UIMM : la fausse révélation de Denis Gautier-Sauvagnac
On s’en doutait, Denis Gautier-Sauvagnac l’a enfin confirmé devant le tribunal. Une partie des 17 millions d’euros qui lui valent une mise en examen pour abus de confiance ont fini dans les caisses des syndicats. C’est davantage une explicitation qu’une révélation. En revanche, il ne donnera pas les noms des intermédiaires. Ou comment avouer sans dissiper le mystère.
"En réalité, je reconnais que je n'ai pas été assez clair jusqu'à présent et je confirme ici les propos d'Arnaud Leenhardt […] Ce sont bien les syndicats, comme il l'a dit", a expliqué, ce lundi 14 octobre au tribunal de grande instance de Paris l’ancien président de l’UIMM, Denis Gautier-Sauvagnac (DGS). Arnaud Leenhardt, son prédécesseur à la tête de l’UIMM de 1985 à 1999, avait déclaré peu avant que les syndicats avaient touché des sommes en liquide de l’UIMM. Mercredi dernier, DGS regrettait de ne pas pouvoir parler, invoquant le poids qui pesait sur lui. Les cinq nuits écoulées depuis la dernière audience lui auront visiblement porté conseil, puisque ce lundi il a confirmé devant le tribunal correctionnel de Paris qu’une partie des 17 millions d’euros retirés en liquide avait été donné à "des organisations de salariés et patronale", ce qui représentait "une forme d’appui, depuis des décennies."
A moins que ce ne soit ses avocats qui l’aient encouragé à en dire un peu plus, devant le tour qu’avait pris l’audience. La défense de DGS se trouvait prise dans une contradiction : il expliquait à la fois que le système qui prévalait alors était connu de tous (ce que de nombreux témoins nient) tout en expliquant qu’il fallait que les retraits et les dons se fassent discrètement. Le tribunal avait soulevé ce paradoxe et interrogé plusieurs fois l’ex numéro un de la fédération de la métallurgie.
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En disant que les syndicats de salariés ont reçu des sommes en liquide, DGS fait une sorte de vraie fausse révélation. L’affaire semblait entendue. En effet, toute l’audience de mercredi dernier, DGS l’a dit sans le dire, tout en le disant un peu, pratiquant "la langue de bois d’inspecteur des finances" selon la très confraternelle expression utilisée par l’ancien dirigeant du Medef Ernest-Antoine Sellière lors de son audition devant le juge d’instruction.
Un complément à des paiements par chèques
Maître de l’esquive et de la réponse évasive, DGS avait expliqué que les sommes servaient pour des organisations participant à la vie sociale, niait qu’elles aient pu échoir à des journalistes, des sociologues ou un cabinet d’études, comme l’avait prétendu un des témoins. La liste des organisations répondant aux critères de DGS se réduisait d’autant. Mais ce dernier refusait de dire explicitement les destinataires à l’audience du 9 octobre. Ce même jour, DGS avait expliqué fermement qu’ "il n’y avait pas eu de collusion avec les syndicats." Sur ces deux points, DGS n’a pas varié. Il ne veut pas donner les noms des personnes concernées, au nom de ses "convictions" et de ses "valeurs". De même, il a répété qu’il n’y avait eu "aucune complaisance" des syndicats.
Il a également redit que ces sommes n’étaient qu’une partie de l’aide apportée par la fédération de la métallurgie aux organisations, évoquant des pratiques qui évoquent davantage la surfacturation que des relations commerciales. L’UIMM payait par chèque "des achats d’espaces publicitaires ou des locations de stands, également à prix d’or, a-t-il ajouté. Mais cela n’était pas suffisant, c’était un prétexte qui avait ses limites." Le solde était donc versé en espèces non pas sonnantes, puisqu’il s’agissait de billets rangés dans des enveloppes, comme l’a expliqué DGS mercredi dernier.
Reste que les juges vont continuer à vouloir savoir qui a touché de l’argent en liquide et pour quoi faire. De ces réponses dépend l’incrimination pénale retenue et l’éventuelle condamnation de DGS et des neuf autres co-accusés et de l’UIMM comme personne morale.
Christophe Bys
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