Que contient le projet de loi polémique sur l'énergie et le climat ?
Objectifs revus sur la baisse des émissions carbone, report de la baisse de la part du nucléaire à 50%, création d'un Haut Conseil pour le climat. L'Usine Nouvelle vous résume les principales mesures contenues dans le projet de loi énergie-climat qui a fuité dans la presse le 7 février.
Mis à jour
08 février 2019
Le projet de loi énergie-climat remis par l’État au Conseil économique, social et environnemental (CESE) a fuité dans la presse jeudi 7 février. Le texte, qui devra précéder l’adoption de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), revient sur plusieurs objectifs de la France dans la baisse des émissions carbone et la réduction du nucléaire dans le mix énergétique.
Le ministère de la Transition écologique et solidaire a indiqué à Libération que le texte est “encore susceptible de bouger”. Le CESE doit rendre son avis sur le projet le 27 février, après quoi il sera soumis au Conseil d’État puis au Conseil des ministres, probablement mi-mars. L’Usine Nouvelle s’est procuré une copie du projet de loi et vous résume les points principaux.
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La division par quatre des émissions de gaz à effet de serre abandonnée ?
C’est le point le plus controversé du texte. Il prévoit de remplacer la division par quatre des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 par un autre objectif : atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. La première disposition était inscrite dans la loi de programmation fixant les orientations de la politique énergétique (Pope) depuis 2005, sous Jacques Chirac. L’objectif avait été confirmé en 2009 sous Nicolas Sarkozy puis en 2015 sous François Hollande.
Concrètement, si l’on se base sur la définition de l’Accord de Paris de la neutralité carbone, la France pourrait donc émettre autant de gaz à effets de serre qu’elle le souhaite tant que ces émissions sont compensées par les absorptions des écosystèmes (forêts, sols agricoles, zones humides, prairies...) et par certains procédés industriels (capture et stockage de carbone).
Sur son compte Twitter, François de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire, a précisé l’idée : “Notre objectif n’est plus de diviser nos émissions de gaz à effet de serre par quatre car il est maintenant bien plus ambitieux : les diviser par 8 pour atteindre zéro émissions nettes en 2050. Le gouvernement va le mettre dans la loi, c’est inédit !” Pour l’instant, cette division par huit n’apparaît pas dans le projet de loi qui a circulé dans la presse. Publié en décembre 2018, le projet de Stratégie nationale bas carbone (SNBC) parle aussi de “réduire nos émissions d’un facteur 8 environ” mais, là encore, il ne s’agit pas d’un texte de loi. Et ce projet de SNBC parle d’émissions tout court et non d’émissions nettes comme François de Rugy. Cette confusion change beaucoup de choses : les émissions nettes intègrent les compensations permises par les absorptions des écosystèmes et les procédés industriels.
Le report en 2035 de la baisse du nucléaire dans le mix électrique confirmé
La loi de la transition énergétique (LTE) de 2015 prévoyait de ramener la part du nucléaire de 75% à 50% dans le mix électrique français d’ici 2025. Dans le nouveau projet de loi énergie-climat, cet objectif est reporté à 2035. Ce n’est pas une surprise. En novembre 2017, le précédent ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot, avait déjà annoncé que l’échéance n’était pas tenable. Un report confirmé par son successeur, François de Rugy, en novembre 2018. RTE jugeait également le précédent scénario irréaliste pour une raison simple : réduire la part du nucléaire à 50% en 2025 nécessiterait de doubler les émissions carbone. Un argumentaire repris par le gouvernement dans l’exposé de ses motifs joint au projet de loi comme le cite Libération : “Réduire à 50% la part de nucléaire dès 2025 aurait nécessité de construire de nouvelles centrales gaz, en contradiction avec nos objectifs climatiques.”
L’objectif intermédiaire de réduction de la consommation énergétique finale est revu à la baisse
Le code de l’énergie prévoit de réduire la consommation énergétique finale de 50% d’ici 2050 par rapport à 2012. Un objectif intermédiaire de 20% est fixé en 2030. Le nouveau projet de loi réduit cet objectif intermédiaire à 17%. “Le niveau total d’économie d’énergie visé est par contre apparu comme n’étant pas probable au regard des leviers qui peuvent être mobilisés sur la période”, justifie le gouvernement.
Accélérer la baisse des consommations d’énergies fossile
Le projet de loi énergie-climat prévoit d’accélérer la baisse de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles. À la place d’une réduction de 30% d’ici 2030 et par rapport à 2012, celle-ci devra diminuer de 40%. Pour chaque énergie fossile, l’objectif sera toujours modulé “en fonction du facteur d'émissions de gaz à effet de serre de chacune”, lit-on toujours dans le code de l’énergie.
La création d’un Haut Conseil pour le climat
Le projet de loi comporte enfin la création d’un Haut Conseil pour le climat composé de 13 membres. Il aura pour but de rendre chaque année un rapport “sur le respect de la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre [...], la bonne mise en oeuvre des politiques et mesures pour réduire les émissions nationales de gaz à effet de serre, développer les puits de carbone, réduire l’empreinte carbone et développer l’adaptation au changement climatique”. Une mesure qui fait écho à la campagne de plusieurs ONG environnementales pour dénoncer l’inaction de l’État français face au changement climatique.
Le Haut Conseil pourra également être saisi par le gouvernement, le président de l’assemblée nationale, le président du sénat ou à sa propre initiative pour rendre un rapport sur “toute question sectorielle, de financement ou de mise en oeuvre territoriale au regard des budgets carbone et de la stratégie bas carbone”.
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