Impression 3D, une maturité à géométrie variable
Une étude exclusive de L’Usine Nouvelle sur la fabrication additive met en valeur différents niveaux de maturité chez les industriels.
Mis à jour
29 mai 2020
L'industrie s’est massivement convertie à l’impression 3D. D’après une étude exclusive pour « L’Usine Nouvelle » et HP menée auprès de 201 représentants d’entreprises, la part des industriels ayant recours à la fabrication additive représente 71 % des sondés, soit une nette majorité. Ce chiffre élevé met en valeur la démocratisation ces cinq dernières années, notamment auprès de structures de tailles petite et intermédiaire, d’une technologie longtemps réservée à de grandes entreprises novatrices. "Nous avons des acteurs pionniers en France, estime Jean-Daniel Penot, le responsable de la fabrication additive de l’école d’ingénieurs Cesi. Ce sont des entreprises aux reins solides, notamment dans l’aéronautique, le spatial et le militaire." Alors que près de neuf grandes entreprises sur dix disent l’utiliser – et que 58 % d’entre elles le font depuis plus de cinq ans –, 74 % des ETI l’ont adoptée il y a moins de cinq ans.
(Crédit photos: HP)
Une différence d’expérience qui se traduit par un degré de maturité plus ou moins élevé. Si 80 % des entreprises utilisent le dépôt de fil – une technique peu coûteuse, principalement réservée au prototypage rapide –, elles sont bien moins nombreuses à se servir de procédés plus complexes comme la photopolymérisation (31 %), le Multi Jet Fusion (21 %) ou la pulvérisation de matière (15 %). Ces derniers sont cependant davantage utilisés par les entreprises ayant plus de cinq ans d’expérience, qui favorisent la photopolymérisation (52 %), puis le Multi Jet Fusion (38 %) et la pulvérisation de matière (25 %). Une maturité d’usage qui se retrouve dans les mesures de précaution : 50 % des entreprises utilisant la technologie depuis plus de cinq ans disent avoir installé une ventilation de leurs locaux et entretenir régulièrement leurs machines, contre 37 % de l’ensemble des sondés.
Les matériaux font eux aussi l’objet d’un usage différent selon le degré d’expérience des industriels. Sans surprise, le plastique est largement plébiscité par 83 % des utilisateurs de fabrication additive. Viennent ensuite l’élastomère et la résine (41 %), suivis du métal. L’utilisation de ce dernier représente lui aussi un marqueur de maturité : alors que seuls 30 % des industriels interrogés disent l’utiliser, ce chiffre grimpe à 45 % pour ceux qui recourent à l’impression 3D depuis au moins cinq ans. Les entreprises prévoyant de passer à la fabrication additive, elles, sont presque autant séduites par le plastique (70 % des sondés) que par le métal (61 %). "Nous observons une différence de maturité entre l’impression du plastique et celle du métal, soulève Nicolas Parascandolo, expert du sujet pour le Symop, le syndicat des fabricants de machines de production. Le plastique commence à trouver son marché, alors que le déploiement du métal est encore assez confidentiel."
La rentabilité et le coût, des freins à surmonter
Au-delà d’une évolution des usages en fonction de l’expérience, ce baromètre met en lumière des attentes différentes entre les industriels recourant déjà à la technologie et ceux qui préparent son adoption. Ces derniers souhaitent principalement être accompagnés dans le choix des matériaux à utiliser (61 %) et sur l’utilisation de logiciels dédiés (48 %) alors que les usagers de la technologie disent avant tout chercher conseil sur la conception de produits (40 %), puis sur l’utilisation de matériaux (38 %). Une prise en main de la technologie met aussi en avant des freins nouveaux, que les entreprises prévoyant d’utiliser l’impression 3D n’anticipent pas. C’est le cas du manque de rentabilité pour la production à grande échelle : deuxième frein le plus important pour les entreprises ayant recours à la technologie, avec 36 % des réponses, il chute à la sixième place pour celles qui prévoient de l’utiliser (22 %). "Il existe quelques rares exemples de production en série rentables, observe Jean-Daniel Penot. Mais les entreprises ont du mal à trouver un modèle économique à la fabrication additive en série."
De même, les entreprises utilisatrices de la fabrication additive semblent moins freinées par le coût élevé de l’impression 3D (41 %), alors que ce blocage est, de loin, le plus important pour celles qui ne l’utilisent pas encore (74 %). C’est davantage le cas pour les industriels qui ont adopté la fabrication additive il y a plus de cinq ans : 22 % d’entre eux ont investi 100 000 euros ou plus en un an, contre 11 % de l’ensemble des sondés. Ces investissements mettent par ailleurs en valeur une opposition entre les grandes entreprises – qui sont 19 % à avoir investi plus de 500 000 euros en un an – et les TPE-PME, dont 84 % d’entre elles ont investi moins de 50 000 euros sur une même période. Preuve, s’il en est, que la démocratisation de la technologie passera nécessairement par une baisse du coût aussi bien des machines que des matériaux.
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