Un gène avec une action clé sur la fonte musculaire
Trouver l'origine de la perte de masse musculaire avec l'âge, c'est ce qu'ont tenté des chercheurs de l'Institut de myologie. Ils ont ainsi identifié un gène important de ce processus.
Connaissez-vous l'efficacité de votre gène Sprouty1 ? La question peut paraître saugrenue, et pourtant, elle revêt une importance croissante pour les personnes âgées confrontées à la diminution de leur masse musculaire. « D'un point de vue physiologique, la fonte musculaire fait partie des bases fondamentales. Elle intervient progressivement tout au long de la vie adulte », témoigne Stéphanie Duguez, chercheuse à l'Institut de Myologie (UPMC, Inserm, CNRS) et co-auteur d'une étude publiée dans CellReports. L'un des paramètres connus pour expliquer en partie cette fonte musculaire est la diminution du nombre de cellules souches musculaires avec l'âge. Les chercheurs ont tenté de « comprendre pourquoi les cellules souches musculaires disparaissent avec le vieillissement », souligne Stéphanie Duguez. Ils ont travaillé sur des cellules souches musculaires prélevées chez sept volontaires jeunes d'environ 20 ans et chez 14 personnes âgées d'environ 80 ans.
Des premiers résultats surprenants
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205 +1.49
Février 2023
PVC
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Février 2023
Indice de prix de production de l'industrie française pour le marché français − CPF 20.1 − Produits chimiques de base, engrais, Produits azotés, plastiques, caoutchouc synthétique
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99.3 +1.43
Février 2023
Indice de prix de production de l'industrie française pour le marché français − CPF 21.20 − Préparations pharmaceutiques
Base 100 en 2015
La première partie de l'étude a consisté à démontrer que les cellules souches des personnes âgées mouraient plus facilement. Première surprise : « Nous avons montré que les cellules, qu'elles soient issues de personnes âgées ou jeunes, mouraient de la même façon », détaille Stéphanie Duguez. L'équipe de l'Institut de Myologie s'est alors intéressé à la sénescence des cellules souches musculaires, c'est-à-dire la dégradation des cellules liées au vieillissement. Ils voulaient montrer qu'elle avait un impact sur la capacité des cellules de se répliquer. Là encore les résultats ont surpris les chercheurs. « Quand nous mettions les cellules des personnes âgées en culture, elles n'avaient aucun problème pour proliférer. Il n'y a donc pas de sénescence réplicative. Au contraire, les cellules des personnes âgées formaient des myofibres aussi belles que les cellules des personnes jeunes. Elles n'ont donc aucun problème à refaire du muscle », témoigne Stéphanie Duguez.
L'équipe de chercheurs a ensuite effectué une analyse transcriptomique des cellules souches. Là encore, cette analyse confirme que les cellules souches de personnes âgées étaient engagées dans un programme myogénique, c'est-à-dire de formation de fibres musculaires. « Nous étions surpris à chaque étape », ajoute la chercheuse.
C'est en étudiant la méthylation de l'ADN, c'est-à-dire des groupes méthyl (CH3) s'attachant sur l'ADN, que les chercheurs ont trouvé une piste de réponse. « Lorsque ces groupes CH3 sont présents sur l'ADN, cela modifie l'expression génique. Le vieillissement s'accompagne d'une modification de la méthylation dans les cellules souches musculaires. Cela a déjà été observé au niveau d'autres tissus. C'est une première pour les cellules souches musculaires », détaille Stéphanie Duguez. Et cette méthylation est particulièrement marquée au niveau des gènes impliqués dans la quiescence. C'est là qu'intervient le gène Sprouty1. Les chercheurs ont ainsi observé que ce gène est hyperméthylé, ce qui entraîne une inhibition de son expression. « Ainsi, à cause de l'inhibition progressive de Sprouty1 avec l'âge, de moins en moins de cellules souches musculaires entreraient en quiescence, ce qui épuiserait notre réserve », résume Stéphanie Duguez.
La quiescence est l'action des cellules à se mettre en sommeil pour reconstituer le stock initial de cellules souches musculaires qui constituent ainsi une réserve. Quand un muscle doit être réparé ou régénéré, toutes les cellules souches musculaires sont activées et prolifèrent. Une grande majorité se différencie pour recréer des fibres musculaires ou les renforcer. Une petite partie entre, elle, en quiescence afin de refaire le stock de cellules souches musculaires prêtes pour le prochain besoin. C'est cette faculté de mise en sommeil qui semble faire défaut chez les personnes âgées. « La proportion de cellules entrant en quiescence est d'environ 20 % pour une personne jeune. Chez les personnes âgées, le taux était de 3 à 5 %. S'il n'y a plus de cellules qui reconstituent le stock, il diminue à chaque réparation », souligne Stéphanie Duguez. Petit à petit, les personnes âgées perdent les cellules souches musculaires capables de reconstruire les muscles et voient ainsi leur masse musculaire fondre. Les chercheurs ont confirmé l'implication du gène Sprouty1 dans la quiescence en l'inhibant dans les cellules des personnes jeunes. Ils ont alors constaté une diminution de la proportion de cellules entrant en quiescence et in fine de la réserve de cellules souches. L'équipe de l'Institut de Myologie a également montré que la déméthylation de Sprouty1 dans les cellules des personnes âgées permet de revenir à un taux normal d'entrée en quiescence.
Ces résultats ouvrent de nouvelles pistes de recherche et peut-être de traitements. Comme en témoigne Stéphanie Duguez : « un axe consiste à comprendre quels sont les facteurs intervenant sur la méthylation des cellules souches musculaires. On pourrait également s'intéresser aux actions pour réduire le niveau de méthylation : activités physiques, alimentations... ». Une piste thérapeutique consisterait à développer des traitements pour empêcher la méthylation du gène Sprouty1. Ainsi, le vieillissement n'aurait plus d'impact sur la masse musculaire !