PSA, un montage qui va au-delà d'une simple injection de cash

par Gilles Guillaume

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PARIS (Reuters) - Pour apporter une solution pérenne à PSA Peugeot Citroën, une entrée de l'Etat français et du chinois Dongfeng au capital du constructeur automobile devra pallier les lacunes de l'alliance avec General Motors et ne pas faire capoter la restructuration en cours.

PSA devra aussi rassurer les investisseurs sur le moment choisi pour cette levée de fonds, trois milliards d'euros d'ici la fin de l'année selon des informations obtenues vendredi par Reuters.

La perspective d'une augmentation de capital semblait jusqu'ici plus lointaine, PSA ayant affiché à la fin du premier semestre une sécurité financière en hausse à 11,8 milliards d'euros. Des analystes voient dans cette accélération du calendrier, soit une opportunité pour le groupe de frapper fort pour assurer sa remise sur les rails, soit le signe d'une nouvelle dégradation de sa trésorerie.

"Les investisseurs avaient été rassurés en juillet de voir que le 'cash burn' n'était pas aussi grave qu'ils le redoutaient. Une augmentation de capital aussi importante, si tel est le projet, pourrait potentiellement signaler que PSA n'est pas à l'aise avec son objectif actuel de consommation de cash", commente le cabinet d'études ISI.

Fin juillet, la direction de PSA a assuré que la consommation de free cash flow serait réduite de plus de moitié cette année, à 1,5 milliard d'euros, puis encore sensiblement diminuée en 2014 avant un retour à l'équilibre. Interrogé lundi sur cet objectif, PSA a refusé de faire un commentaire, renvoyant à la publication de son chiffre d'affaires du troisième trimestre le 23 octobre.

"Il est clair que l'entreprise sent maintenant qu'il lui faut augmenter à nouveau son intensité capitalistique pour rester dans la course avec ses rivaux dont les produits -et donc les marges- s'améliorent en relation directe avec leur niveau de dépenses", commente Kristina Church, analyste automobile chez Barclays Capital.

"Avec des investissements à seulement 3% du chiffre d'affaires, Peugeot se retrouve immédiatement désavantagé par rapport à Volkswagen, qui y a consacré 7% sur le trimestre écoulé."

SAIC, TROUBLE-FÊTE ENTRE PSA ET GM

Acculé financièrement par la chute du marché automobile européen, PSA a été contraint de suspendre plusieurs projets industriels et de recherche et développement. Pour endiguer l'hémorragie de cash, qui a atteint 200 millions d'euros par mois en 2012, le groupe a réduit ses coûts et cédé des actifs, mais ne peut en rester là s'il veut trouver sa place à plus long terme dans un secteur ultraconcurrentiel.

En valeur absolue, et en ajoutant les dépenses de R&D, PSA dispose cette année d'une enveloppe d'environ trois milliards d'euros. Pendant ce temps, VW compte investir en moyenne autour de 16,7 milliards d'euros chaque année d'ici 2015.

Même s'il est doté de trois milliards d'euros supplémentaires, PSA, qui est le premier déposant français de brevets, aura du mal à concrétiser seul tous ses projets stratégiques, comme le système d'hybridation "Hybrid Air" dont il a l'exclusivité et pour lequel il cherche toujours un ou des partenaires afin de passer au stade industriel.

Un renforcement du partenariat avec Dongfeng, avide de nouvelles technologies, viendrait ainsi à point nommé, à condition que le groupe chinois comble les lacunes laissées par l'alliance nouée par PSA avec General Motors.

Celle-ci, présentée en février 2012 comme un partenariat à vocation mondiale, est restée jusqu'ici limitée à l'Europe, où les deux groupes ont mis en commun leurs achats et lancé trois programmes de développement de véhicules en commun.

La Chine et l'Inde ont été exclues du périmètre de l'alliance en raison de l'opposition du partenaire chinois de General Motors, SAIC, concurrent de Dongfeng, partenaire de longue date de PSA.

"SAIC a plus de pouvoir que GM ne le pensait", a déclaré à Reuters une source proche de PSA. "L'impossibilité de partager les technologies de General Motors déjà promises à SAIC ne s'est avérée que six à huit mois après l'annonce de l'alliance."

ACCÉLÉRER EN AMÉRIQUE LATINE AUSSI

Pour les analystes d'ISI, Dongfeng permettrait à PSA, toujours trop dépendant d'un marché européen en berne, de donner un nouveau coup d'accélérateur à l'international en s'attaquant avec son partenaire chinois à d'autres marchés émergents.

"PSA a déjà une position saine en Chine, mais ses faiblesses sont centrées sur l'Amérique latine et l'Eurasie. Tout investissement sur ces marchés serait le bienvenu", écrivent-ils dans une note.

Tout l'art, pour PSA, consistera à combler ces lacunes sans compromettre ce qui a été entrepris jusqu'ici avec GM, notamment sur le futur C3 Picasso qui doit être produit à côté du Meriva dans l'usine espagnole d'Opel, la filiale européenne de GM.

Les analystes veulent aussi croire que le nouveau montage à l'étude, qui intègre l'Etat français, n'incitera pas à abandonner pour des raisons politiques et sociales les restructurations en cours chez PSA.

"Si l'Etat entre effectivement au capital aux côtés de Dongfeng, il éloigne la perspective d'un rapprochement avec Opel, qui aurait engendré des licenciements et des fermetures d'usines", écrit Aurel BGC dans une note.

PSA s'est engagé à ne pas fermer en France d'autre site d'assemblage que celui d'Aulnay-sous-Bois en échange d'un accord de compétitivité sur trois ans, mais il entend porter à 100% le taux d'utilisation moyen de ses usines en Europe d'ici 2016.

"Peugeot a démontré jusqu'ici qu'il restait une entité viable, et du cash supplémentaire lui permettra de rester dans la course pendant un certain temps", note Kristina Church (Barclays Capital). "Mais du cash seul risque de ne pas suffire à alimenter sa croissance à plus long terme, ni à régler les problèmes structurels que sont ses surcapacités en Europe."

Avec Laurence Frost, édité par Dominique Rodriguez

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