Le véhicule électrique est-il vraiment écologique ?
L'étude sur l’analyse du cycle de vie du véhicule électrique commandée par l’Ademe vient d'être dévoilée. Alors que le mix énergétique français se révèle favorable à cette technologie sur le plan environnemental, le point noir reste la batterie.
Elle était très attendue. C’est pourtant en toute discrétion que l’étude de l’Ademe sur l’analyse de cycle de vie (ACV) visant à comparer les bilans environnementaux d’un véhicule électrique et d’un véhicule thermique essence et diesel a été publiée le 21 novembre. Commandée par l’agence en 2011, elle a été conduite par le cabinet de conseil en éco-innovation Gingko 21 et son homologue allemand PE international.
Un travail de titan qui a mobilisé plus de cinquante experts dont des représentants de constructeurs automobiles (PSA, Renault), d’énergéticiens (EDF, ERDF, Total, Areva, CEA…), de fabricants de batteries (Saft, Dow Kokam), des spécialistes du recyclage (Umicore…) et les associations FNE et les Amis de la Terre. Il constitue à ce jour une première en Europe. Cette ACV prend comme unité de référence un véhicule produit et utilisé en France parcourant des trajets inférieurs à 80 kilomètres par jour pendant une durée de vie de 150 000 kilomètres.
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Sa principale conclusion confirme l’intérêt du véhicule électrique du point de vue environnemental : "En France, le véhicule électrique reste favorable par rapport au véhicule thermique pour un certain nombre d’impacts", résume Hélène Teulon, la dirigeante de Gingko 21. Les émissions de gaz à effet de serre sont notamment réduites d’un facteur trois à quatre. L’impact énergétique (consommation d’énergie primaire totale) du véhicule électrique reste également meilleur que celui de l’essence mais moins bon que celui du diesel.
Le charbon pénalisant en Allemagne
De même, le véhicule électrique tend à réduire le recours aux ressources fossiles. Une situation s’expliquant par la composition du mix énergétique français, dominé par le nucléaire. En Allemagne, où le mix est dominé par le charbon, il reste plus difficile d’identifier les bénéfices environnementaux du véhicule électrique.
Le bilan environnemental du véhicule électrique est en revanche plus mitigé en matière d’acidification atmosphérique (pluies acides) et d’eutrophisation de l’eau. Le responsable principal reste la batterie, point noir du bilan environnemental du véhicule électrique. L’extraction des métaux qui entrent dans sa composition (cobalt, nickel) provoque des rejets de polluants atmosphériques (SO2). Autre point défavorable au véhicule électrique français : la radioactivité liée à l’électricité nucléaire. "Comme il n’existe pour l’instant pas d’indicateur environnemental suffisamment robuste associé aux émissions et déchets radioactifs, ces impacts ont été traités mais n’apparaissent pas dans la synthèse de l’étude", poursuit Hélène Teulon.
Rattrapage à l’usage
Par ailleurs, la phase de production d’un véhicule électrique a un potentiel de changement climatique supérieur à celle d’un véhicule thermique. C’est à l’usage que le véhicule électrique se "rattrape". En France, sa fabrication compte pour 69% de l’effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie, contre 15% pour le véhicule thermique. La production de la batterie représente à elle seule 35% de la contribution totale au changement climatique ! Conclusion : le véhicule électrique, pour être vraiment écologique, doit être utilisé de manière intensive et non pas comme une voiture "d’appoint".
L’étude, qui porte à la fois sur 2012 et 2020, conclut également que la plupart des interprétations faites pour 2012 sont valables pour 2020. Elle prévoit qu’une amélioration des technologies de batteries mais aussi le recours aux énergies renouvelables permettra d’améliorer encore la performance du véhicule électrique. Ainsi, en 2020, l’amélioration des batteries lithium-ion et l’extension de la technologie fer-phosphate à la moitié du parc permettraient de réduire les impacts de 20 à 40%.
Enfin, une étude complémentaire portant sur les matières critiques a été réalisée. La production de batteries et de pots catalytiques nécessite en effet d’utiliser Antimoine, Indium, Béryllium, Magnésium, Cobalt, Gallium ou encore des terres rares.
En évaluant les volumes de matières critiques utilisées, la taille de leurs ressources et en estimant que 110 000 à 638 000 véhicules électriques seront produits en Europe en 2020, l’étude conclut que "le développement du véhicule électrique en Europe à l’horizon 2020 ne constitue pas une menace pour l’approvisionnement des matériaux critiques identifiés dans l’étude". A une exception : le cobalt, dont 7% de la production annuelle serait consommée par le véhicule électrique. D’où la nécessité de développer son recyclage.
Camille Chandès
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