La chimie du végétal peut-elle changer de braquet ?
Selon le groupe Xerfi qui vient de publier une étude intitulée « La chimie du végétal à l’horizon 2022 », le secteur gagne du terrain. Après une hausse de 4% en 2018, le cabinet table sur une croissance de 5% par an en moyenne d’ici 2022 pour l’activité de la filière. La chimie du végétal représentera alors 12% au mieux de l’ensemble de l’industrie chimique française (contre un peu plus de 10% en 2018).
Pour des raisons techniques ou financières, plusieurs projets ont pris du retard. Mais Xerfi cite quelques biotechs - telles que Metex, Afyren, Evertree – qui semblent bien parties pour mettre enfin en service leur unité industrielle en 2020-2021. On pourra y ajouter Microphyt qui vient de lever 28,5 M€, notamment auprès de Bpifrance (via son fonds SPI) et du fonds Sofinnova.
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Des défis à relever
Si la disponibilité de la biomasse semble assurée, Xerfi note cependant que plusieurs défis attendent les spécialistes de la chimie du végétal. Il faudra en particulier convaincre les clients de basculer vers des intrants chimiques verts, faire face à l’émergence de solutions alternatives (biomatériaux non transformés chimiquement, procédés moléculaires, économie circulaire) et composer avec une concurrence mondiale exacerbée. Le cabinet souligne que la fenêtre de tir pourrait être étroite face à une pétrochimie ultra dominante où la question de la pénurie de pétrole n’est plus d’actualité. « Surtout, remplacer les solutions pétrosourcées par des produits issus de végétaux ne suffira pas. La filière doit apporter des propriétés supplémentaires et répondre à un usage qui n’est pas servi par les polymères classiques pour sortir de la comparaison avec la pétrochimie et mettre en avant les externalités positives du biosourcé » notent les auteurs de l’étude qui s’interrogent surtout sur la capacité des acteurs de la chimie du végétal à changer de braquet.
Questionnement sur les bioplastiques avec l'économie circulaire
La chimie animale commence notamment à prendre de l’ampleur comme l’atteste la récente levée de fonds d’Ynsect. Les dernières expériences réussies en biologie (comme Bgene ou BioC3) pourraient aussi créer des brèches. Enfin, l’avènement de l’économie circulaire pourrait restreindre à terme les volumes consommés en bioplastiques vierges, surtout si les futures interdictions de plastiques recyclés ne font plus de distinction selon l’origine du produit. A plus long terme, compte tenu de critiques de plus en plus virulentes, les consommateurs pourraient finir par se détourner de certains produits chimiques (additifs alimentaires, plastiques, pesticides, solvants, etc.) et plébisciter des produits totalement naturels non transformés chimiquement. Ce qui ferait de l’ombre à la chimie du végétal.
Les ouvertures pourraient venir de l’utilisation plus systématique de biomasse végétale non alimentaire (bois, pailles, déchets organiques, algues…), du recours à des bioprocédés enzymatiques, moins énergivores et moins polluants, permettant de réduire les coûts de production. L’étude évoque la nécessité pour les acteurs de s’ouvrir à l’international pour assurer un meilleur retour sur investissement de leurs activités.