Les trois challenges d’Eric Schulz, nouveau directeur commercial d’Airbus
Issu du motoriste Rolls-Royce, Eric Schulz est nommé directeur commercial du groupe Airbus. Un poste stratégique alors que l’avionneur est entré dans une période de troubles.
Après des mois de flottements, son nom est enfin connu. Le successeur du charismatique John Leahy (67 ans) au poste de directeur commercial du groupe Airbus s’appelle Eric Schulz. Exit Kiran Rao – ancien bras droit de John Leahy – un temps pressenti, exit Christian Scherer – ex Airbus devenu patron d’ATR – également cité ces dernières semaines : c’est le responsable de la branche aviation civile de Rolls-Royce qui décroche la timbale, un ingénieur français de 54 ans. Eric Schulz a débuté sa carrière en 1986 au sein d’Aérospatiale-Sogerma et n’a jamais quitté depuis le secteur aéronautique.
Si le poste de vendeur d’avions en chef d’Airbus est sans doute l’un des plus en vus dans le secteur aéronautique, Eric Schulz prendra ses fonctions en janvier 2018 au sein d’un groupe qui connaît une période difficile de son histoire. "Ces qualités et expériences font de lui le successeur idéal de John Leahy à un tournant déterminant dans l’évolution de notre entreprise", fait savoir Tom Enders, le patron de l’avionneur, dans un communiqué. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Airbus est allé chercher son nouveau directeur commercial à l’extérieur. La tâche s’annonce ardue.
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Motiver les équipes commerciales
Eric Schulz arrive en terrain miné. Les enquêtes fusent de toutes parts chez Airbus. Il y a celles menées par le parquet national financier (PNF) et le Serious fraud Office (SFO) pour des irrégularités de transactions, mais aussi celles menées en Allemagne et en Autriche pour une possible affaire de corruption dans la vente d’Eurofighter. Sans oublier un nouveau front juridique qui s’ouvre aux Etats-Unis sur de possibles inexactitudes dans les déclarations de certains intermédiaires. Courant novembre, c’est une opération de police qui est menée dans les bureaux de Suresnes (Hauts-de-Seine) dans le cadre de l'enquête sur le "Kazakhgate"…
De quoi déstabiliser des équipes commerciales dont les méthodes sont désormais épluchées. Entre les faits de corruption et la nécessité de faire intervenir des intermédiaires dans certains pays, les équipes ont longtemps évolué dans des zones grises. Le SMO (Strategy Marketing Organization), qui appuyait le travail des commerciaux, et fut dirigé un temps par Marwan Lahoud, ex directeur général délégué à la stratégie et au marketing, a été liquidé par Tom Enders. Selon un expert proche du dossier, le réseau commercial d’Airbus est bel et bien affaibli et le maillage d’intermédiaires en grande partie mis à l’arrêt. Eric Schulz va donc devoir remotiver des équipes mais aussi créer un nouveau réseau à l’international.
Maintenir un carnet de commandes au plus haut
Une nécessité pour le nouveau directeur commercial d’autant plus forte que le niveau de commandes semble se tasser pour les avionneurs après des années d’euphorie. Depuis le pic historique de 2014, année durant laquelle Airbus a engrangé plus de 1400 commandes nettes, le niveau est retombé à seulement 731 commandes durant l'année 2016. La mission d’Eric Schulz pour les années à venir : maintenir le fameux book to bill, le ratio commandes d’avions sur livraison, supérieur à un, afin de ne pas réduire le confortable matelas que représente l’actuel carnet de commandes total proche des 6700 avions à produire.
Dans le détail, le nouveau directeur commercial va devoir conjurer le sort de l’A380, qui n’a pas enregistré de commandes depuis deux ans, conduisant Airbus à réduire les cadences. Si la famille de monocouloirs A320 accuse une confortable avance de commandes sur la famille concurrente, le Boeing 737, Eric Schulz fait face à une situation plus nuancée sur le segment des long-courriers, où le 787 et le 777X mettent à mal les parts de marché d’Airbus. Eric Schulz sera vraisemblablement chargé également de relancer les ventes du CSeries de Bombardier, dont l’avionneur européen vient de s'emparer.
Faire décoller les services
C’est le talon d’Achille d’Airbus en matière commerciale : la faiblesse des ventes dans les services. Airbus sait vendre des avions mais pas encore la manière de s’en servir. Aujourd’hui, les services ne représentent que 5% du chiffre d’affaires de l’avionneur, soit environ 3 milliards d’euros. C’est deux fois moins que Boeing, sur un périmètre comparable. Airbus vise un chiffre d’affaires dans les services de 10 milliards d’euros en 2020. Un modèle économique bien éloigné de celui des motoristes : pour la plupart d’entre eux, le chiffre d’affaires est répartie à 50/50 entre les ventes de moteurs et les services.
Issu de Rolls-Royce, Eric Schulz n’est que trop conscient de l’importance des services, qui assurent des marges confortables et des revenus prévisibles. Le marché des services est équivalent à celui de la ventes d’avions, soit environ 100 milliards d’euros par an. Certes, Eric Schulz ne devient pas en tant que directeur commercial le responsable des services : les deux responsabilités sont dissociées chez Airbus. Mais il aura "à travailler en bonne intelligence", comme on l’explique en interne, avec les équipes dédiées aux services.
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