Le patron du Gifas "choqué" par la passivité de l’Europe face à l'activisme des Etats-Unis
Si la filière aéronautique française se porte bien, le contexte international inquiète les industriels. En particulier concernant l’activisme des Etats-Unis qui fait encore défaut aux pays européens.
A première vue, l’horizon semble dégagé. Un chiffre d’affaires de 64 milliards d’euros (+6%) dont 44 milliards d’euros à l’export, un solde excédentaire de 17 milliards d’euros, des commandes à 68,2 milliards d’euros (-5%), pas moins de 12 000 recrutements : en 2017, la filière aéronautique française est en pleine forme, comme l’a résumé jeudi 12 avril le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) lors d’une conférence de presse organisée à Paris. Une bonne santé qui s’explique surtout par les succès commerciaux d’Airbus – le civil représente 76% des ventes de la filière – et les livraisons croissantes à l’export du Rafale de Dassault Aviation.
Aux anges, les dirigeants de la filière ? Pas vraiment : la multiplication des incertitudes liées au contexte international inquiète les industriels, et en premier lieu l’attitude des Etats-Unis. D’autant que les pays européens peinent à faire front commun. "La pseudo guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine avec des mesures protectionnistes, qui peuvent naître de part et d’autre, est de nature à nous inquiéter", a reconnu Eric Trappier, président du Gifas et patron de Dassault Aviation.
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Un appel à la mobilisation européenne
Et le dirigeant de pointer du doigt le coup de pouce fiscale des Etats-Unis à leurs industries : "la réforme fiscale américaine soutient fortement l’industrie, avec notamment l’impôt sur les sociétés qui est passé de 35% à 21% de manière immédiate". Une baisse également programmée en France dont il se félicite pour la compétitivité des industriels. Mais les craintes du GIFAS dépassent le seul cadre de la fiscalité. L’extension du champ du CFIUS, dispositif américain qui permet de contrôler les investissements étrangers au sein des sociétés américaines, est jugé comme une mesure "indirectement protectionniste" dans la mesure où son domaine d’application est étendu.
Des conséquences directes liées à l’arrivée de Donald Trump au pouvoir ? "Les Etats-Unis ont toujours eu une politique agressive en termes d’exportation, ça ne date pas de Donald Trump, juge Eric Trappier. L’Amérique défend l’Amérique, et ce n’est pas choquant. L’Amérique soutient Boeing, il n’y pas de doute, mais aussi Gulfstream […] ainsi que les fabricants d’hélicoptères et d’avions de combat". Et de préciser : "ce qui est nouveau, c’est que Donald Trump le dit et il le fait". Un protectionnisme soutenu, qui plus est, par la baisse du dollar. "Cette situation ne me choque pas, continue Eric Trappier. Ce qui me choque, c’est que l’Europe ne fasse pas la même chose". Le patron du Gifas appelle à ce que l’Europe se mobilise pour des projets européens.
Un début de prise de conscience à Bruxelles
"Il faut une réciprocité dans nos relations, ajoute-t-il en aparté de la conférence de presse. Il ne faut pas être naïf et il faut surtout que la mobilisation européenne soit forte". Raison pour laquelle il se réjouit de la création du fonds européen de la défense, annoncé en 2017. "Je sens qu’à Bruxelles, qu’au Parlement européen et qu’à la commission européenne, il y a une prise de conscience forte", estime Eric Trappier.
Les pays européens seront-ils capables de s’allier dans des projets communs, en particulier dans la défense et le spatial ? Il y a encore du chemin à parcourir alors que le projet franco-britannique de futur drone de combat semble au point mort – victime collatérale du Brexit, que la coopération avec l’Allemagne sur le système de l’aviation de combat du futur n’en est qu’à ses premiers pas. L’Europe est également à la peine sur Ariane 6 : le PDG d’ArianeGroup a récemment déploré l’attentisme des états européens à passer les premières commandes.
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