Ne pas rater le coche de la chimie verte
Les biocarburants font beaucoup parler d'eux, mais il ne s'agit pas encore de technologies matures et leur ancrage sur le marché ne se fera pas véritablement avant 2020. En revanche, l’essor des biotechnologies dans la chimie, encore appelée chimie verte, a lieu en ce moment. Des poids lourds comme Michelin, BASF, Bayer, Mitsubishi, n’ont pas vu arriver le changement et se retrouvent face à un mur un peu comparable à ce qu’a connu l’industrie pharmaceutique dans les années 1990. Ce n’est pas l’appauvrissement des pipelines et la fin de droit des brevets qui est ici en cause, mais leur forte dépendance au pétrole. La plupart des entreprises n’ont effectivement pas appris à travailler à partir de la seule autre ressource aujourd’hui viable économiquement, c’est-à-dire la biomasse.
Rachat massif de start-ups
Comme la pharma, la chimie va donc se mettre à racheter massivement des start-ups avec une maîtrise particulière des biotechnologies. La façon de faire de la R&D va également être repensée. On le voit chez Michelin qui jusqu’ici avait une démarche très protectionniste et déposait un minimum de brevets, et mise maintenant sur l’open innovation. L’idée principale derrière cela est de rattraper le retard accumulé sur le biosourcé. Cela ne suffira pas forcément, car ce qui était encore il y a quelques années des start-ups sont devenues des concurrents féroces.
Citons l’américain Amyris qui envisage un milliard de dollars de chiffre d’affaire d’ici quelques années, et se met ainsi à l’abri d’un rachat par une grande compagnie. Les Etats-Unis tiennent le haut du pavé, avec un rythme de création de sociétés soutenu depuis 7 ou 8 ans dans le domaine de la chimie verte. Il est crucial de soutenir la même politique d’innovation en Europe, qui connait actuellement ses premiers frémissements. Il y a d’ores et déjà des success stories comme le producteur d’acide succinique Bioamber qui prépare actuellement son entrée en bourse et collabore déjà avec les plus grands (Dupont, Mitsubishi, Lanxess).
Denis Lucquin,
Président de la société de capital risque Sofinnova Partners