Lhyfe avance vers un hydrogène vert produit en mer avec trois partenariats R&D
L'entreprise nantaise Lhyfe a annoncé le 30 juin s’être associée au CEA Tech, au consortium européen Marine energy alliance et à l’IRD. Trois partenariats R&D pour rendre possible le déploiement en mer de la production d’hydrogène vert, par électrolyse de l’eau en utilisant de l’électricité éolienne.
Futur producteur d’hydrogène vert, Lhyfe a annoncé le 30 juin trois partenariats de recherche et développement (R&D) avec le CEA Tech, le consortium européen Marine energy alliance (MEA) et l’Institut de recherche pour le développement (IRD). Le but est de préparer le déploiement de sa technologie en mer. L'hydrogène serait produit par électrolyse de l'eau en utilisant de l'électricité d'origine éolienne.
« Cela fait un moment que nous travaillons avec ces partenaires pour établir le programme de travail et réunir les ressources, précise Matthieu Guesné, fondateur et président directeur général de Lhyfe. Aujourd'hui, nous sommes fiers d'annoncer que les ressources financières et humaines sont en place et les travaux en cours. »
5,5 millions d'euros investis en R&D
En plus d’une part d’autofinancement et de l’aide du programme européen Interreg, les ressources en question viennent en partie du « Fond Deeptech » de Bpifrance. Lhyfe avait annoncé le 3 juin dernier avoir été sélectionnée pour en bénéficier : l’entreprise vendéenne recevra de quoi couvrir la moitié des 5,5 millions d’euros qu’elle compte investir dans la R&D pour les trois années à venir.
Lhyfe avait dévoilé en début d’année son intention de produire de l’hydrogène vert et le bouclage d’une première levée de fonds de 8 millions auprès de cinq acteurs privés et publics : Noria, le Syndicat d’Energie de Vendée (SyDEV) et sa SEM Vendée Energie, Ovive, Ouest Croissance et Océan Participations. Objectif de cette levée de fonds : industrialiser la technologie et multiplier les sites.
Viser le large
Un centre de R&D et un premier site de production de 4 000 m2 sont en cours de construction près de Bouin (Vendée). « Les premiers coups de pelleteuse ont été donnés », assure M. Guesné. Directement branché à trois turbines d'un parc éolien, un électrolyseur doit fournir 300 kilogrammes d’hydrogène par jour dès l’année prochaine.
Si l’entreprise nantaise souhaite multiplier ce type de site, elle envisage surtout d’emmener sa technologie au large en la couplant à des éoliennes en mer : un premier démonstrateur à échelle réduite au 1/100ème est prévu en 2022, suivi d’un autre de taille plus importante en mer en 2024.
Procédé, structure offshore et impact sur l’environnement
Le partenariat avec le CEA Tech vise à optimiser le procédé de production. Les travaux ne porteront pas forcément sur l’électrolyseur en lui-même, mais sur ce qui l’entoure : « L’électronique de puissance ou le traitement de gaz par exemple, précise M. Guesné. Au niveau du pilotage, nous allons apprendre à gérer l'intermittence des énergies renouvelables et développer des algorithmes. »
Avec le MEA, Lhyfe travaillera sur la structure en mer du procédé de production. M. Guesné donne l’exemple des câbles de connexion des éoliennes qui doivent supporter les mouvements de la mer : « Il y a encore énormément de challenges sur ce sujet. » Ces mouvement devront aussi être supportés par les électrolyseurs, par exemple s’ils sont sur des plateformes flottantes : « Pour atténuer le mouvement des vagues : Quel type de structure ? Quelle taille ? », explique-t-il.
Enfin, avec l’IRD le but est d’étudier l’impact du rejet d’oxygène - coproduit, avec l'hydrogène, de l’électrolyse de l'eau - dans le milieu marin. « L'idée est d'améliorer l'état des milieux là où nous produisons de l'oxygène, précise M. Guesné. Mais nous sommes très prudents sur ce sujet. Beaucoup de choses restent à valider. »
Trois défis principaux
Lors d’une journée scientifique organisée en ligne le 2 juillet par le groupe de recherche CNRS sur les énergies marines renouvelables, Guénaël Le Solliec, manager R&D au CEA Tech de Nantes, a soulevé trois défis principaux pour l'électrolyse dans un contexte offshore. Le premier est lié au facteur d’échelle : « Avec les perspectives de dimensionnement des parcs éoliens en mer, il faudrait associer des électrolyseurs avec des puissances bien supérieures à celles installées aujourd'hui, souligne-t-il. De l'ordre de 100 MW, voire plus. »
Le deuxième défi est lié aux contraintes de fonctionnement lorsque les installations ne sont pas reliées à un réseau électrique – c’est-à-dire « far-shore ». Cela a des impacts sur l'électronique de puissance, la gestion des électrons ou encore le dimensionnement du parc éolien.
Enfin, le troisième défi principal est lié à la « marinisation » des équipements, avec des contraintes physiques d'intégration, une durabilité qui peut être impactée par l’environnement marin, ou encore les contraintes logistiques associées.
Transport par bateau ou via les infrastructures gazières
« Aucun électrolyseur n'a jamais fonctionné en mer aujourd’hui, donc tout reste à faire, reconnait M. Guesné. Mais c'est dans les feuilles de route. Tous les pays qui ont investi et qui investissent dans l'éolien offshore se dirigent vers cette solution. » Il en veut pour preuve les ambitions du Danemark, des Pays-Bas, de l’Allemagne ou de l’Ecosse. Basé en mer du Nord au large des Pays-Bas, le projet pilote PosHYdon vise à installer une usine de production d'hydrogène sur la plate-forme Q13a exploitée par Neptune Energy.
Dans un rapport publié le 25 octobre 2019, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) détaillait le potentiel technique de l’éolien en mer qui pourrait alimenter la planète entière en électricité. Une partie du rapport soulignait l’intérêt de coupler éolien en mer et production d’hydrogène par électrolyse pour limiter les contraintes liées au transport d’électricité par câble jusqu’à la côte.
« Au large, le vent est très régulier et l’électricité est donc disponible et peu coûteuse, affirme M. Guesné. Et transporter de l’hydrogène, soit dans les infrastructures de gaz existantes, soit par bateau, est bien moins cher que de transporter de l’électricité par câble. » Pourvu que les infrastructures existantes soient capables d’accueillir la petite molécule d’H2 et que les navires soient prêts à abandonner le fioul lourd au profit de l’hydrogène vert.
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