«Rien ne justifie les demandes des industriels de modifier le Nutri-Score», estime son créateur Serge Hercberg
Pour Serge Hercberg, le professeur de Nutrition à l'Université Sorbonne-Paris Nord à l'origine du Nutri-score, rien ne justifie les attaques contre l'étiquetage nutritionnel qui fleurissent depuis quelques semaines.
L'Usine Nouvelle. - Producteurs de Roquefort, de produits laitiers, d'huile d'olive... Depuis plusieurs semaines, les attaques contre le Nutri-Score se multiplient. Comment les expliquez-vous ?
Serge Hercerg. - Après quatre ans de bataille, le Nutri-Score a été assez largement adopté en France. Aujourd'hui, le débat est porté à l'échelle européenne avec notamment la volonté de la Commission européenne d'un étiquetage nutritionnel harmonisé obligatoire dès la fin 2022. Ce projet a réveillé les lobbys, y compris en France, qui se sentent menacés par cette perspective. Mais rien ne justifie leurs demandes de modification.
VOS INDICES
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631 +0.96
Janvier 2023
Phosphate diammonique (DAP)
$ USD/tonne
129.2 +1.17
Décembre 2022
Indice de prix de production de l'industrie française pour le marché français − CPF 10.51 − Lait liquide et crème de lait
Base 100 en 2015
137.2 -0.44
Décembre 2022
Indice de prix de production de l'industrie française pour le marché français − CPF 10.12 − Filet d'escalope de poulet standard UVCI
Base 100 en 2015
Il faut rappeler que le Nutri-Score n'invente rien. Ce n'est pas un label, mais un outil de santé publique qui fournit aux consommateurs des données nutritionnelles pour qu'ils améliorent leurs choix. Les industriels critiquent le Nutri-Score en fonction de facteurs économiques. Mais ils oublient la littérature scientifique, qui évalue l'impact de produits trop gras, sucrés ou salés sur l'obésité, les cancers ou les crises cardiaques. Par ailleurs, il est important de rappeler que la notation Nutri-Score n'est pas équivalente à une interdiction. Elle ne veut en aucun cas dire qu'il ne faut pas consommer les aliments les moins bien classés. Mais cela permet de rappeler qu'il faut, par exemple, en consommer moins fréquemment.
Certaines filières, comme le secteur laitier, considèrent que certains nutriments ne sont pas suffisamment pris en compte dans l'algorithme actuel. Que leur répondez-vous ?
Les protéines sont déjà prises en compte dans le calcul du Nutri-Score des fromages. La formule du Nutri-Score a déjà été modifiée pour prendre en compte les spécificités des fromages. Selon la formule initiale, ils étaient tous classés en E à cause de leur apport en sel, en gras et en calories. Nous avons mis à jour l'algorithme pour qu'ils prennent en compte les protéines ingérées, notamment parce qu'elles permettent de manger du fer et du calcium, des nutriments bénéfiques pour la santé. En changeant la formule, l'objectif n'était pas de satisfaire les industriels, mais d'éviter que tous les produits ne soient dans la même catégorie. Et ainsi, de faciliter le choix du consommateur. Résultat, aujourd'hui, nous avons 10% seulement de fromages en E, la plupart en D et certains en C.
Mais les industriels déplorent que les protéines ne soient prises en compte que jusqu'à hauteur de 8 grammes...
Effectivement. C'est qu'au-delà, elles n'apportent plus rien, nutritionnellement parlant. Par ailleurs, il est important de répéter que les bonus de certains ne doivent pas faire oublier les malus. Ce n'est pas parce qu'un produit contient des protéines qu'il n'en est pas moins salé et gras.
Parmi les critiques récurrentes contre le Nutri-Score, figure la question de la portion de 100 grammes. Beaucoup de filières disent que cette portion n'est pas représentative. Cette critique vous semble-t-elle justifiée ?
Absolument pas. Ce sont les industriels qui fixent les portions et bien évidemment, ils les fixent à un seuil particulièrement bas. Quand vous voyez indiqué 30 grammes de céréales pour le petit-déjeuner, ce n'est pas réaliste. L'OMS recommande d'utiliser 100 grammes comme référence. Cela permet d'établir un dénominateur commun. L'objectif n'est pas de recommander, ou non, d'ingérer 100 grammes de tel ou tel produit, mais que cette portion puisse servir de base d'évaluation pour que le consommateur fasse sa comparaison.
«Rien ne justifie les demandes des industriels de modifier le Nutri-Score», estime son créateur Serge Hercberg
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