Le gouvernement, qui doit dévoiler lundi 26 février sa stratégie pour mener la réforme de la SNCF, va-t-il prendre la même voie que pour la réforme du code du travail et utiliser les ordonnances ? En toile fond le rapport Spinetta rendu mi-février et qui a entraîné une levée de boucliers. Les quatre principales centrales de la SNCF (CFDT, CGT, Sud-Rail et UNSA) sont vent debout contre plusieurs préconisations. La CFDT a répondu à nos questions.
Olivier Cognasse
\ 18:08
Mis à jour 26 Févr. 2018
Olivier Cognasse
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Mis à jour 26 Févr. 2018
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Edouard Philippe va dévoiler lundi 26 février la stratégie qu'il va utiliser pour mener la réforme de la SNCF. Après la levée de boucliers suscitée par le rapport Spinetta, le gouvernement va-t-il faire le choix des ordonnances ?
Quelques heures après la remise de son rapport jeudi 15 février 2018, Jean-Cyril Spinetta, grand commis de l’Etat désigné par le gouvernement pour proposer des recommandations pour la modernisation du système ferroviaire, tenait une conférence de presse. L’occasion de rappeler que contrairement à certaines idées reçues, le ferroviaire n’est pas en déclin en France. "Il progresse depuis le point bas atteint dans les années 80. Il reprend des parts de marché aux autres moyens de transport et ses parts sont plus élevées que chez nos homologues européens."
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Autre idée reçue : "l’impression d’un abandon du ferroviaire. Or le concours public atteint 13,5 à 14 milliards d’euros, en intégrant la dette qui gonfle de 3 milliards chaque année, rappelle-t-il. Les 3 milliards d’euros supportés par SNCF Réseau retracent le retard pris pour la modernisation." L’âge moyen du réseau allemand est de 15 ans, mais de 30 ans en France.
Avant les années 80, on rénovait 1000 km par an. Entre 1980 et 2010, on est tombé à 500 ou 600 km. "Les lignes d’Ile-de-France, les plus fréquentées - et de loin – n’ont reçu aucun investissement pendant 20 ans, précise-t-il. La prise de conscience de ce retard n’a été faite qu’à partir de 2013." Autre point noir : la piètre qualité de service de la SNCF avec un taux de régularité autour de 90 %. Au cabinet de la ministre des Transports, Elisabeth Borne, on se félicitait que les choses soient dites clairement. Les consultations vont commencer très vite, dans quelques jours.
Lyon-Bourg-en-Bresse et Rennes-Saint-Malo en danger
Alors il propose d’accélérer les travaux de l’ordre de 400 millions d’euros par an mais en concentrant les investissements sur les lignes les plus fréquentées (90% des voyageurs sur 30% du réseau). Et par conséquent, se pose la question de la survie des petites lignes (20 allers et retours minimum par jour), même s’il affirme n’avoir demandé la fermeture d’aucune ligne.
L’évaluation du bilan socio-économique est sans doute l’occasion pour l’Etat de se désengager de certaines lignes. Les lignes concernées atteignent 13 000 km : 9000 km accueillant des voyageurs. La CFDT dénonce "une logique malthusienne. 20 allers et retour, cela fait du monde. Des lignes comme Lyon-Bourg-en-Bresse et Rennes-Saint-Malo pourraient être concernées, détaille Thomas Cavel, secrétaire national de la CFDT – Cheminots, lors d’une interview donnée à l’Usine Nouvelle. Les régions les plus riches pourront garder leur réseau et les régions pauvres enverront tout le monde sur la route." La CFDT demande que l’on fasse l’évaluation socio-économique en tenant compte du risque routier.
Pas de réduction des dessertes pour le TGV
La filialisation de Fret SNCF demande une recapitalisation importante. La dette atteint 4 milliards d’euros, malgré une dernière recapitalisation en 2005. "Cette activité a accumulé des pertes extrêmement lourdes depuis dix ans et même si elles sont en voie de réduction, les résultats restent négatifs", confirme Jean-Cyril Spinetta. Chez les syndicats, on craint une future privatisation de cette activité. "Il faut développer une politique de transfert de la route vers le rail, mais au niveau européen", demande la CFDT.
Pour les voyageurs, l’ancien patron d’Air France loue les bons résultats du TGV en 2017, grâce à la conjoncture mais également "à la bonne politique commerciale de la SNCF". En réponse à une question de l’Usine Nouvelle, il confirme ne pas "demander de réduction des dessertes. La SNCF s’est posée la question en 2014, mais n’a pas retenu cette solution. Elle a raison de poursuivre une politique de transport de masse et elle s’est développée notamment avec le low cost".
De même, il s’aligne sur le rapport de la commission Duron à propos des futures lignes LGV et rappelle que les lignes à grande vitesse n’ont pas de pertinence au-delà de trois heures de trajet. Paris-Toulouse serait légèrement au-dessus…
Bien entendu les syndicats ne sont pas opposés aux prises de positions concernant les TGV, ni sur la reprise d’une partie de la dette par l’Etat. Par contre l’opposition est virulente contre le changement de statut et l’ouverture d’une procédure de départs volontaires pendant deux ans, alors que les besoins augmentent (travaux, hausse du trafic). La CFDT reproche que l’annonce précède la réflexion et que l’affirmation d’une différence de 30% en termes de coûts ne soit pas du tout étayée.
La CFDT refuse le chantage statut vs dette
"La SNCF est capable de réaliser des gains de productivité. On le voit depuis des années et le statut n’empêche pas d’avancer", indique Thomas Cavel. Il est aussi particulièrement remonté contre la volonté faire une nouvelle loi avec la règle d’or pour SNCF Réseau. "Elle existe dans la loi de 2014 et risque de remettre en cause l’équilibre de cette réforme." Et concernant la volonté de transformer SNCF Réseau d’EPIC en SA. "C’est du dogme politique. En 1982, la SNCF était un SA et cela ne l’a pas empêché de s’endetter. Il y a surtout un risque que SNCF Réseau n’emprunte plus aux mêmes taux en quittant son statut d’entreprise publique et que cela coûte chez aux Français."
Cette dette qui empoisonne la vie de SNCF Réseau (ex-RFF) est sans doute le nerf de la guerre pour relancer l’entreprise. Car cette dette coûte 1,5 milliard d’euros par an. Et de rappeler "que proposer la reprise de la dette contre le statut des cheminots est malhonnête, s’emporte Thomas Cavel. La dette du ferroviaire n’est pas due aux cheminots, mais à la politique de l’Etat." Difficile de contester, en effet, que l’essentiel des 45 milliards d’euros de dettes de SNCF Réseau sont dus à la politique du tout-TGV.
Titulaire d’une maîtrise d’Information et Communication et d’une licence d’Histoire, Olivier a rejoint la rédaction de l’Usine Nouvelle en 2008. Chef du service Environnement – Energie – Transport – Santé – Chimie et Agro-alimentaire, pendant sept ans (2013 -2020), il a choisi en 2021 de devenir grand reporter en charge de l’environnement, des utilities, des mobilités et des industries ferroviaire et navale.
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