[Chronique RH] La grève, le faux-ami du télétravail
Et si la principale conquête des manifestants du jeudi 5 décembre était le développement voire la généralisation du télétravail, encouragé par la ministre Muriel Pénicaud elle-même. Dirigeants d’entreprises, DRH et managers vont avoir du mal à continuer de refuser d’accorder aux salariés de travailler à distance, quand ils auront eux-mêmes encouragés la pratique pendant les grèves. C’est que la France n’est pas vraiment en avance dans le domaine. Depuis des années les rapports s’entassent et les lois s’enchaînent sans qu’on observe de changement vraiment notable dans ce domaine.
La France en retard
Récemment une étude de la Dares, le service des statistiques du ministère du Travail révélait que seulement 3% des salariés ont recours à ce type d’organisation régulièrement. Parmi ceux-ci, 45 % télétravaillent un jour par semaine, 26% deux jours et 29 % trois jours ou plus. Au sein de l’Union européenne, la France est plus proche des pays du Sud de l’Union que du Nord. Les études évoquent un taux avoisinant les 30 % dans les pays scandinaves. En France, le phénomène minoritaire concernerait plutôt les cadres et autres managers qui y ont davantage recours que les employés.
C’est donc une bonne nouvelle, quoique. La première chose qu’il faudrait vérifier avant de se réjouir est de savoir les raisons de la demande de télétravail. Les salariés plébiscitent-ils vraiment ce mode d’organisation ou n’est-il qu’un pis-aller pour oublier les temps de transport incertains et élastiques, les espaces de travail devenus des enfers en raison du bruit qui y règne et une organisation du travail insupportables ? Dans ce cas, organiser le télétravail est surtout une stratégie d'évitement. Plutôt que de résoudre les vrais problèmes, on les cache au domicile du salarié comme le mauvais homme de ménage (ou son épouse) qui cache la poussière sous le tapis. En apparence, on a la paix pour pas cher mais on n’a rien soigné.
Mauvaise publicité
En outre, si les appels de la ministre sont suivis d’effets, ils pourraient avoir un impact négatif et paradoxal sur le télétravail. Le télétravail ce n’est pas travailler depuis son domicile, un espace partagé ou un coworking sans réflexion préalable. Le télétravail doit être un changement des modes d’organisation en profondeur, des manières de manager, d’organiser le travail des salariés et de le contrôler. Le bricolage improvisé qui risque d’être pratiqué pendant les jours qui viennent n’est pas du télétravail. L’appeler ainsi associera durablement cette pratique moderne aux problèmes rencontrés par impréparation.
En bonus : le regarde décalé de "Broute" sur le télé-travail
SUR LE MÊME SUJET
[Chronique RH] La grève, le faux-ami du télétravail
Tous les champs sont obligatoires
0Commentaire
Réagir