[Industry story - Le podcast] Tout travail mérite salaire - Jeanne Schmahl lutte pour les droits des femmes
Mis à jour
29 avril 2021
Jeanne Schmahl tapote les fesses du nourrisson, qui se met enfin à crier. Tout va pour le mieux. Jusqu’à ce que sa patiente lui confie avoir été renvoyée. Elle avait demandé à son employeur qu’il cesse de verser son salaire à son mari alcoolique et violent. Le sang de l’assistante sage-femme ne fait qu’un tour. En ce XIXe siècle en fin de vie, la Franco-Britannique est prête à lancer son premier grand combat pour le droit des femmes.
Monsieur peut apprécier les jeux de cartes aux gains hasardeux, goûter au plaisir offert par des cuisses faciles et monnayables ou, pire, se noyer en des litres de chopine. Il peut y laisser son honneur, sa fidélité promise et surtout sa bourse. Une fois dépensés les fruits du dur labeur quotidien, l’égaré aux poches vides n’a plus qu’à siphonner celles de son épouse. Si madame travaille et gagne sa vie, son salaire ne lui appartient pas. Le mari en est le gestionnaire officiel et l’utilise comme bon lui semble.
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Les groupes féministes sont légion à l’orée des années 1890. Et les doléances tout aussi nombreuses : lutte pour l’obtention de nouveaux droits et contre les problèmes de pornographie, d’alcoolisme et de dépendance au jeu.
Ayant elle-même souffert de ce déclassement social, Jeanne Schmahl bataille ardemment. Ses études de médecine entreprises à Édimbourg se sont heurtées aux lois britanniques qui empêchent une femme d’exercer la médecine. Elle décide alors de poursuivre son apprentissage à Paris, où elle rencontre un entrepreneur alsacien et l’épouse. Le couple s’installe dans un appartement donnant sur le parc Montsouris et Jeanne seconde ses professeurs lors d’accouchements.
Son but, obtenir pour les trois millions de femmes mariées le droit de faire usage de leur salaire.
En janvier 1893, le travail commence. Elle fonde L’Avant-Courrière, prête à attaquer l’archaïque code civil. Et se démarque des groupes existants dont elle relève le point faible : mêler féminisme, politique et religion. Le combat est trop ambitieux et perdu d’avance. Elle préfère se concentrer sur les points les plus simples à faire approuver par les partis conservateurs. D’abord faire reconnaître aux femmes le droit d’apparaître comme témoins officiels d’actes publics et privés et au sein de jurys. Ensuite, obtenir pour les trois millions de femmes mariées le droit de faire usage de leur salaire.
Jeanne trouve appui auprès d’un féministe convaincu, le député des Deux-Sèvres Léopold Goirand. Fils d’ouvrier, ce républicain de gauche fait dès le 9 juillet 1894 une proposition de loi visant à « assurer à la femme mariée la libre disposition des fruits de son travail ». Et à l’époux de « contribuer aux charges du ménage ». La Chambre des députés l’adopte le 27 février 1896. Victoire !
Seulement, le Sénat se montre bien plus frileux. La chambre haute met onze longues années à délivrer son rapport. La loi est finalement adoptée le 13 juillet 1907. Au forceps. La presse célèbre une juste mesure de progrès social. Certaines féministes regrettent que banquiers et notaires, et parfois les travailleuses elles-mêmes, rechignent à appliquer cette nouvelle loi.
Jeanne Schmahl a mis au monde une avancée majeure. Fière du travail accompli, elle dissout dans la foulée son association et s’engage dans une nouvelle bataille : offrir le droit de vote aux femmes. Encore un peu de patience, la petite graine est plantée.
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