Inquiétudes sur le marché du polyamide 12
Fin mars, l'explosion et le très violent incendie survenus sur l'unité de cyclododécatriène (CDT) d'Evonik à Marl, en Allemagne, a causé la mort de deux salariés (CPH n°588). Au-delà du dramatique coût humain, cet accident industriel, dont les causes demeurent toujours inexpliquées, engendre des conséquences de plus en plus inquiétantes sur le marché du polyamide 12. Plus grand producteur mondial de CDT, Evonik est aujourd'hui extrêmement handicapé pour assurer ses productions. Et la visibilité sur la remise en service de l'unité sinistrée de Marl est plus que faible. Le chimiste allemand a récemment évoqué un délai d'au moins trois mois pour un redémarrage. Mais une reprise de la production à pleine capacité n'est pas espérée avant l'hiver prochain. Or, le CDT, produit par assez peu d'acteurs, est une matière première essentielle au lactame, le monomère du polyamide 12.
« Evonik et Arkema ont déjà déclaré des situations de force majeure »
Comptant parmi les plus grands producteurs mondiaux de ces polyamides de spécialité, Evonik et le Français Arkema ont déjà déclaré des situations de force majeure pour leurs productions. La situation est d'autant plus compliquée qu'avant même l'accident de Marl « c'était déjà un marché tendu avec des stocks assez faibles », souligne un porte-parole d'Arkema. En aval, le marché automobile et en premier lieu les équipementiers s'inquiè tent de la disponibilité de polyamide 12 sur les marchés mondiaux. Certaines organisations représentatives du secteur mettent en place ces derniers jours des groupes de travail pour trouver des alternatives. Or celles-ci s'annoncent peu nombreuses car le marché est encore restreint. Dans le monde, selon Arkema, le marché mondial du polyamide 12 représenterait des capacités installées de production de l'ordre de 100 000 t/an. Parmi les plus grands acteurs, hormis Arkema et Evonik, le Japonais Ube n'a pas encore fait de commentaires. En revanche, le groupe suisse EMS a récemment indiqué que malgré certaines tensions, il disposait de solutions alternatives à Evonik pour se fournir en CDT et assurer ses productions de polyamide 12.
Ce polyamide de spécialité est particulièrement utilisé dans l'automobile pour les circuits d'essence et les tuyaux flexibles hydrauliques ou dans les camions pour les circuits de freinage et les tuyaux pneumatiques. Utilisé en remplacement des composants en métal, il contribue notamment à l'allégement des véhicules, une tendance particulièrement en vogue entre les considérations environnementales et le fort coût actuel des carburants. De fait, le polyamide 12 bénéficie ainsi d'un marché en forte croissance via l'automobile. Arkema cherche aujourd'hui des solutions alternatives en matière de fournisseurs de CDT. Le groupe français dispose de deux sites de production de polyamide 12 dans le monde : à Serquigny (Eure) et à Birdsboro aux États-Unis. Le groupe travaille aussi avec ses clients pour accélérer certaines homologations d'autres de ses polyamides de spécialités pour des applications automobiles couvertes aujourd'hui par le polyamide 12. C'est le cas notamment du polyamide 10. Arkema est devenu lui-même producteur depuis l'acquisition fin 2011 du Chinois Hypro Polymers (CPH n°572). Ses capacités sont actuellement en cours d'extension et seront portées de 5 000 à 15 000 tonnes par an d'ici la fin de l'été sur le site de Zhangjiagang (Chine). Cela étant, les éventuels volumes de polyamide 10 qui pourraient remplacer le 12 manqueraient en contrepartie sur leurs marchés propres, notamment pour les applications dans les énergies renouvelables et l'électronique.
VOS INDICES
source