Sanofi et son DG condamnés en Algérie
Le groupe pharmaceutique français est au cœur d’une affaire de surfacturations de matières premières.
Le verdict est tombé, selon l'agence APS. Le groupe Sanofi Aventis a été condamné par le tribunal correctionnel de première instance de Sidi M'hamed ce 2 mai à une amende de deux milliards de dinars, soit 20,4 millions d'euros. Son directeur général Thierry Lefèbvre a pour sa part été condamné à un an de prison avec sursis. L'entreprise et son dirigeant sont en effet mêlés à une affaire de surfacturation en Algérie.
Le groupe Sanofi a exprimé "sa surprise et son incompréhension à propos du jugement oral prononcé par le tribunal d'Alger et a précisé qu'il fera appel de cette décision dans les plus brefs délais, convaincu qu'il a toujours agi en pleine conformité avec la législation algérienne", dans une déclaration transmise à l'AFP.
VOS INDICES
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202 -4.72
Janvier 2023
PVC
Base 100 en décembre 2014
172.7 -2.15
Janvier 2023
Indice de prix de production de l'industrie française pour le marché français − CPF 20.1 − Produits chimiques de base, engrais, Produits azotés, plastiques, caoutchouc synthétique
Base 100 en 2015
97.9 +0.51
Janvier 2023
Indice de prix de production de l'industrie française pour le marché français − CPF 21.20 − Préparations pharmaceutiques
Base 100 en 2015
Plusieurs mois de procédures
L’affaire remonte à août 2010, selon l’agence APS qui a révélé l’affaire le 29 avril. A cette époque, les Douanes algériennes mènent un contrôle physique de colis de Sanofi Aventis. Une mesure prise suite à la publication d’un document allemand faisant état d’une différence entre les prix à l’importation déclarés par le groupe français et ceux révélés par Winthrop Pharma Saidal, l’une de ses filiales en Algérie. Sanofi est alors suspecté de réaliser des surfacturations.
Après enquête, en début d’année, l'Inspection générale des finances (IGF) en Algérie précise que le groupe français "transférait des sommes colossales en devises vers Sanofi Winthrop Industrie en France". Le tout en procédant par la surfacturation de deux matières premières, le Glyper et l'Alphamylase, acquises auprès de cette société mère. Ces deux matières sont employées notamment dans la production de médicaments. Sept procès-verbaux de constat d’infraction à la législation des changes et des mouvements de capitaux sont alors dressés contre le groupe français.
Réquisitions lourdes
Le laboratoire français se retrouve donc le tribunal algérien le 18 avril, ainsi que son directeur général, Thierry Lefèbvre. A cette occasion, le procureur de la République étaie son argumentaire par le fait que le laboratoire Sanofi faisait de la "surfacturation pour transférer illégalement des devises".
Une solution pour Sanofi ?
Selon plusieurs sources douanières rapportées par Le Temps, Sanofi Aventis pourrait en vertu de la loi sur les infractions de change demander une transaction pour mettre fin à l’action publique. La demande doit être présentée au Comité national des transactions présidé par le ministre des Finances, qui peut consentir une transaction et imposer à Sanofi-Aventis une amende équivalente à quatre fois, au minimum, la valeur des importations objet de majoration, selon l'APS.
Il requiert alors une peine de trois ans de prison contre le directeur général, assortie d’une amende estimée à deux fois le montant de la transaction. Contre la société, en tant que personne morale, le procureur réclame le paiement d’une amende équivalente à quatre fois supérieure la valeur de l’infraction. Le montant de la fraude n’a pas été révélé, mais selon des sources proches du dossier, il pourrait atteindre 91 millions de dollars.
En réponse l’avocat de la défense, Me Kamel Maachou, requiert la relaxe du groupe et de son directeur général de Sanofi-Aventis, Thierry Lefèbvre. Il explique alors que "le médicament présenté par l’accusation n’était pas le même que le médicament importé par Sanofi-Aventis".
Tournant politique
Cette affaire a pris un tournant éminemment politique. En effet, en France, l’affaire a été suivie au plus haut niveau de l’Etat, car Thierry Lefèbvre est un cousin de Jean-Pierre Raffarin, proche conseiller du président de la République Nicolas Sarkozy. L’ancien Premier ministre a été l’envoyé personnel du président en Algérie, notamment pour négocier le projet de construction d’une usine Renault.
Selon le journal Le Temps, il aurait proposé d’abandonner les poursuites judiciaires contre le groupe et de trouver un accord amiable entre les deux parties. En vain. Le ministre des Finances Karim Djoudi aurait refusé, afin d’éviter toute interprétation politique. Le 30 avril, il renouvelait cette volonté, écartant tout recours à la transaction dans le règlement de l’affaire.
Fin décembre, le ministre de la Santé Djamel Ould Abbès avait mis en cause à l'Assemblée nationale certains importateurs d'avoir spéculé sur les prix de certains médicaments et dilapidé l'argent du peuple à travers des surfacturations estimées à 94 millions de dollars en 2011.
Un autre groupe serait alors dans le viseur d’Alger, selon le journal Le Temps : le géant britannique GlaxoSmithKline (GSK). Le siège de la société a déjà fait l’objet d’un mandat de perquisition la première semaine du mois de février dans le cadre de l'enquête. Il serait aussi accusé du délit de fuite de capitaux à travers la majoration de factures d'achat de matières premières.
"Sanofi, bien en Algérie"
Sanofi possède deux filiales en Algérie, Sanofi-Aventis Algérie et Winthrop Pharma Saidal. Il est leader dans le secteur privé sur le marché algérien avec 12% de parts de marché. En 2011, son chiffre d’affaires dans le pays a représenté 210 millions d’euros.
Dans un entretien exclusif donné au quotidien La Liberté en décembre dernier, le directeur général du groupe affirmait que Sanofi "est en Algérie depuis longtemps, nous y sommes bien, nous y sommes en confiance, et notre engagement est un engagement à long terme". Selon lui, "l’Algérie est un pays qui fonctionne très bien et j’y fonctionne avec plaisir. Après qu’il y eut des difficultés ici ou là, cela fait partie des affaires, ça fait partie de nos rôles de savoir les gérer et aider l’entreprise à les gérer".
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