La Suisse inaugure le plus long tunnel ferroviaire du monde et augmente l’écotaxe
Après 17 ans de travaux, la Suisse inaugure le nouveau tunnel ferroviaire du Saint-Gothard. Avec ses 57 kilomètres, c’est le plus long du monde. Il se situe sur le corridor Rotterdam-Gênes et permettra d’ici la fin de l’année un transport plus rapide des marchandises et des voyageurs entre le nord et le sud de l'Europe.
Le nouveau tunnel traversant le Saint-Gothard inauguré mercredi 1er juin 2016 concentre les superlatifs : le plus long tunnel ferroviaire du monde avec 57 kilomètres et le plus profond du monde avec jusqu'à 2 300 mètres de masse rocheuse au-dessus de lui. Ce tunnel, qui entrera en service le 11 décembre, vient compléter le tunnel existant long de 15 kilomètres construit au XIXe siècle, entre 1872 et 1881, et appelé "tunnel de faîte" puisqu’il se situe entre 1 106 et 1 142 mètres d'altitude. On parle ainsi de "tunnel de base" pour le nouvel ouvrage car il se situe à une altitude beaucoup plus basse (550 mètres). À l’instar du tunnel sous la Manche, il est constitué de deux tubes parallèles à simple voie reliés par des galeries transversales.
Enfin, dernière prouesse et non des moindres, soulignée par la commissaire européenne chargée des Transports Violeta Bulc dans une interview au journal suisse Le Temps, le délai du chantier (17 ans) a été respecté pour un budget de 12,2 milliards de francs suisses, soit 10,9 milliards d'euros, entièrement payés par la Suisse. La vitesse moyenne sera pour le fret de 160 kilomètres/heure et pour les voyageurs de 250 kilomètres/heure.
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Plus de 300 trains pourront traverser chaque jour ce tunnel ferroviaire sous les Alpes. Les 20 minutes de traversée permettront de relier la commune d'Erstfeld au nord à celle de Bodio (canton du Tessin) au sud. Du fait de la position géographique centrale de la Suisse, il rapprochera la Mer du Nord de la mer Adriatique. Le nouveau tunnel se situe sur l’axe Rotterdam-Anvers-Gênes, sur les grandes routes de trafic de marchandises entre le nord de l’Europe et l’Italie.
On estime que chaque anneée, plus d’un million de camions traversent les Alpes suisses. Pour augmenter significativement le transport combiné, à savoir l’embarquement des camions sur les trains, et la capacité du rail, la Suisse construit la Nouvelle ligne ferroviaire au travers les Alpes (NLFA), qui comprend le tunnel du Saint-Gothard, mais aussi celui du Loetschberg-Simplon (ouvert en 2007) et du Ceneri (prévu pour 2020).
Le principe pollueur-payeur appliqué à la lettre
Mais ce n’est pas tout. En 2001, lassée d’être traversée par les camions de marchandises européens, la Confédération helvétique a instauré… l’écotaxe, appelée ici redevance sur le trafic des poids lourds liée aux prestations (RPLP). Les poids lourds de plus de 3,5 tonnes doivent donc se munir d’un boîtier enregistreur de kilomètres, repéré par des portiques autoroutiers, et passent à la caisse au niveau des services douaniers.
Le principe pollueur-payeur est ici appliqué à la lettre et l’Office fédéral des transports (OFT) souligne un net recul du trafic routier de marchandises entre 2000 et 2014 : le nombre de camions sur les axes de transit a diminué de 30 %. Cette écotaxe rapporte près de 1,5 milliard de francs suisse (1,2 milliard d’euros) à l’État fédéral qui en distribue un tiers aux cantons pour l’aménagement et l’entretien du réseau routier. Les trois tunnels de la NLFA sont financés à 60 % par cette redevance, ainsi que par la taxe sur les carburants (10 %) et la TVA (30 %).
En décembre, le Conseil fédéral a décidé d'augmenter la RPLP début 2017 pour encourager le transfert du transport de marchandises de la route au rail. Dès 2017, les camions des catégories EURO III, IV et V seront soumis à des taux de redevance plus élevés et ceux classés EURO VI n'auront plus droit à un rabais. La RPLP passera de 276 à 298 francs (moyenne pondérée) pour le passage d'un camion ou d'un semi-remorque en transit à travers la Suisse. La Confédération a informé de cette décision en décembre le Comité mixte Suisse-Union européenne (UE) sur les transports terrestres qui se prononcera courant juin.
Paradoxalement, à côté de la volonté affichée de passer de la route au rail, le 28 février, les Suisses ont dit oui à 57 % à la construction d'un quatrième tunnel, réservé aux véhicules, sous le massif alpin du Saint-Gothard. Ce projet du gouvernement est contesté par une partie de la population.
Dorothée Thénot
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