«Les techniques de management tendent à évacuer la colère», selon la philosophe Sophie Galabru
Dans « Le Visage de nos colères », la docteure en philosophie Sophie Galabru critique une forme de bienveillance hypocrite à l’œuvre dans certaines entreprises.
L'Usine Nouvelle. - Vous évoquez dans votre livre l’injonction à rester « cool » au travail. Y a-t-il une place pour la colère au bureau ?
Sophie Galabru. - Sous l’influence de la psychologie positive et de l’essor du développement personnel, les techniques de management encouragent la bienveillance et la joie au travail. À l’inverse, elles tendent à évacuer les revendications, la conflictualité, et donc la colère. Les ateliers de communication non violente en sont une illustration. Ils visent à convertir les revendications et l’énervement en patience, docilité, voire soumission. L’idée est d’invisibiliser les rapports de force au sein d’une entreprise en culpabilisant émotionnellement le salarié au lieu d’admettre qu’il y a un problème avec la direction, le manager ou un autre salarié. L’injonction à la communication non violente est d’autant plus paradoxale que le personnel RH et les managers peuvent user de leur côté d’une violence plus ou moins discrète et sournoise, par exemple en ne communiquant pas clairement ou en licenciant brutalement.
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