Interrompu il y a un an après quelques jours d’audience, le procès du médicament du laboratoire Servier reprend mardi 21 mai. Entre l’industriel et ses victimes présumées, la tension est à son comble. Explications.
Un an après son interruption, le procès du Mediator reprend ce mardi 21 mai devant le tribunal correctionnel de Nanterre. Au programme, seize jours de débat pour identifier la responsabilité du laboratoire Servier et de son fondateur et dirigeant, Jacques Servier, accusés de "tromperie aggravée" sur cet adjuvant au diabète, largement détourné comme coupe-faim durant sa commercialisation de 1976 à 2009, et soupçonné d'avoir causé au moins 500 décès. 600 personnes demandent réparation.
Les tous derniers rebondissements de cette affaire ont plutôt joué en défaveur du laboratoire Servier. Une semaine avant l’ouverture du procès, Jacques Servier avait créé la polémique en répliquant "on s'en fout du procès" à des journalistes de BFMTV qui l’avaient interpellé près de son domicile. Des propos qui avaient obligé le laboratoire à s’excuser, mettant ces propos sur le compte de "la peur" du nonagénaire dans cette situation, "explicable par son âge et son état de santé".
La mise en cause de Servier, mais aussi des autorités sanitaires
Mi-avril, c’est un rapport d’expertise judiciaire dévoilé par le pôle Santé du tribunal de grande instance (TGI) de Paris (qui mène sa propre instruction indépendamment du procès pénal), qui avait plombé l’industriel. Ce rapport dénonçait la stratégie de dissimulation qu’aurait menée le groupe pharmaceutique auprès des médecins sur les propriétés du Mediator. Estimant que la commercialisation du médicament aurait pu être suspendue bien avant 2009. Mais l’autorité sanitaire du médicament (ANSM) est aussi mise en cause dans cette affaire. Soupçonnée d'avoir négligé les alertes sur la dangerosité du médicament de 1995 à 2009, elle a ainsi été mise en examen en avril pour homicides et blessures involontaires. Nul doute que la défense de Servier saura le rappeler au procès.
Bataille d’experts sur le nombre de victimes
Quant au nombre exact de victimes du médicament, personne n’est en mesure de le donner. Selon le rapport du TGI de Paris, 1300 à 1800 décès en France seraient liés à long terme à une valvulopathie (déformation des valves cardiaques) imputable au Mediator. Les experts indépendants de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam), missionnés par l’Etat, sont moins alarmistes. Un débat qui avait suscité en octobre 2012 dans nos colonnes de vives passes d’armes entre Lucy Vincent, la directrice des opérations extérieures de Servier, et Irène Frachon, la pneumologue lanceuse d’alerte de l’affaire Mediator.
La montée au créneau de Marisol Touraine
Les accusés devront aussi tenter, durant ce procès, de prouver leur bonne foi, alors que la ministre de la Santé, Marisol Touraine, leur avait reproché, il y a quelques mois,d’utiliser "tous les moyens juridiques à leur disposition pour ralentir l'issue" des procès. Mais la juge Prévost-Desprez, en charge du procès pénal de Nanterre, avait pour sa part pris indirectement la défense du laboratoire.
En mai 2012, elle avait déclaré qu’"il ne saurait être imposé à aucun juge (...) un dossier tronqué au motif que la justice doit passer vite et donc dans n'importe quelles conditions", et annoncé le report du procès. L’ambiance promet d’être lourde ce mardi…
Gaëlle Fleitour
La réforme post-Mediator toujours pas bouclée
Lancée fin 2011 par le ministre de la Santé de l’époque, Xavier Bertrand, pour empêcher des scandales du type Mediator de se reproduire, l’application d’une partie de la réforme du Système du médicament se fait toujours attendre. Car la nouvelle ministre, Marisol Touraine, "n’arrive pas à résister à la pression de l’industrie pharmaceutique", estimait-il y a quelques semaines Xavier Bertrand. On attend en effet toujours les décrets des dispositions les plus contraignantes pour l’industrie, portant sur la transparence des liens d’intérêt et des montants versés par les laboratoires aux médecins.
Gaëlle est rédactrice en chef web de L'Usine Nouvelle. Entre 2011 et 2018, elle a suivi les industriels de la pharmacie, des dispositifs médicaux, de la cosmétique et de la chimie, puis ceux de l'agroalimentaire et de l'agrochimie pour le magazine et le site. Formée aux Echos, au Monde, à La Croix et à Ouest-France, elle travaillait précédemment au sein du magazine Option Finance et pour l’Expansion. Elle est titulaire d’un master professionnel de journalisme de l’Institut Français de Presse et diplômée de Sciences-Po Rennes (section économie-finances).
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