Pour le ministre de l’Agriculture, il n'y a pas de dialogue possible avec l'agrochimie

Alors qu’il doit accompagner les agriculteurs vers un moindre usage des pesticides, le ministre Stéphane Travert préfère refuser tout contact avec l’industrie de l’agrochimie, indique-t-il à L’Usine Nouvelle. Y compris avec les entreprises du biocontrôle, pourtant présentées comme une voie d’avenir par son prédécesseur, Stéphane Le Foll.

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Pour le ministre de l’Agriculture, il n'y a pas de dialogue possible avec l'agrochimie

Alors qu’il a pu sembler isolé en se déclarant "heureux" du renouvellement du glyphosate à l’échelle européenne, contrairement à ses collègues du gouvernement, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation Stéphane Travert a désormais la délicate mission d’accompagner les agriculteurs français vers une moindre utilisation de pesticides. Et notamment les aider à se passer d’ici trois ans du glyphosate, molécule controversée mais herbicide très efficace et peu onéreux.

"Mes partenaires, ce sont les agriculteurs !"

Le ministre n’entend néanmoins ne laisser aucun doute sur sa position. Interrogé par L’Usine Nouvelle à l’occasion d’un déjeuner avec l'Association française des journalistes agricoles (Afja) sur ses attentes vis-à-vis du secteur de l’agrochimie, Stéphane Travert réplique : "J’ai passé cinq ans comme parlementaire à refuser tout rendez-vous avec tout industriel porteur de ce type de "solutions". Comme ministre, je m’applique à prendre ce même type de décisions. Mes partenaires, ce sont les agriculteurs !"

Des "contacts réguliers" du temps de Stéphane Le Foll

Le ministre a ainsi affirmé n’avoir jamais accepté, ni reçu de demande de rendez-vous des entreprises du secteur phytosanitaire depuis sa prise de fonction en juin dernier. Au grand dam du syndicat du secteur, l’Union de l’industrie de protection des plantes, qui concède avoir des difficultés à échanger avec tout le gouvernement d’Edouard Philippe. "C’est une situation qu’il va falloir clarifier, estime Eugénia Pommaret, la directrice générale de l’UIPP. Nous opérons dans un cadre réglementaire stabilisé, il y a des questions légitimes, nous participons à tous les lieux de rencontre comme les Etats Généraux de l’Alimentation." Or Stéphane Travert est le "ministre qui est concerné par les intrants agricoles, et qui représente la France dans les discussions à l’échelle européenne." Du temps de son prédécesseur, Stéphane Le Foll, "il y avait des contacts réguliers", assure-t-elle.

Ce dernier s’était en particulier illustré en faveur du biocontrôle, des alternatives naturelles et non chimiques aux pesticides pour protéger les végétaux, faisant appel aussi bien à des insectes ou micro-organismes... Des solutions développées notamment par de nombreuses PME hexagonales. "Nous avons à construire une grande industrie française du biocontrôle" déclarait ainsi il y a quatre ans Stéphane Le Foll, désireux de valoriser cette filière potentiellement créatrice d’emplois.

"Je ne suis pas le ministre de l’agrobusiness ou de l’agrochimie !"

Certes, entre temps, plusieurs de ces solutions ou entreprises ont été rachetées par des géants de l’agrochimie, comme Bayer (industriel allemand numéro un dans la vente de pesticides en France, et en cours de rachat de l’américain Monsanto) ou BASF, qui y voient des relais de croissance complémentaires, et des réponses aux attentes de la société. Ainsi, "plus de 40% des produits utilisés en agriculture biologique sont fournis par les adhérents de l’UIPP, et plus de 50% des produits de biocontrôle", indique Eugénia Pommaret. Les acteurs du biocontrôle, Stéphane Travert n’entend donc pas les recevoir non plus. "Ici on fait de la politique, nous sommes là pour donner des cadres législatifs", indique-t-il. Je ne suis pas le ministre de l’agrobusiness ou de l’agrochimie !" Le message a le mérite d’être clair.

Et pourtant, IBMA, l’association française des entreprises de produits de biocontrôle, précise à L'Usine Nouvelle: "Le 30 janvier prochain, se tiendra notre colloque sur le biocontrôle, «Une nouvelle culture », placé sous le haut patronage du Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Monsieur le Ministre Stéphane Travert nous a confirmé qu’il viendrait clôturer ce colloque, sinon l’introduire (sous réserve de son agenda)."

Les ventes de l’industrie de l’agrochimie stables en France

L’Union de l’Industrie de Protection des Plantes fêtera ses cent ans l’an prochain. En France, elle compte 22 entreprises adhérentes, représentant 5500 salariés et 95% du marché de 2,17 milliards d’euros l’an dernier, un marché stable en valeur mais qui décroit en volume. Elles investissent en moyenne 10% de leur chiffre d’affaires en R&D. Pour répondre à une défiance croissante vis-à-vis des pesticides, et notamment le manque de transparence pointé par l’affaire des "Monsanto Papers",  Bayer a récemment décidé d’améliorer l’accès aux données sur la sureté de ses produits. En espérant que d’autres entreprises du secteur lui emboitent le pas.

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