La stratégie du gouvernement pour rééquilibrer les relations commerciales franco-chinoises
Pour rééquilibrer les échanges avec la Chine, la France veut pousser les partenariats avec des entreprises chinoises mais aussi encourager les entreprises françaises à travailler ensemble. Ministres, représentants spéciaux et entreprises sont mis à contribution pour développer leur relationnel avec les autorités.
La Chine l’a revigoré. "Quand vous venez ici, vous n’avez pas l’impression que la France est un petit pays. Faites un tour en Chine, cela fait du bien", confie Jean-Marc Ayrault aux journalistes, dans un hôtel de Canton, avant de critiquer le "France bashing ".
Le Premier ministre y a achevé, le 8 décembre, son périple de quatre jours à travers l’Empire du milieu après s’être rendu à Pékin puis Wuhan, dans la province de Hubei. Jean-Marc Ayrault est désormais devenu intarissable sur le pays et les enjeux du 3ème plénum du parti communiste chinois. A Pékin, où il a été reçu par le président Xi Jinping "un peu plus longtemps que prévu", il a griffonné deux pages de notes pendant son entretien. Les dirigeants prévoient de doubler le PIB d’ici 2025 ou de doubler le niveau de vie. "Les dirigeants chinois ont une vraie stratégie cohérente, tant sur la question du développement durable que sur la dimension sociale", analyse encore Jean-Marc Ayrault visiblement séduit.
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Jouer collectif
Avant la visite du Président chinois à Paris au printemps prochain, Jean-Marc Ayrault n’est pas venu signer des contrats mais resserrer les liens avec la Chine. Il en a profité pour détailler sa méthode pour "rééquilibrer par le haut" les échanges commerciaux qui accusent un déficit de 27 milliards d’euros de déficit. Pour le chef du gouvernement, il s’agit de renforcer les partenariats avec la Chine mais aussi les coopérations entre entreprises. "Pour conquérir de nouveaux marchés, il faut passer des accords. Mais c’est ce qui permet de garder nos groupes industriels", plaide Jean-Marc Ayrault qui a visité l’une des trois usines automobiles de DPCA, la coentreprise détenue par PSA et Dongfeng à Wuhan. Seule nuance, "les alliances doivent être équilibrées pour préserver les intérêts de chacun".
Jean-Marc Ayrault a aussi exhorté les entreprises françaises à jouer plus collectif. "C’est l’équipe de France qui doit se présenter, pas des équipes séparées", défend le chef du gouvernement. Sur le marché chinois, le mouvement est enclenché. A Wuhan, dans la province de Hubei, la maire de Lille, Martine Aubry, qui est aussi la représentante spéciale du quai d’Orsay pour la Chine a réuni une trentaine d’entreprises pour présenter ensemble leur savoir-faire pour le projet de ville durable en cours d’élaboration par la municipalité.
Objectif : "proposer une offre globale, de la conception au transport urbain, au traitement de l’eau ou au logement durable", détaille la maire de Lille. Même si le projet de construction de la ville durable de Wuhan n’a pas encore de calendrier - un terrain de 150 km2 est pressenti -, les entreprises françaises applaudissent sur la méthode. "C’est une approche nouvelle qui n’a jamais été tentée", estime Armand Albergel, le DG de la PME Aria technologie, qui sort un peu dubitatif de la présentation par la mairie de Wuhan de ses développements urbains à venir.
Attirer les investisseurs chinois
Le groupe informel d’une trentaine d’entreprises s’est déjà réuni à Paris et à Wuhan. "Le monde entier fait comme cela, il n’y a pas d’autres moyens de réussir. Mais cela reste compliqué Les entreprises françaises ont plutôt tendance à vendre leur marque mais à oublier de vendre la marque France", remarque Laurent Malet, le directeur d’Egis Chine qui fait partie de la trentaine d’entreprises engagées sur la ville durable de Wuhan. Mais faire travailler ensemble Veolia, Keolis, Alstom ou Suez, entre autres, n’est pas forcément aisé. "Entre nous, le gouvernement a intérêt à maintenir la pression pour que l’on s’entende", prédit un industriel. Mais pour lui, l’avantage de la démarche est ailleurs. "L’important est que ce groupe soit piloté par un politique, en l’occurrence Martine Aubry, qui vient fréquemment. Ici, le Guanxi * est primordial et ce sont les hauts dirigeants locaux qui décideront ou non de ce projet ", positive-t-il. Une démarche qui pourrait être reproduite dans d’autres domaines.
Dernier volet du rééquilibrage, le chef du gouvernement espère faire venir les investisseurs chinois en France. C’est à Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif qu’a été confiée cette tâche. Alors que le Premier ministre était de retour à Paris, Arnaud Montebourg a poursuivi sa visite à Hong Kong pour y rencontrer des investisseurs. "Je vais voir les tycoons. Il ne me reste plus que trois cartes de visites", regrette le ministre du Redressement productif.
Solène Davesne
*Guanxi : le réseau relationnel
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