UBS dans la tourmente en Chine après des propos sur les porcs

PEKIN/SHANGHAI (Reuters) - Haitong International Securities Group a annoncé vendredi qu'il ne travaillerait plus dans l'immédiat avec UBS à la suite de la polémique déclenchée en Chine par les propos du chef économiste de la banque suisse sur les porcs chinois, perçus par certains comme une insulte raciste.

Haitong International, antenne cotée à Hong Kong du courtier chinois Haitong Securities, a suspendu toute collaboration avec UBS, écrit l'entreprise dans un courriel adressé à Reuters, ajoutant qu'aucune date pour la reprise éventuelle de cette collaboration avec le groupe suisse n'avait été fixée.

Lin Yong, directeur général de Haitong International, a annoncé cette décision sur son compte personnel WeChat, selon un employé ayant vu le message. La décision figure également dans un courriel interne envoyé au personnel de Haitong International, a déclaré à Reuters un autre salarié.

Une épidémie de peste porcine africaine sévit en Chine et a déjà tué des millions de bêtes.

Dans le cadre d'une analyse sur l'inflation, Paul Donovan, chef économiste monde depuis 2016 au sein de la division gestion de fortune d'UBS, a déclaré mercredi dans un podcast que les prix à la consommation avaient grimpé essentiellement en raison de cette épidémie.

"Est-ce important? C'est important si vous êtes un porc chinois. C'est important si vous aimez manger du porc en Chine", a-t-il déclaré.

Ces propos tenus sur le vif ont provoqué un tollé en Chine. Malgré les excuses présentées par la banque, certains membres de la communauté financière ont appelé à un boycott d'UBS.

LE LIMOGEAGE DE PAUL DONOVAN RÉCLAMÉ

"Nous présentons nos excuses sans réserve pour tout malentendu causé par ces propos innocents de Paul Donovan. Nous avons retiré ce commentaire audio. Pour clarifier ses propos, ce commentaire faisait référence à l'inflation et à l'augmentation des prix à la consommation en Chine, qui ont été soutenues par la hausse des prix du porc", déclare UBS dans un communiqué.

"UBS prend cette affaire au sérieux. Nous renforçons nos procédures internes pour éviter que de telles situations ne se reproduisent. Nous restons pleinement déterminés à investir en Chine", ajoute la banque.

Lin Yong est également président de la Chinese Securities Association of Hong Kong (HKCSA), qui regroupe 124 sociétés dont des filiales à l'étranger de courtiers et de fonds chinois. Interrogée vendredi par Reuters, la HKCSA a dit ne pas avoir connaissance d'une autre initiative identique à celle de Haitong parmi ses membres.

Elle a annoncé jeudi avoir demandé à UBS de limoger Paul Donovan et de présenter des excuses officielles de la part de son conseil d'administration, tout en invitant les entreprises et les particuliers à réfléchir attentivement à leurs relations d'affaires avec UBS.

"Malheureusement, ces commentaires (les excuses d'UBS) non seulement manquent de sincérité mais ils sont aussi condescendants, ce qui heurte de nouveau la sensibilité du peuple chinois", écrit la HKCSA dans une lettre ouverte adressée au conseil d'administration d'UBS.

Lin Yong n'a répondu ni aux courriels ni aux appels téléphoniques destinés à obtenir un commentaire de sa part.

Interrogé sur la décision de Haitong, UBS a rappelé les excuses présentées par le groupe, sans plus de commentaires.

La Chine est un marché important pour UBS en Asie. La banque suisse est devenue l'an dernier le premier établissement étranger à prendre le contrôle d'une institution financière chinoise.

(Samuel Shen, Xiangming Hou et Ryan Woo, avec Cheng Leng, Stella Qiu et Jennifer Hughes; Claude Chendjou pour le service français, édité par Bertrand Boucey)