées et en situation de pauvreté ou de souffrance sociale."
Et de poursuivre : "Les Gilets Jaunes investissent Facebook car il est leur média. Ils ont de Facebook un usage serviciel qui est un usage de classe. […] Facebook n'est en cela intéressant que dans la manière dont il est investi aujourd'hui par ces familles modestes que sont les Gilets Jaunes, il produit une forme paradoxale d'émancipation par l'accession à un espace, discursif, médiatique, organisationnel et situationnel dont ces gens-là se retrouvaient privés depuis l'effondrement des corps intermédiaires supposés les représenter."
Facile de savoir qui a liké une revendication donnée
Facebook a nourri l’émergence du mouvement des gilets jaunes. Ces derniers ont aussi abondamment nourri le réseau. Des centaines de groupes ont été créés, de quelques dizaines de membres jusqu’à des centaines de milliers. Ceux du groupe "Compteur officiel de gilets jaunes" dépassent même le million. Des centaines de milliers de messages ont été postés, discutant notamment des revendications. Une masse énorme d’informations qui reste bien sûr propriété de Facebook. Et que le réseau pourra exploiter tout comme il exploite toutes les autres données personnelles qu’il collecte à tout va.
"Pour Facebook il est donc très facile de très précisément savoir, à l'échelle de chaque profil individuel, qui a liké, commenté, approuvé ou désapprouvé tout ou partie des revendications, et de le faire revendication par revendication, profil par profil, avec un niveau de granularité très fin. Non seulement c'est très facile mais en plus c'est la base de son modèle économique, de son architecture technique, et de ses récents et récurrents ennuis...", détaille Olivier Ertzscheid.
"Bombe démocratique à retardement"
Que peut faire Facebook de ce trésor ? "Ces informations, Facebook est en capacité de les ‘vendre’, à tel ou tel parti politique dans le cadre de n'importe quelle élection. Pour être précis - c'est important - il ne ‘vendra’ pas ‘le nom de Untel qui a liké telle proposition’ mais il permettra à tel annonceur agissant pour tel parti politique ou tel lobby, d'afficher la bonne publicité ou le bon argument au bon moment sur le bon profil pour le convaincre que son candidat soutient cette idée. Bref très exactement ce qui s'est produit dans le cadre du scandale Cambridge Analytica."
Et de conclure : "Quelle que soit l'issue du mouvement, la base de donnée "opinion" qui restera aux mains de Facebook est une bombe démocratique à retardement ... Et nous n'avons à ce jour absolument aucune garantie qu'elle ne soit pas vendue à la découpe au(x) plus offrant(s)."
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