La deeptech Pasqal signe avec BMW pour appliquer le calcul quantique au formage des métaux
La deeptech française Pasqal a annoncé le 11 mai un partenariat avec BMW pour mettre son calculateur quantique au service de la simulation numérique du comportement mécanique de pièces métalliques. La start-up mettra en œuvre un algorithme de la néerlandaise Qu&Co, achetée par Pasqal en janvier et qui avait remporté un défi du BMW Quantum Computer Challenge en décembre 2021.
On n’arrête plus Pasqal. Deux mois après avoir lancé son processeur quantique à base d’atomes froids sur Azure Quantum, l’offre de cloud quantique de Microsoft, et au lendemain d’une annonce similaire avec le français OVHcloud (qu’Industrie & Technologies évoquait en exclusivité en mars), la start-up française se lance dans un nouveau partenariat, avec BMW.
L’objectif : exploiter le calcul quantique pour améliorer le formage des métaux qui constituent les pièces automobiles, c’est-à-dire « tester la résistance aux déformations, et notamment au pliage », commence Benno Broer, cofondateur de Qu&Co, une start-up néerlandaise de software quantique, qui après son rachat par Pasqal en janvier 2022, est passé directeur commercial de la start-up française.
« Le but ultime du fabricant est de réaliser le plus possibles de tests en simulation afin de réduire les tests physiques – c’est-à-dire moins casser de pièces et de voitures », poursuit-il. Or, « les méthodes informatiques classiques actuelles sont incapables de faire face à la complexité de la simulation d'un véhicule complet avec la précision souhaitée », complète le communiqué. « De telles simulations aideront aussi BMW Group à créer des pièces plus légères, ce qui rendra les voitures plus économes en carburant », est-il également indiqué.
Cette collaboration est le fruit de la victoire par Qu&Co dans l’un des quatre cas d’usage soumis aux acteurs du calcul quantique lors du BMW Quantum Computing Challenge, dont les résultats ont été communiqués en décembre 2021. « Dans notre catégorie, entre 5 et 10 candidats ont présenté une solution pour résoudre le pliage du métal, note Benno Broer. Fait intéressant, nous avons compris que beaucoup d'entre eux utilisaient en fait un algorithme développé par Qu&Co et l’université d’Exeter, au Royaume-Uni, et dont Pasqal est propriétaire. Heureusement, BMW a préféré travailler avec l'original. »
Une version quantique du physics-informed machine learning (PIML)
Cet algorithme s’inspire du physics-informed machine learning (PIML), un type de réseaux de neurones « qui a émergé dans les années 2015-2016 » et « utilisé pour résoudre des équations différentielles complexes ». Un problème mathématique « que l’on retrouve dans un nombre incalculable de cas d’usage, comme la météorologie, mais aussi dans tous les problèmes de simulation multi-physiques, dans le formage du métal, la dynamique des fluide, le transfert de chaleur, les champs électriques... », énumère Benno Broer.
« La version quantique de cet algorithme permet une meilleure précision des résultats, ce qui est très difficile à obtenir pour ces problèmes complexes, insiste le directeur commercial. Nous l’avons déjà testé sur plusieurs cas d’usage industriels, mais pas encore sur le formage du métal. »
Qu&Co et Pasqal ne sont pas les seuls à tester un algorithme quantique pour ce type de problèmes. « Différents acteurs ont proposé des méthodes pour résoudre un jeu d’équations différentielles. Toutes exigent un hardware tolérant aux erreurs – ce qui n’existera pas avant cinq à dix ans au moins. Sauf une, celle développée par l’université d’Oxford, mais, après l’avoir testée, nous pensons qu’elle ne résiste pas à la mise à l’échelle. Reste la nôtre. »
Se passer des portes à deux qubits
Maintenant, alors que les équipes de Qu&Co et de Pasqal ont fusionné, il est temps de passer de la théorie à la pratique. « Depuis deux mois, nous nous attelons à configurer le processeur quantique de Pasqal pour qu’il soit "aligné" avec ce cas d’usage et l’exploitation de notre algorithme », développe Benno Broer. L’ex-PDG de Qu&CO est particulièrement fier d’avoir trouvé « un moyen d’intriquer les bits quantiques (qubits) en se passant de porte à deux qubits, très difficiles à implémenter avec le temps de cohérence que nous permet l’état de l’art ».
Le hardware de Pasqal calcule selon un mode dit analogique : Le système d’atomes froids - les qubits – est placé dans une configuration initiale correspondant au problème donné puis on le laisse converger vers son état d’énergie minimum, ce qui donne la solution au problème. « Nous avons montré que nous n’avions besoin que de portes à un qubit pour réussir à intriquer nos qubits, une étape nécessaire pour améliorer le résultat de notre expérience ».
Premiers tests encourageants
D’après les premiers tests effectués avec l’équipe quantique de BMW, Pasqal revendique des résultats « 30 à 50 supérieurs à ce que l’on obtient avec un autre hardware quantique, pour une méthode bien plus résistante aux bruits », s’enthousiasme l’ingénieur. Des performances qui font dire à Georges-Olivier Reymond, PDG de Pasqal que « Pasqal offre actuellement la seule méthode sur le marché pour résoudre ces types d'équations différentielles avec la technologie quantique, qui sont essentielles pour exécuter des simulations efficaces et précises », indique le communiqué.
Ce projet « porte à l’échelle macro » une collaboration entre Pasqal et BMW qui remonte à 2019, « mais qui, jusqu’à maintenant, ne concernait que des expérimentations à l’échelle atomique », précise Benno Broer. Les deux partenaires ont convenu d’une première phase exploratoire de six mois, à l’issue de laquelle ils évalueront la direction que doit prendre le projet. « Mais je ne vois pas cette collaboration s’arrêter de sitôt », assure le directeur commercial.
Quant à l’éventuel résultat, « s’il est satisfaisant, nous devrions proposer notre solver quantique comme l’un des outils possibles dans des plates-formes classiques, à l’image de notre plate-forme de simulation chimique Quantum Back-End Chemistry (QUBEC), qui a été intégrée à la solution de Schrödinger, leader parmi les éditeurs de logiciels de simulation chimique », détaille Benno Broer, avant de conclure : « Et nous sommes confiants dans le fait que nous pourrons atteindre l’avantage quantique avec ce type de cas d’ici peu, j’espère deux à trois ans. »
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