[Tribune] L’intelligence artificielle, enjeu industriel de la présidence française de l’Union européenne
Pour développer notre industrie, il est nécessaire de maitriser les logiciels et l’intelligence artificielle. Le dernier CES de Las Vegas fait la part belle à l’intelligence artificielle, au cœur de toutes les industries, automobile comprise. La présidence française de l'Union européenne (PFUE) pourrait donner une impulsion décisive pour notre continent, estime Franck Cazenave.
D’ici 2030, tous les moyens de transports, aérien, ferroviaire, naval et routier basculent dans le XXIe siècle, en utilisant tous les potentiels de l’informatique, de l’intelligence artificielle, d’Internet et de la propulsion électrique, sur batteries ou hydrogène. Durant cette décennie, de nombreux moyens de transports auront été rendus autonomes. La mobilité des individus et le transport de marchandises auront donc entamé une profonde transformation.
L’automobile du XXI° siècle, un produit numérique
Au XXe siècle, les constructeurs automobiles ont ajouté, petit à petit, de l’intelligence artificielle sur une architecture mécanique et analogique. Au XXIe siècle, la fusion est totale entre le numérique et les voitures. D’ailleurs, tous les géants du numérique, Amazon, Apple, Google et Microsoft investissent massivement dans ce secteur. Les réseaux de communication des voitures reprennent les standards des ordinateurs, et abandonnent leur protocole spécifique. L’AUTOmobile devient la ROBOmobile.
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Pour la France et l’Union européenne, il s’agit de décider de la stratégie et des investissements à consentir, selon le degré de souveraineté technologique à atteindre. Il y a deux domaines clés de la robotisation des moyens de transport : le cerveau électronique et le système d’exploitation, pourvu d’intelligence artificielle. En ce qui concerne le cerveau électronique et les semi-conducteurs dont il est pourvu, la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a affirmé lors de son discours sur l’état de l’Union son intention de lancer un grand plan d’investissement en Europe. Toutefois, en ce qui concerne l’intelligence artificielle, aucune vision et aucun plan n’ont été proposés par la Présidente de la Commission européenne.
La souveraineté française et européenne dans l’Intelligence Artificielle
Quotidiennement, les européens utilisent des smartphones, tablettes et ordinateurs qui fonctionnent avec des systèmes d’exploitation non européens. Pire, les données des européens nourrissent les algorithmes d’intelligence artificielle d’entreprises étrangères, pour en retour, les améliorer !
Avant la révolution du smartphone, les entreprises de l’Union européenne constituaient les leaders du marché du téléphone mobile, avec Nokia, en tête, et aussi Ericsson, Siemens... La France et l’Europe ont perdu la première bataille d’Internet et de l’intelligence artificielle : les moteurs de recherche, les réseaux sociaux et les systèmes d’exploitation des smartphones sont américains ou chinois. La transformation de toute l’industrie des transports suit la même trajectoire que celle du téléphone mobile… Si nos entreprises et nations ne maitrisent pas les systèmes d’exploitation artificiels des automobiles et autres moyens autonomes de transport, tous les fleurons français et européens se trouveraient en difficulté... En tout cas, ce serait un coup dur à la souveraineté technologique de la France et de l’Union Européenne dans le domaine du transport.
La Commission européenne a présenté, en décembre 2020, le paquet Digital Markets Act (DMA) et Digital Services Act (DSA), et la Présidence française de l’Union européenne (PFUE) s’investit pour que ces textes aboutissent dans les six mois. Pour aller plus loin, la PFUE pourrait lancer une nouvelle dynamique sur l’enjeu industriel de l’intelligence artificielle. Des alliances peuvent être nouées avec d’autres nations européennes, impliquées dans les transports. L’Union européenne peut jouer un rôle d’accélérateur, de fédérateur et de contributeur financier, comme pour le plan de relance à la suite de l’épidémie de coronavirus. En mai 2021, notre partenaire allemand a déjà défini le cadre national et légal au déploiement de voitures autonomes, avec des déploiements attendus d’ici juillet. Il devrait se révéler un puissant allié pour la PFUE pour faire progresser cette ambition industrielle.
Avec le numérique, nous sommes entrés dans une ère nouvelle, l’ère de l’hyper-compétitivité. Seules quelques nations seront souveraines dans le numérique et les répercussions seront ressenties dans toutes les industries, en particulier, le transport. Alors, « pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible», selon Antoine de Saint Exupéry, Citadelle, en 1948. La PFUE pourrait mobiliser les forces européennes nécessaires pour lancer un plan de l’intelligence artificielle en faveur des moyens de transport autonomes.
Franck Cazenave, auteur de l’ouvrage « La robomobile », Descartes & Cie, sortie le 18 janvier 2022
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