Les piliers stratégiques du nouveau Renault
Le constructeur français a présenté vendredi 6 octobre son plan stratégique visant à couvrir les six années à venir. Avec "Drive the future", Carlos Ghosn veut renforcer la position de l’entreprise, "mondiale, rentable, résistante et multipolaire". Au programme, tout schuss sur l’électrique, élargissement de la gamme low-cost, cap sur la Chine ou encore double action sur la réduction des coûts et l’efficience.
Après avoir "conduit le changement" ("Drive the change"), le groupe Renault veut se diriger vers un ambitieux futur. Fini la reconstruction, bonjour la consolidation. Au sommet de la Grande Arche du quartier de La Défense à Paris – tout un symbole –, le patron du constructeur tricolore, Carlos Ghosn, a présenté le contenu du nouveau plan stratégique baptisé "Drive the future", qui couvrira la période allant de 2017 à 2022, et les marques Renault, Dacia, Lada, Alpine et Samsung Motors. Objectif : faire de Renault "une entreprise rentable, résistante et multipolaire", et non plus "dépendante d’un pays, la France et d’un modèle, la Megane", comme cela a pu être le cas par le passé, a insisté Carlos Ghosn.
Sur le plan financier, l’entreprise a confirmé son ambition de dépasser les 70 milliards d'euros de chiffre d’affaires d’ici la fin du plan, accompagné d’une marge opérationnelle de 7% et d’un flux de trésorerie positif tous les ans. Côté ventes, le groupe Renault veut vendre près de 5 millions de véhicules en rythme annuel d’ici 2022. Un chiffre à mettre en perspective avec les 3,18 millions d’unités écoulées au cours de l’année 2016 par Renault, qui croît à 3,47 millions si l’on inclut le constructeur russe Avtovaz, fabricant des Lada. Cela passera par une réduction de la dépendance à l’Europe, via le "doublement des ventes" sur les autres marchés de Renault, a annoncé Carlos Ghosn. Mais pas seulement. Le point sur les principaux axes du nouveau plan stratégique du groupe Renault.
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A fond sur l’électrique
"Nous étions pionniers hier, nous sommes leaders mondiaux aujourd'hui", s’est félicité Carlos Ghosn, qui veut poursuivre la consolidation de Renault sur le "marché de masse de l’électrique abordable" et en faire "un cœur de business profitable". Pour y parvenir, le constructeur a l’intention de lancer huit modèles 100% électriques afin de couvrir l’ensemble des segments, dont cinq nouveaux véhicules et trois renouvellements. Renault compte également s’appuyer sur les bénéfices de l’Alliance avec l’entrée récente du Japonais Mitsubishi et de son "expertise en matière de technologie hybride rechargeable". De quoi permettre de lancer aussi sur le marché près de 12 voitures électrifiées d’ici la fin du plan "Drive the future". La prochaine Clio, indémodable, aura notamment sa déclinaison hybride.
Au total, Carlos Ghosn estime que le groupe sera parfaitement "à l’aise" pour fournir à terme une offre à 50% électrifiée, dont 20% totalement électrique. Avec des caractéristiques augmentées puisque l’autonomie annoncée des véhicules 100% électriques devrait grimper à 600 kilomètres en une charge en cycle théorique NEDC, l’équivalent de 400 kilomètres en conditions réelles de conduite. Le coût des packs de batteries devrait chuter de 30%. De quoi permettre notamment de proposer un véhicule à un prix équivalent à celui des véhicules équipés de moteurs à combustion à partir de 2020, et qui pourrait même être inférieur dans les années à venir, grâce aussi aux avantages fiscaux décidés par de nombreux gouvernements.
Sans surprise, le groupe Renault anticipe "une très forte poussée" des volumes "avec la Kwid électrique" en Chine, prévient Carlos Ghosn. Au total, le groupe prévoit pour l’instant "5% de véhicules électriques dans la totalité des ventes à horizon 2022". "Ce qui est sûr, c'est que ce chiffre est faux" a toutefois insisté le patron de Renault dans un sourire, mettant en avant l’évolution rapide du marché de l’électrique à travers le monde.
Sur le plan des moteurs à combustion interne en revanche, l’offre en diesel sera drastiquement réduite de 50%, tandis qu’une seule famille de moteurs sera produite à terme. Autant d’évolutions qui devraient être neutres sur le plan de l’emploi dans les sites industriels, veut convaincre Carlos Ghosn, qui écarte toute "préoccupation sociale". Il préfère mettre en avant les efforts qui devraient être réalisés sur les embauches avec "5 à 6000 salariés supplémentaires au sein du groupe" sur la durée du plan, ainsi que l’action réalisée pour flexibiliser les lignes et pouvoir, par conséquent, absorber plus facilement une éventuelle évolution rapide de la demande, comme celle du diesel attisée par le scandale des moteurs truqués de Volkswagen.
Elargissement de la gamme low cost
Les véhicules à bas coûts de Renault, commercialisés en Europe sous marque Dacia, font carton plein. 10 millions d’unités ont été vendues (en cumulé) depuis le lancement de cette gamme low cost en 2004, à moitié véhicules Renault et Dacia. Le groupe souhaite donc capitaliser sur cette véritable manne. D’ici la fin du plan, le constructeur a l’intention de faire passer les volumes de ventes de 1,2 million en 2016, à près de 2 millions en 2022.
Pour ce faire, un nouveau SUV compact sera lancé, tandis que la Logan, Sandero et Duster feront l’objet d’un renouvellement. La famille Kwid devrait s’agrandit de son côté, avec des véhicules qui seront dans un premier temps "destinés au marché indien, puis à d’autres", a annoncé Carlo Ghosn. Cette gamme low-cost sera sans surprise étendue à la Chine, au regard de son rôle dans la stratégie d’internationalisation du groupe au Losange.
Réduire la dépendance à l’Europe
L’internationalisation continue d’être un axe crucial pour Renault. Et "la priorité, c’est la Chine", martèle en la matière Carlos Ghosn. Dans le plus gros marché automobile du monde, l’entreprise veut écouler d’ici 2022 la bagatelle de 550 000 véhicules. Un sacré défi : Renault n’est entré que récemment sur ce marché, et n’a écoulé seulement 35 000 unités sur place en 2016. D’ici 2022, le nombre de véhicules à destination des particuliers commercialisés devrait monter de deux à neuf, afin de servir cette ambition de croissance.
Le constructeur multiplie les coentreprises pour se développer. Dans le cadre de son alliance à Nissan, Renault a déployé une nouvelle joint-venture avec Dongfeng pour lancer des véhicules électriques sur le marché chinois. La production devrait débuter dès 2019 avec une capacité de production de 120 000 véhicules par an, au sein de l’usine Shiyan de Dongfeng. Renault va aussi travailler sur des véhicules utilitaires avec un autre partenaire local, Brilliance.
Le fabricant travaille aussi sur son expansion en Russie, via notamment l’emblématique marque locale, Lada. A terme, les véhicules produits par Avtovaz devraient occuper une part de marché de 20% en Russie, tandis que Renault veut atteindre les 10%. "Nous disposons de produits adaptés au marché russe, ainsi que d’un niveau d’intégration local qui nous permet de nous positionner face à la reprise du marché", souligne Denis Le Vot, directeur de la région Eurasie. Le groupe veut aussi renforcer ses positions au Brésil. Il vise les "10% de parts de marché et la première place en Argentine", explique Stefan Mueller, directeur délégué à la performance. En Inde, le groupe veut devenir la première marque européenne. En Iran, dépasser les 15% de parts de marché.
Au total, le groupe attend de ses ventes qu’elles soient supérieures à 3 millions en dehors de l’Europe. En 2016, plus de 56% des véhicules commercialisés l’avaient été dans le Vieux continent. A la fin du plan, l’international représentera plus de 50% des profits opérationnels du groupe, annonce Clotilde Delbos, la directrice financière, alors qu’il ne grimpait qu’à environ 25% en 2016.
Coûts, efficience et synergies
Toujours plus de synergies avec les partenaires Nissan et Mitsubishi. A l’annonce du plan stratégique de l’Alliance, l’objectif a été fixé à 10 milliards d’euros, le double du niveau atteint en 2016. D’ici 2022, 80% des véhicules du groupe Renault seront ainsi construits sur des plates-formes communes (dites CMF) à l’ensemble des constructeurs de l’Alliance. De quoi permettre de bénéficier d’effets d’échelle. Sur la durée du plan "Drive the future", Renault compte réaliser 4,2 milliards d’euros d’économies.
Sur la partie industrielle et supply chain, l’entreprise veut "générer des gains supérieurs à 500 millions d’euros", indique Thierry Bolloré, directeur délégué à la compétitivité. Et ce, grâce par exemple aux outils issus de l’industrie 4.0 pour améliorer les performances dans les sites. En la matière, l’usine de Cléon (Seine-Maritime) fait office de pilote, puisque de nombreux robots collaboratifs ou exosquelettes y sont déployés."
Le taux d’utilisation des usines devrait passer de son côté de 96 à 120%, selon l’indice Harbour, qui mesure les capacités avec deux équipes. Le groupe croit aussi aux vertus de la collaboration, à la fois avec des grands groupes et des start-ups, pour accélérer sur toutes les problématiques qui l’occupent autour des véhicules connectés, autonomes ou encore de la mobilité, entre autres. Le rachat des activités d’Intel à Toulouse et Sofia-Antipolis vise à gonfler les effectifs dédiés au software. Au total, la capacité en recherche et développement devrait croître de 25%. Sur l’ensemble de la durée de "Drive the future", Renault consacrera 18 milliards d’euros d’investissements à la R&D.
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