TIM veut saisir la justice pour bloquer l'offensive d'Elliott
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\ 05h15
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MILAN (Reuters) - Telecom Italia (TIM) entend saisir la justice pour empêcher un vote sur des candidats proposés par le fonds activiste Elliott à son conseil d'administration à l'assemblée générale du 24 avril, a annoncé lundi l'opérateur télécoms italien contrôlé par Vivendi.
Le groupe de médias français et Elliott, qui vient de porter sa participation dans TIM à 8,8%, devaient se confronter directement pour la première fois à l'assemblée générale annuelle prévue dans 15 jours.
Evoquant un problème de gouvernance et de performance, le fonds activiste dirigé par Paul Singer a appelé en mars au non renouvellement de six administrateurs nommés par Vivendi, dont le président Arnaud de Puyfontaine, également président du directoire du groupe français, et leur remplacement par des personnalités bien connues du monde des affaires en Italie.
A la suite de la demande d'Elliott, huit membres du conseil placés par Vivendi ont démissionné d'un bloc, rendant nécessaire un vote sur une refonte totale du conseil lors d'une assemblée générale extraordinaire convoquée pour le 4 mai.
Malgré ces démissions, les commissaires aux comptes de TIM ont inclus la proposition d'Elliott à l'ordre du jour de l'AG d'avril, une décision que le conseil d'administration de l'opérateur historique a qualifiée lundi d'"illégale", d'"erronée et de particulièrement grave", et qui l'aménera à saisir la justice pour "protéger les droits et intérêts de tous les actionnaires."
TIM a perdu un quart de sa valorisation boursière depuis que Vivendi est entré dans son capital en 2015 puis a resserré progressivement son emprise sur l'opérateur télécoms italien, dont il détient actuellement près de 24% du capital.
Elliott pour sa part affirme qu'un nouveau vote ne sera pas nécessaire en mai si ses candidats sont désignés en avril.
Trois cabinets de conseil aux actionnaires, Glass Lewis, ISS et Frontis, ont recommandé aux actionnaires de TIM de soutenir la proposition du fonds américain.
"A ce stade, Vivendi semble être plus un passif qu'un actif pour TIM (...) et l'influence de Vivendi n'a pas apporté de stabilité", écrit ISS dans un rapport publié lundi.
Elliott fait valoir qu'un conseil d'administration moins inféodé à Vivendi pousserait à la conversion des titres d'épargne de TIM, au retour du versement d'un dividende et à une vente partielle du réseau de l'opérateur pour réduire son endettement et créer de la valeur.
Vivendi a déjà communiqué la liste de ses candidats pour l'AG de mai, alors qu'Elliott avait jusqu'à minuit pour le faire.
AMOS GENISH "AU COEUR DE LA BATAILLE"
Si Elliott réclame un renouvellement du conseil, il soutient l'administrateur délégué Amos Genish, pourtant un allié du président de Vivendi Vincent Bolloré.
Les trois sociétés de conseil aux actionnaires ont aussi recommandé le maintien en poste de Genish, qui avait été coopté en septembre après la démission de son prédécesseur et a présenté le mois dernier un plan stratégique bien accueilli par les investisseurs.
Genish a pour lui une longue expérience dans les télécoms et au Brésil mais voter pour lui pourrait être difficile pour certains actionnaires désireux de limiter l'influence de Vivendi.
L'association Assogestioni qui regroupe des fonds italiens a renoncé lundi à présenter des candidats, ce qui pourrait jouer en faveur d'Elliott.
Elliott s'est dit lundi favorable au maintien de l'équipe dirigeante de TIM, Genish en tête, mais des sources notent que ce dernier pourrait choisir de ne pas rester s'il n'a pas l'assurance de pouvoir compter sur le soutien d'une majorité d'administrateurs.
Selon trois sources proches du dossier, Elliott a entamé la recherche d'un successeur au cas où Genish partirait. "Mais c'est compliqué car il jouit d'un important soutien, il est au coeur de la bataille", a dit l'une des sources.
Elliott et ses fonds associés détiennent désormais environ 8,8% des actions ordinaires TIM, alors que Vivendi en a 23,9%. L'investisseur activiste possède aussi des options d'achat sur 750 millions d'actions ordinaires, ce qui représente en puissance une participation supplémentaire de 4,9%.
TIM a connu trois administrateurs délégués depuis que le groupe français a investi dans l'opérateur italien en 2015.
L'Etat italien, qui considère TIM comme une entreprise stratégique, est intervenu dans ces manoeuvres entre Vivendi et Elliott en entrant au capital de l'opérateur via l'établissement public CDP.
L'action Telecom Italia, très volatile, a gagné 0,12% en Bourse de Milan, à 0,8542 euro, après avoir perdu jusqu'à 5% en début de séance.
(Avec les contributions de Paola Arosio, Stegano Rebaudo et Valentina Za à Milan ainsi que celle de Gwénaëlle Barzic à Paris, Claude Chendjou et Juliette Rouillon pour le service français, édité par Véronique Tison)