La guerre de la salade de fruits reprend
La bataille fait rage sur le marché hexagonal de la salade de fruits. L'entreprise polonaise Fructofresh vient d'assigner en justice sa principale concurrente, la PME française Deli, pour concurrence déloyale.
L'ambiance sur le marché de la salade de fruits n'est définitivement pas aussi jolie que Bourvil le chantait. Depuis 2017, la société polonaise Fructofresh et la PME française Deli se lancent une guerre sans merci autour de la question des "dates limites de consommation". Alors que la situation semblait s'être apaisée ces derniers mois, le Polonais vient de repartir à l'attaque en déposant, le 2 janvier 2019, une plainte au civil contre l'entreprise française pour concurrence déloyale.
Rappel des faits: la bataille de la DLC
Ce dépôt de plainte est l'ultime épisode d'une saga judiciaire qui oppose les deux entreprises, principales actrices du secteur en France. Début 2017, Deli, leader français du marché accuse l'entreprise polonaise d'utiliser du méthanol pour augmenter les dates de consommations de ses produits et arriver à une DLC de 14 jours alors que l'ensemble des concurrents peine à dépasser les 10 jours.
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Ces accusations s'appuient notamment sur les déclarations d'un ancien salarié de Fructofresh qui confirme que l'employeur polonais a recours au Velcorin (E242) dans ses préparations alors que la législation européenne interdit l'utilisation des additifs dans les salades de fruits. Une accusation que Fructofresh nie en bloc. L'entreprise polonaise affirme que le taux de méthanol contenu dans ses produits provient des fruits eux-mêmes.
L'affaire portée devant la Cour d'appel de Paris, la justice donne raison à Deli en juin 2017, même si le tribunal de commerce de Créteil rejette la demande d'interdiction des ventes de salades Fructofresh en France.
2 millions d'euros de pertes en 2 ans pour Fructofresh
Lâchée par ses principaux clients sur le marché français, Fructofresh qui s'était hissée à la 3e place du marché français est depuis confrontée à la crise: "la perte en termes de marges pour notre entreprise a été de plus de 800 000 euros en 2017 et de 1,5 million d'euros en 2018", estime aujourd'hui Cezary Zwoinski, son PDG. Le dirigeant considère que les pertes s'étendront encore jusqu'en 2021 et pourraient atteindre 5 millions d'euros pour son entreprise, mettant en péril la survie de la structure.
C'est justement pour compenser ces pertes que Fructofresh assigne, aujourd'hui, devant les tribunaux civils, son concurrent Deli pour concurrence déloyale.
Nouvelle plainte au civil
Photographies prises par un détective privé à l'appui, enregistrement de conversations sur les réseaux sociaux... l'entreprise polonaise veut prouver que son ancien salarié, aujourd'hui employé par la filiale marocaine de Deli, a élaboré ses accusations à la demande de son nouvel employeur. "Peu de temps après avoir été embauché par Deli, ce salarié a établi, à la demande de sa nouvelle entreprise, une attestation portant sur les pratiques de Fructofresh" explique Cezary Zwoinski. Selon l'entreprise polonaise, l'ex-salarié aurait également tenté de subordonner d'autres employés de Fructofresh à aller dans le même sens que lui.
Cezary Zwoinski accuse son concurrent français d'avoir utilisé ce faux témoignage pour jeter le discrédit sur son entreprise auprès de ses partenaires commerciaux, notamment Pomona, son plus grand distributeur en France avec lequel il réalisait un chiffre d'affaires d'un million d'euros par an. "Il est évident que Deli a voulu mettre à la connaissance des plus importants partenaires commerciaux de Fructofresh en France des informations mensongères et inexactes de nature à jeter le discrédit et à détruire la réputation de Fructofresh sur ce marché" explique le dirigeant polonais.
"Tentative désespérée" selon Deli
Du côté de Deli, on accueille la nouvelle assignation avec lassitude : "Il s'agit d'une énième tentative désespérée, d'une opération de communication pour ne pas avoir à répondre au fond du problème" explique maître Noel, l'avocat de Deli, rappelant que Fructofresh ne s'est jamais expliqué sur l'importation d'1,5 tonne de Velcorin en 3 ans. "Ils créent des écrans de fumée pour ne pas avoir à répondre de leur fraude", ajoute l'avocat.
Si Deli explique faire confiance à la justice pour lui donner raison, l'entreprise française craint que ce nouvel épisode n'impacte à nouveau son image. "Dans un univers aussi secret que celui de l'agroalimentaire, ce type de procédure est toujours néfaste. Pour nous, le mal est fait" déplore maître Noel.
Au tribunal de Pairs, Fructofresh réclame 5 millions d'euros pour "réparations du préjudice" à son concurrent hexagonal.
Reste à savoir si la justice française sera, cette fois, sensible aux éléments avancés par l'entreprise polonaise. Les premières audiences sont attendues au cours du premier semestre 2019.
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