"La SNCF veut retarder le procès de l'accident de Brétigny pour épargner les dirigeants actuels"

La presse relaye largement, jeudi 3 mars, des informations selon lesquelles la SNCF aurait envoyé un courrier au juge d'instruction dans le cadre de la catastrophe de Brétigny survenue en juillet 2013. L'entreprise ferroviaire pointerait du doigt un "raisonnement incomplet" dans le dernier rapport judiciaire et invoquerait "une anomalie métallurgique". Pour Gérard Chemla, avocat des victimes de l’accident de Brétigny, la SNCF a baissé le masque : "Elle s'abrite derrière un rapport de visite dont il est clairement établi qu'il s'agit d'un faux."

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L'Usine Nouvelle .- Que pensez-vous des explications avancées par la SNCF dans le courrier qu'elle aurait envoyé au juge d'instruction ? Pourquoi soulever ces nouvelles hypothèses alors qu'un consensus semblait se dégager autour d'un défaut de maintenance sur les rails ?

Gérard Chemla .- Je n'ai pas lu le courrier, seulement les informations relayées par la presse. Pour moi, la SNCF était jusque-là dans une posture où elle faisait croire qu'elle assumerait ses responsabilités et qu'elle ne ferait pas durer la procédure pénale à l'infini. La SNCF, en la personne de son président, avait assumé le défaut de maintenance. Elle n'a d'ailleurs pas contesté le rapport des experts qui a été déposé il y a près d'un an. Elle s'était contentée de demander un complément d'expertise. Aujourd'hui, ce document de contestation relève d'une autre forme de communication. Ça y est, la SNCF a baissé le masque et a décidé de faire durer la procédure pour éviter qu'un procès ait lieu rapidement… Et faire durer la procédure sept ou huit ans, c'est épargner les dirigeants actuels.

Il y quelques jours, Jacques Rapoport, le président de SNCF Réseau a démissionné soudainement. Est-ce lié selon vous ?

Il s'est aperçu qu'il serait à la retraite dans un an. C'est une explication très étonnante. Surtout quand on sait que depuis six semaines, la SNCF est pilonnée par des informations qui sortent d'un peu partout sur une attitude aberrante dans le cadre du dossier pénal. Elles font apparaitre une attitude de mensonge organisé.

"L'agent SNCF censé avoir produit ce rapport de visite en 2012 ne travaillait pas ce jour-là"

 

L'anomalie métallurgique évoquée est-elle probable ?

Aujourd'hui, on est dans le contre-feu. La SNCF vient inventer l'idée d'un problème dans le métal qui est complètement incohérente. Elle s'abrite derrière un pseudo rapport de visite qui aurait été fait par le service de maintenance de la SNCF en 2012. Or il est clairement acquis qu'il s'agit d'un faux. Une fissure est décelée en 2008 sur une pièce de métal, elle fait 10 millimètres. En 2012, dans le rapport de surveillance, elle est passée de 10 à 20 millimètres. Mais le problème, c'est que cette fissure en 2008 n'avait pas été identifiée au bon endroit sur la pièce de métal. Donc quand on nous dit qu'elle est passée à 20 millimètres, c'est impossible puisqu'à cet endroit-là il n'y a aucune fissure. Et l'agent SNCF qui est censé avoir fait ce rapport ne travaillait pas le jour où le rapport de visite a été effectué. C'est dommage quand même ! La pièce de voie en question était, jusqu'en 2006, changée tous les deux ans et demi tellement elle se dégradait. En 2006 et 2013, elle n'a jamais été renouvelée. Donc, nous dire que c'est une rupture soudaine d'une pièce alors que normalement elle a une durée de vie à cet endroit-là de moins de trois ans, c'est se moquer du monde !

Propos recueillis par Astrid Gouzik

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