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Que vaut l’étude de l’Ademe contre la construction de nouveaux EPR?
Dans son étude sur l’évolution du mix électrique 2020-2060, l’Ademe arrive à la conclusion que le développement de la filière EPR ne serait pas compétitif. En revanche, atteindre 95% d’électricité renouvelable en 2060 est soutenable pour le réseau et permettrait de réduire les coûts de l’électricité pour le contribuable. Bref, elle démontre que sortir du nucléaire est souhaitable.
On ne l’y reprendra plus. Taxée de trop d’optimisme dans ses hypothèses pour ses études démontrant qu’un mix électrique 100 % renouvelable est possible en 2050, l’Ademe a cette fois pris ses précautions. "On a été attentifs aux arguments de nos adversaires", prévient Arnaud Leroy, PDG de l’Ademe.
Pour sa nouvelle étude "trajectoires d’évolution du mix électrique 2020-2060", les économistes de l’agence ont joué le conservatisme. Ils se sont basés sur le scénario "RTE haut" en termes de consommation d‘électricité jusqu’en 2040, et en ont prolongé la trajectoire. Pour la demande, ils ont repris celle prévue par la stratégie nationale bas carbone, c’est à dire entre 460 et 600 TWh d’électricité. L’électricité devrait représenter 60% du mix énergétique en 2050, contre 25% aujourd’hui.
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Base 100 en 2015
Des hypothèses solides
Côté production, pour les renouvelables (EnR), ils ont fixé une limite à 2GW par an de nouvelles capacités d’éolien terrestre et 3GW de photovoltaïque avec des coûts de production se stabilisant autour de 53€/MWh en 2050. Concernant le nucléaire, ils ont repris les données d’EDF et de l’Agence internationale de l’énergie. Ils établissent ainsi le coût du MWh de l’électricité produite par le parc historique prolongé à 42 €/MWh et pour les EPR à 85€/MWh descendant à 70 euros à partir du 4ème exemplaire. Les calculs d’équilibre production /demande ont, eux, été réalisés avec le même outil, Artemis, qu’utilisent les gestionnaires de réseau.
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Sur ces bases, que l’Ademe espère les moins critiquables possibles, ont été établies sept trajectoires qui montrent que la meilleure équation économique en termes de coût pour le contribuable est atteinte à 85% d’énergies renouvelables dans le mix électrique en 2050 et 95% en 2060. En revanche, le développement d’une filière nucléaire de nouvelle génération ne serait pas compétitif pour le système électrique français. Pourquoi ? La construction d’un EPR en 2030 nécessiterait 4 à 6 milliards de soutien public.
A plus long terme, le surcoût de développement d’une filière pour ce nouveau nucléaire, via la construction de 15 EPR - soit 24 GW de nouvelles capacité installées d’ici à 2060 qui viendraient en remplacement du parc historique arrivé en fin de vie malgré les prolongations - serait au minimum de 39 milliards d’euros pour la nation en coût actualisé à 2,5%, selon le rapport. "Le surcoût serait de 85 milliards d’euros sans actualisation", précise David Marchal, directeur adjoint productions et énergies durables à l’Ademe. Ce scénario aurait également un impact négatif pour les producteurs français en maintenant des prix bas sur le marché de gros.
Nouveau nucléaire pas compétitif
Ce surcoût mérite un décryptage. Pour ses sept scénarios, l’Ademe a calculé le coût complet de la trajectoire en tenant compte des investissements pour l’installation de nouvelles capacités de production et de stockage, les frais de maintenance, d’adaptation du réseau, etc… "Le système électrique français coûte actuellement environ 45 à 50 milliards d’euros par an", rappelle David Marchal.
Dans son scénario de référence - qui table sur 87% d’EnR en 2050 avec 70% du parc nucléaire renouvelé, sans nouveau EPR et 78 TWh d’exports nets en 2035 -, le coût moyen annuel du système électrique sur la trajectoire est de 96 €/MWh et le coût complet de 1 277 milliards d’euros.
Pour le scénario “EPR en Série", qui prévoit 73% d’EnR en 2050 et 78 TWh d’exports nets, le coût moyen annuel du système électrique sur la trajectoire est de 100 €/MWh et le coût complet de 1315 Mds d’euros. On retrouve - à 1 milliard près, sûrement dû à des arrondis - les 39 milliards de surcoûts annoncés. Un surcoût du même ordre (34 milliards d’euros sur 40 ans) est à noter dans le scénario "faible acceptabilité des EnR Terrestres".
La prolongation des réacteurs souhaitable
La trajectoire la plus économique serait celle du "prolongement nucléaire aisé". Sans construction d’autre EPR que Flamanville mais en prolongeant 30% des réacteurs à l’âge de 40 ans, puis à nouveau 30% des réacteurs restant à 50 ans, le scénario arrive à 81% d’EnR en 2050 avec 116 TWh d’exports nets en 2035, pour un coût complet moyen annuel du système électrique de 95€/MWh et un coût complet de 1274 milliards sur la période. "Le prolongement d’une partie du parc nucléaire historique, avec l’atteinte de 50% de nucléaire entre 2030 et 2035, permet une transition efficiente d’un point de vue économique et climatique", conclut le rapport, qui calcule également pour chaque scénario le bilan net des émissions de CO2.
La fermeture automatique des réacteurs à 50 ans coûterait, elle, plus cher avec 97 €/MWh de coût complet annuel, seulement 41 TWh d’exports nets en 2035 et un bilan net d’émission de plus 1,8 million de tonnes de CO2 en 2050, alors que tous les autres scénarios permettent un bilan négatif. C’est le scénario “gaz de synthèse" avec utilisation d’une part de l’électricité pour produire du gaz, qui est le plus vertueux en termes climatiques avec un bilan d’émission de -12 MtCO2. "Il y a une vraie alternative avec les gaz verts", commente Arnaud Leroy.
Une étude économique limitée
Cette étude se veut une aide à la décision politique lors du choix - reporté à 2021 voire 2022 et au-delà en en faisant un enjeu électoral - de la construction ou non d’un nouveau parc nucléaire français pour remplacer le parc historique qui fermerait naturellement autour de 2055. “C’est une invitation à regarder au-delà de 2028, l’horizon de la nouvelle PPE", explique Arnaud Leroy. Selon lui, "les choix de long terme peuvent influencer les choix de moyen terme".
On peut néanmoins regretter l’absence d’un huitième scénario "50% de nucléaire", qui prolongerait au-delà de 2035 l’équilibre prévu par la loi de 2015. Mais "cela coûterait trop cher", observe David Marchal, de l’Ademe. On aurait aimé savoir de combien, pour que l’hypothèse puisse être définitivement écartée.
Pas d'analyse sociale
L’étude démontre en revanche qu’une sortie progressive du nucléaire en faveur des renouvelables permettra de ramener le coût total du réseau de 100 €/MWh aujourd’hui à 90 €/MWh, avec un pic à 105 euros en 2030. Qu’il n’y aura plus besoin de subventionner les EnR à partir de 2035 et que, quels que soient les scénarios, la France gardera un solde d’export net d’électricité positif. De plus, grâce à une meilleure gestion des heures creuses dans la journée, l’ajout de stockage hydraulique par pompage et d’autoconsommation, le réseau est suffisamment flexible pour les absorber 95% d’EnR en 2060.
Ce que l’étude ne dit pas, et c’est assumé, c’est l’impact social des différents scénarios. Pour ce qui est de la création ou destruction d’emplois, ce sera aux filières industrielles de jouer.
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