[Nucléaire] Tous les Belges recevront des pastilles d'iode, et en France ?
La Belgique est en train de mettre à jour son plan d'urgence nucléaire. Selon la dernière mouture, rapporte la RTBF, tous les belges se verront distribués des pilules d'iode. Et en France ? Le périmètre retenu pour la mise à l'abri et l'ingestion des pastilles d'iode est par exemple de 10 km autour d'un site nucléaire, un choix critiqué notamment par l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli).
Mis à jour
30 janvier 2017
Des pastilles d'iode dans chaque foyer belge ? C'est ce que pourrait bien décider le gouvernement belge dans sa dernière mouture de son plan d'urgence nucléaire,rapporte la RTBF. Actuellement, seuls les habitants des communes situées dans un rayon de 20 kilomètres autour des sites nucléaires étaient concernés. En étendant le rayon à 100 kilomètres, "cela revient, en pratique, à couvrir tout le territoire belge", a expliqué au media belge le ministères de l'intérieur.
En avril 2016, alors que monde se situe entre deux sinistres anniversaires, les cinq ans de Fukushima (11 mars) et les trente ans de Tchernobyl (26 avril), l’Association nationale des comités et commissions locales d’information (Anccli – Groupe de citoyens mobilisés autour de la sûreté nucléaire autour des centrales) publiait elle une étude sur la préparation de la France en cas d’accident nucléaire majeur.
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"Sur le papier, tout semble en ordre. Dans les faits, on est très loin du compte", assure Jean-Claude Delalonde, président de l’Anccli. En février 2014, un nouveau Plan National de réponse à un accident nucléaire a été rendu public. Mais depuis il n’a pas été décliné au niveau des Plans Particuliers d’Intervention (PPI), travail à la charge des préfets.
L’Anccli relève même des aberrations : il y a encore quelques mois, il était conseillé de s’informer des mesures de sécurité autour du centre de recherche nucléaire de Vaduc (Côte-d'Or) par minitel !
Etendre les mises à l’abri
L’étude commandée par l’Anccli à l’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’Ouest (Acro) repose sur un benchmark international des plans d’urgence. Selon cette étude, la France se situe sur certains points en retrait par rapport à d’autres pays nucléarisés. Ainsi, le dimensionnement des territoires concernés par le plan d’urgence est trop faible. En France, une évacuation est prévue dans un rayon de cinq kilomètres et une mise à l’abri avec ingestion d’iode dans un rayon de 10 kilomètres.
Athlet, le groupe de travail européen sur l'urgence nucléaire, recommande une mise à l’abri jusqu’à 100 kilomètres. L’Anccli pour sa part milite pour atteindre 80 kilomètres. Mais l’extension de ces zones d’urgences n’est pas simple. Dans un rayon de 30 kilomètres autour de Fessenheim (Bas-Rhin), on trouve 1 million d’habitants. Autour de Bugey (Ain), 1,2 million d’habitants. Selon l’Acro, c’est le principal obstacle qui empêche les pouvoirs publics d’élargir les périmètres des plans d’urgence.
Simuler les évcuations
Pour ce qui est des mesures d’exclusion, l’Accro note que les capacités d’accueil pour les populations qui seraient évacuées, ou qui quitteraient le territoire spontanément, sont "inconnues en France". Une situation moins avancée qu’un pays comme l’Inde où "les zones d’accueil, les besoins de nourritures, les couvertures et même le nombre de saris sont déjà prévus", assure David Boiley.
Se pose aussi la question du temps d’évacuation. Aux Etats-Unis, où l’évacuation est prévue sur 10 miles (environ 16 kilomètres), il y a l’obligation de réaliser des simulations numériques en prenant en compte des facteurs aggravants comme de la neige, des évènements (concerts, rencontres sportives…). Ces simulations doivent aussi prendre en compte les populations vulnérables (maisons de retraites et hôpitaux), une dimension qui a posé de fortes difficultés au Japon lors de l’accident de Fukushima, entrainant une cinquantaine de décès. Aucune simulation n’a été faite en France.
La question de l’iode
La France doit aussi gérer le cas de trois centrales nucléaires frontalières (Fessenheim avec l’Allemagne, Chooz avec la Belgique et Cattenom avec le Luxembourg). Les mesures de sécurité ne sont pas les mêmes de part et d’autre de la frontières. En Belgique, par exemple, la mise à l’abri se fait à des niveaux de radioactivité deux fois plus faible qu’en France. Il y a donc un besoin d’harmoniser les législations européennes.
Enfin, la France a peu modifié ses plans d’urgence depuis Fukushima, par rapport à ses voisins. Depuis l’accident, la Belgique a décidé de préconiser la prise d’iode à 100 kilomètres d’un site accidenté contre 10 kilomètres en France. La Suisse a porté cette préconisation à 50 kilomètres, le Luxembourg à toute sa population, ce qui correspond à environ 100 kilomètres, vu la taille réduite du pays.
L’Anccli tient à préciser que l’Hexagone est en avance sur d’autres points. "La France est le seul pays à avoir prévu un plan post-accidentel", un travail qui porte aussi sur des accidents de très grande amplitude. Autre point, "La France est aussi un des rares pays qui a institutionnalisé la transparence nucléaire à travers les comités locaux d’information", assure Claude Delalonde. Il ajoute : "Mais aujourd’hui, il y a des préoccupations et il faut les rappeler (car) l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) et les acteurs du nucléaire s’accordent pour dire qu’un accident nucléaire de grande ampleur est possible en France".
Ludovic Dupin
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