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Science : Guy Guyot met au point le cryostat le plus froid de l'univers
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Science : Guy Guyot met au point le cryostat le plus froid de l'univers
oui, le point le plus froid de l'Univers connu et hors laboratoire... », tempère Guy Guyot, l'artisan de cette première mondiale. En effet, courant 2008, le satellite Planck de l'Agence spatiale européenne sera largué par la fusée Ariane V pour prendre ses quartiers au point de Lagrange L2, où gravitation du Soleil et de la Terre s'équilibrent. Là, les deux instruments embarqués étudieront durant plus de quinze mois les infimes variations du "fond diffus cosmologique", ce fameux rayonnement fossile à 2,7K, qui indique la température actuelle de l'Univers, après les 13 milliards d'années de refroidissement qui ont suivi le big-bang.
Son parcours
- 56 ans
- Diplômé de l'Insa de Lyon, puis docteur ingénieur
- Entré au CEA dans la cryogénie, il se spécialise dès 1977 dans la cryogénie de l'espace à l'Institut d'astrophysique spatiale, à Orsay), dont il assume la direction technique durant onze ans. Prend la tête en 2000 du projet cryostat de l'instrument HFI équipant le satellite Planck.
Ces deux instruments sont le LFI (Low Frequencies Instrument, de conception italienne) et le HFI (High Frequencies) de l'Institut d'astrophysique spatiale (IAS), pour lequel Guy Guyot et son équipe ont conçu le cryostat. Ses capteurs seront dix fois plus sen sibles que ceux de la mission américaine WMAP (2001) et 600 fois plus que ceux de Cobe (1992). Gain dû à l'élimination du bruit thermique. Les détecteurs de Cobe se contentaient d'un « douillet » 2 K.
Les 48 bolomètres du HFI, opérant dans des bandes entre 100 et 857 GHz, exigent 100 mK ! Un record redevable au cryostat à dilution d'hélium mis au point par Guy Guyot. Ce spécialiste de la cryogénie arrive comme responsable de projet sur HFI en 2000. « J'étais directeur technique de l'IAS depuis onze ans, un peu nounou, un peu manager, un peu DRH... Ça m'a fait un bien fou de recoller à un projet d'ingénieur... Loin de la technique, on devient bête ! »
Un cocktail d'isotopes de l'hélium
Ce projet que Guy Guyot ne lâchera que six mois après le lancement, en 2009, Planck ayant rempli sa mission. Plus d'une fois, lui et son équipe ont eu « chaud » ! « On devait initialement refroidir 350 g... avant que la masse des détecteurs ne décuple ! Il a fallu reconcevoir le prototype, sans aucune certitude de réussir. » C'est Alain Benoît, du Centre de recherches sur les très basses températures, (le CRTBT à Grenoble), aujourd'hui à l'Académie des Sciences, qui a déposé les premiers brevets de la « dilution spatiale ».
Pour aller vite, on mélange dans un rapport 3/1 deux isotopes de l'hélium (le 4He et le 3He) à des températures de l'ordre de 3 ou 4 K. Il se produit alors un changement de phase qui absorbe de l'énergie et refroidit la platine d'instrumentation. A moins de 0,1 K. Simple... sur Terre ! Guy Guyot relate : « La fluidique en gravité zéro pose des problèmes inédits... on ne sait tout simplement pas où sont les fluides !
Les autres nominés
- Vincent Poinssignon, de EADS Astrium, pour le télescope du satellite GAIA.
- Thierry Stolarczyk, du CEA/Dapnia, pour le détecteur sous-marin de neutrinos Antarès.
La solution d'Alain Benoît, c'est de créer une dynamique de circulation dans des tuyaux très fins, pour entretenir la dilution. » Si l'apport du CRTBT est décisif, c'est pour autant l'IAS qui sait ce qu'est un satellite ! Et maîtrise les conditions drastiques de masse, de confinement, de vide, de tenue au lancement... et les tests en environnement spatial. « Sur Terre, une façon de "coller" aux conditions de l'apesanteur, c'est de tester en g négatif...
Le dispositif fonctionnant la tête en bas ! » Guy Guyot revient de loin : « Les problèmes sont insensés ! Limiter la conduction thermique suppose les structures les plus fines. En même temps, l'optique veut un pointage précis donc rigide. Ici, la mécanique est l'ennemie de la thermique. » Conflits levés par l'usage de matériaux spéciaux comme le niobium-titane. Cette petite merveille, fabriquée par Air liquide, est prête depuis novembre. Pour d'autres missions, Air liquide prépare un procédé en circuit fermé afin les coûteux isotopes de l'hélium ne soient plus relâchés dans l'espace.
Thierry Mahé
PARCOURIR LE DOSSIER