Comment le CEA va empêcher le dopage mécanique sur le Tour de France

Le Commissariat de l'énergie atomique (CEA) a mis au point une caméra thermique pour lutter contre le dopage technologique durant le Tour de France. Avec cet outil, les dirigeants du tour pourront détecter un moteur caché à l'intérieur des vélos. Un premier test grandeur nature a eu lieu lors des championnats de France de cyclisme organisés les 25 et 26 juin à Vesoul.

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Comment le CEA va empêcher le dopage mécanique sur le Tour de France

L’édition 2016 du Tour de France marquera un pas décisif dans la lutte anti-dopage. Après avoir longtemps combattu le dopage physiologique, la 103e "Grande boucle" marquera le début de la lutte contre le dopage mécanique. Le Commissariat de l’énergie atomique (CEA) a mis au point une caméra thermique capable de déceler les moteurs dissimulés à l’intérieur des cadres des vélos.

Une volonté politique

Vincent Berger est le directeur de la recherche fondamentale au CEA depuis le début de l’année. Auparavant ingénieur chez Thales puis directeur de Paris VII, il a également été conseiller à l’Elysée pour l’enseignement supérieur entre 2013 et 2015. C’est donc naturellement vers lui que s'est tourné le gouvernement pour trouver un moyen de détection contre la fraude mécanique dans le cyclisme.

Car l’initiative est paradoxalement venue de Thierry Braillard, le secrétaire d’Etat en charge des Sports. L’homme souhaite qu’une "technologie immédiatement mobilisable" soit mise en place et qu’une équipe de chercheurs développent "de nouveaux moyens de contrôle à plus long terme".

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Le lien avec le CEA s’est fait par l’intermédiaire du Secrétaire d’Etat en charge de la Recherche. "Thierry Mandon m’a demandé si le Commissariat à l’énergie atomique possédait des méthodes pour la détection des triches mécaniques", explique Vincent Berger, ancien collègue du secrétaire d’Etat lors de son passage à l’Elysée. "En réalité, nous avions plusieurs solutions à proposer."

Une détection à toute épreuve

Deux d’entre elles ont été retenues. Comme le souhaitait Thierry Braillard l’une a pu être mise en place pour le début du Tour de France 2016, le 2 juillet. "Il s’agit d’une technologie infrarouge", détaille le directeur de la recherche fondamentale au CEA. "C’est une caméra capable de détecter la conductibilité thermique des matériaux."

Avec cet outil, il est possible de capter des variations de température de l’ordre du centième de degré. Cette précision permet de distinguer clairement des moteurs à l’intérieur des cadres de vélo, "même si celui-ci est à l’arrêt", assure Vincent Berger. "La caméra perçoit les changements de conductibilité thermique. Ainsi, un cadre vide possèdera des capacités thermiques différentes d’un cadre plein. Sur l’image, un moteur apparaitra donc même s’il est à la même température que le cadre."

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Plusieurs types de caméra pourront être mis en place en fonction de son utilisation : fixe, sur une moto, ou depuis un hélicoptère. "De manière fixe, les coureurs au second plan pourront passer à travers le contrôle. Le fait d’embarquer la caméra sur une moto obligerait à en augmenter le nombre sur les étapes. Depuis un hélicoptère, il n’y a aucune gêne pour la course." Mais c’est à la direction du Tour de France de choisir le type de contrôle et les étapes sur lesquelles ils seront mis en place.

Une autre solution à venir

Un premier test grandeur nature a été réalisé lors des championnats de France de cyclisme, les 25 et 26 juillet. "Heureusement ou malheureusement, selon si l’on se place du côté du sport ou de la science, aucune triche n’a été détectée." Durant le développement, les ingénieurs du CEA avaient un VTT équipé d’un moteur pour tester leur technologie. "L’UCI (Union cycliste international) tente de nous procurer un vélo truqué, mais nous n’en avons pas encore à disposition."

Dans quelques mois, le CEA sera capable de proposer un autre système de détection des fraudes. "Des capteurs magnétiques dynamiques enregistreront le champ magnétique du vélo", affirme Vincent Berger. "Ils pourront détecter des variations magnétiques de l’ordre du picotesla." Soit une induction magnétique d'un million de fois plus faible que le champ magnétique émis par la Terre.

Ces capteurs pourront être attachés au cadre sous forme de bague ou directement intégrés dans les dossards des cyclistes. "Les dossards étant fournis par les organisateurs de course, il n’y aura plus de soucis de contrôle."

Le magnétisme est déjà utilisé par les contrôleurs de l’UCI, mais leur méthode exige un contact avec le vélo. "Ici, il suffira de reprendre les dossards pour analyser le champ magnétique du vélo", explique le membre du CEA. "L’empreinte magnétique d’un moteur sera enregistrée par le capteur et permettra d’en déduire une triche."

Une intégration sportive attendue

D’après le secrétaire d'Etat en charge du sport, ces moyens de contrôle pourraient agir comme des armes de dissuasion et freiner les pratiques. "Nos relevés ne seront pas des preuves", nuance Vincent Breger. "Ils n’auront pas de valeur juridique. Pour le moment, seul le démontage du vélo fait foi."

Mais la prise en compte du dopage mécanique grandit au sein des instances sportives. Le président de l’UCI, Brian Cookson, a même fait inscrire l’interdiction d’assistance mécanique dans le pédalage dans le règlement du sport. Après de nombreux soupçons, la mise en place de moyens de contrôle pourraient définitivement mettre un terme au dopage mécanique.

Retrouvez le reportage de Stade 2 sur le dopage mécanique :

Découvrez la réaction de Brian Cookson à partir de 10'00 et la technologie du vélo truqué à partir de 14'30.


VIDEO. Un moteur dans le vélo par francetvsport

Pierre Monnier

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