La Chine poursuit son offensive dans les semiconducteurs mais sur la pointe des pieds

Pour la deuxième année consécutive, les Chinois sont à l’offensive dans les semiconducteurs. Mais face à leur échec dans les fusions-acquisitions, ils changent de tactique, privilégiant maintenant des prises de participations, des petites acquisitions ciblées et la consolidation des acteurs locaux.

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La Chine poursuit son offensive dans les semiconducteurs mais sur la pointe des pieds
Les semiconducteurs, nouveau champs de chasse des Chinois

Les Chinois poursuivent leur offensive dans les semiconducteurs. Pour la deuxième année consécutive, ils profitent du mouvement de consolidation sans précédent dans le secteur pour continuer leur chasse d’opportunités. Selon le décompte de L’Usine Nouvelle, ils ont conclu 15 transactions en 2016 pour un montant cumulé de 12,3 milliards de dollars. C’est un peu plus qu’en 2015.

Véto américain en série

Pourtant, il y a de quoi les décourager. Sur les dix opérations de 11,1 milliards de dollars qu’ils ont menées en 2015, quatre sont tombées à l’eau faute d’approbation des autorités aux Etats-Unis ou à Taiwan : le rachat de Lumileds, les LED de Philips, par le fonds d’investissement Go Scale Capital pour 3,3 milliards de dollars, et l’entrée de Tsinghua Unigroup dans le capital des taiwanais Siliconware Precision Industries Ltd (1,7 milliard de dollars), ChipMOS Technologies (360 millions de dollars) et Powertech Technology (600 millions de dollars). Sans compter le refus de Washington d’autoriser Tsinghua Unigroup à prendre 15% du capital de Western Digital, numéro un mondial des disques durs et l’un des six fournisseurs mondiaux de mémoires flash.

Les revers des chinois ne se sont pas arrêtés là. Une opération a particulièrement défrayé la chronique en 2016 : le projet d’acquisition du petit équipementier allemand Aixtron par le fonds Fujian Grand Chip Corp pour 752 millions de dollars. Elle a été bloquée, non pas par Berlin, mais par le président américain Barack Obama au nom de la sécurité nationale des Etats-Unis. Washington s’est également opposé au rachat du fondeur taiwanais de semiconducteurs GCS par Sanan Optoelectronics pour 226 millions de dollars.

Le rachat de Lattice incertain

Ces échecs n’ont pas dissuadé le fonds chinois Canyon Bridge Capital à jeter son dévolu sur Lattice, l’un des spécialistes américains de circuits logiques programmables, ces puces pressenties comme la solution providentielle pour suppléer la fin de la loi de Moore. Une opération dont l’issue reste incertaine, tant Washington semble déterminé à préserver ses joyaux et empêcher la Chine de devenir une puissance dans les semiconducteurs.

Face à la nervosité de Washington ou Taipei, les Chinois ont adapté leur tactique en privilégiant des investissements ciblés et des petites opérations. L’objectif est de se faire oublier en évitant toute opération spectaculaire comme l’offre non sollicité de Tsinghua Unigroup à 23 milliards de dollars sur le fleuron américain des mémoires Micron Technology lancée en 2015. Au lieu de cela, Tsinghua Unigroup, qui sert de fer de lance à l’offensive de la Chine dans les semiconducteurs, a pris une participation de 3% dans le capital de Lattice, de 3% dans celui d’Imagination Technologies et de 2 à 5% dans celui de Marvell Technology. Pour éviter de soupçons de manoeuvre déguisée, son PDG Zhao Weiguo lui-même les a annoncées. Il se défend de toute tentative de prise de contrôle, présentant ces opérations comme de simples investissements boursiers.

Réorientation de l'effort sur l'Europe

Les Chinois ont dans le même temps réorienté leur effort vers l’Europe en visant comme proies le fournisseur finlandais de plaques de fabrication de Mems Okmetic et l’équipementier allemand Aixtron, et en profitant d’une augmentation de capital de 152 millions d’euros du français Soitec, leader mondial des plaques de silicium sur isolant, pour en prendre 14,5% du capital.

Faute d’attraper de gros poissons dans les puces mémoires, comme l’américain Micron Technology ou le coréen SK Hynix à qui Tsinghua Unigroup a proposé une prise de participation de 25% du capital, les Chinois sont résolus à jouer la carte nationale. C’est pour rassembler les efforts du pays dans ce domaine que Tsinghua Unigroup a fusionné ses projets avec le fondeur local XMC sous le contrôle de la société holding Yangtze River Storage Technology et créé la société Changjiang Storage chargée de la production. L’objectif est de jeter la base d’une production locale de mémoires flash 3D et mémoires Dram. Le projet vise à bâtir trois méga usines pour un investissement de 70 milliards de dollars en 4 ans. De quoi faire trembler les américains Micron Technology, Intel et Western Digital, les coréens Samsung Electronics et SK Hynix, et le japonais Toshibas, qui contrôlent aujourd’hui le marché.

Regard vers Toshiba

Et les Chinois ne comptent pas en rester là. Il existe au moins trois autres projets concurrents de mémoires. GigaDevice, qui développe des mémoires flash et Dram, mène l’un d’entre eux. Pour cela, il devrait fusionner bientôt avec Integrated Silicon Solution Inc, une société américaine rachetée en 2015. Mais ce repli national n’empêche pas les Chinois de rester à l’affut d’opportunités internationales comme en témoigne l’intérêt que Tsinghua Unigroup porte aux semiconducteurs de Toshiba, dont le groupe japonais prépare la scission dans le but d’y faire entrer des investisseurs et de lever ainsi de l’argent frais pour éviter le naufrage.

12,3 milliards de dollars de transactions chinoises en 2016

  • Rachat du taïwanais GCS par Sanan Optoelectronics Co pour 226 millions de dollars
  • Rachat du finlandais Okmetic par le fonds NSIG pour 182 millions de dollars
  • Prise de 6% du capital de l’américain Lattice par Tsinghua Unigroup pour 41,6 millions de dollars
  • Prise de 3% du capital du britannique Imagination Technologies par Tsinghua Unigroup pour un montant estimé à 30 millions de dollars
  • Rachat du taiwanais AutoChips par NavInfo pour 600 millions de dollars
  • Prise de 3% du capital de l’américain Marvell Technology par Tsinghua Unigroup pour un montant estimé de 100 millions de dollars
  • Rachat de l’allemand Aixtron par le fonds Fujian Grand Chip Corp pour 752 millions de dollars
  • Prise de 14,5% du capital du français Soitec par le fonds NSIG pour un montant estimé de 90 millions de dollars
  • Rachat des circuits standards du néerlandais NXP par les fonds Jac Capital et Wide Road Capital pour 2,75 milliards de dollars
  • Rachat de l’italien LFoundry par SMIC pour 55 millions de dollars
  • Prise de contrôle du chinois XMC par Tsinghua Unigroup pour 2,8 milliards de dollars
  • Rachat de l’américain Analogix par le fonds Shanhai Capital pour 500 millions de dollars
  • Rachat de l’américain Lattice par le fonds Canyon Bridge Capital pour 1,3 milliard de dollars
  • Prise de 55% du capital du taiwanais ChipMOS Shaghai par Tsinghua Unigroup pour 77 millions de dollars
  • Rachat des circuits tactiles de l'américain Microchip par Solomon Systech pour 17 millions de dollars

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