L'Union européenne doit acter définitivement la semaine prochaine son accord de pêche avec le Maroc
Après trois ans de suspension, les bateaux de 11 pays européens pourront bientôt pêcher dans les eaux marocaines. A la suite des eurodéputés mardi dernier, le conseil des ministres européens de l'agriculture et de la pêche doit adopter le nouvel accord de pêche les 16 et 17 décembre à Bruxelles. En jeu : 40 millions d'euros pour le Maroc.
Les eurodéputés ont adopté le nouvel accord de pêche Maroc-UE à Strasbourg mardi dernier. Il ne reste plus qu'un pas vers l'accord final, celui du Conseil des ministres européens.
Selon des informations de L'Usine Nouvelle, ce texte (voir son contenu intégral à la fin de cet article) qui a été validé en COREPER (représentations des Etats) va être mis à l'agenda du Conseil des ministres européens de l'agriculture et de la pêche qui doit se tenir à Bruxelles les lundi 16 décembre et mardi 17 décembre. Ce conseil sera présidé par Vigilijus Jukna, ministre de l'agriculture de la Lituanie, pays qui assure la présidence tournante de l'Union européenne pour quelques jours encore.
Ce conseil des ministres a un programme chargé mais le vote sur l'accord de pêche marocain qui fait relativement consensus y a été ajouté, selon l'entourage de la présidence lituanienne.
"formalitÉ"
"Une large majorité d'Etats est en faveur de ce texte. Il sera facilement adopté en Conseil même si deux ou trois pays sont contre à propos surtout des droits de pêche au large du Sahara Occidental et de l'inclusion des populations de cette région", indique à L'Usine Nouvelle un expert bruxellois.
Une fois ce vote en conseil réalisé, l'accord sera dès lors définitivement validé juridiquement par l'Union européenne. Ne restera plus alors qu'à effectuer son adoption par les parlementaires marocains, ce qui n'est qu'une formalité. Il s'appliquera donc dès début 2014.
L'accord prévoit le droit pour les bateaux de 11 pays européens de pêcher dans les eaux marocaines surtout atlantiques. Ce deal se fait en échange d'un paiement annuel de l'Union européenne de 30 millions d'euros. Sur cette somme 14 millions doivent venir soutenir le développement et la modernisation du secteur de la pêche au Maroc.
L'Espagne, surtout, est concernée car sur les 126 bateaux autorisés à pêcher une centaine sont espagnols. Mais, il y a aussi quelques bateaux français.
Lors du vote au Parlement européen après de mois de débats en commission parlementaire et aller-retour avec la Commission européenne et le Conseil, ce mardi, le rapporteur du texte, la députée européenne espagnole Carmen Fraga Estévez (PPE) a déclaré "il s'agit d'un excellent accord pour les deux parties, qui remplit les conditions demandées par le Parlement européen dans sa résolution de 2011, en garantissant un accord durable et un retour équitable de la contribution budgétaire de l'UE. Le Maroc devra prouver qu'il investit l'argent d'une manière favorable pour les populations sahraouies. Par ailleurs, les possibilités de pêche pour 11 États membres permettront à 1500 pêcheurs, dont 500 devraient être des locaux, de pouvoir pêcher".
La France parmi les 11 Etats européens concernés
Les 11 États membres qui ont un intérêt dans ce futur nouvel accord de pêche avec le Maroc sont l'Espagne, le Portugal, l'Italie, la France, l'Allemagne, la Lituanie, la Lettonie, les Pays-Bas, l'Irlande, la Pologne et le Royaume-Uni.
Les eurodéputés ont donc adopté le nouveau protocole par 310 voix pour, 204 contre et 49 abstentions. Celui-ci doit s'appliquer pendant quatre ans à partir de son entrée en vigueur.
Les députés de plusieurs groupes politiques ont voté contre l'accord "au motif qu'il ne respecte pas le droit international puisqu'il n'exclut pas les eaux des côtes du Sahara occidental et que la population sahraouie n'a pas été consultée", indique le communiqué du Parlement européen. Les Verts, notamment français comme Eva Joly ou Yannick Jadot, ont tous voté contre. Mais la majorité (43 sur 74) des eurodéputés français ont voté "pour", tout comme 30 des 54 députés espagnols.
L'issue de ce vote mardi a par ailleurs suscité quelques manifestations de militants sahraouis et représentants d'ONG espagnoles à Laâyoune, principale ville du Sahara occidental. Cette zone au statut disputé, revendiquée par le Polisario est administrée de facto par le Maroc en attente d’une solution politique sous l'égide des Nations Unies qui y ont déployé la MINURSO (Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental).
"préoccupations des députés sur le rapport coûts-bénéfices"
L'accord précédent avait été négocié en février 2011 et s'appliquait de manière provisoire jusqu'en décembre 2011. Mais fin 2011 à la grande surprise des parties, les eurodéputés avaient alors rejeté sa nouvelle version en pleinière.
"Les députés avaient alors souligné que le rapport coûts/bénéfices était trop faible et que l'accord n'étaient pas durable car il ciblait des espèces de poissons surexploitées. Toutefois, le principal point de débat était la conformité de l'accord avec le droit international et de savoir si l'accord bénéficiait à la zone litigieuse du Sahara occidental.", indique un communiqué du Parlement européen.
En plus des 30 millions d'euros annuels payés directement par l'Union, environ 10 millions seront payés aux autorités marocaines par les propriétaires de bateaux qui ont l'intention de pêcher conformément à l'accord.
Le coût du nouvel accord a été réduit pour l'Union européenne par rapport au précédent (36,1 millions d'euros) et les opportunités de pêche ont été augmentées d'un tiers, "répondant ainsi aux préoccupations des députés sur le rapport coûts-bénéfices", estime-t-on au Parlement européen.
Côté marocain, après le vote du Parlement, c'est la satisfaction qui prévaut, à commencer par celle de Aziz Akhannouch, le ministre de l'agriculture et de la pêche maritime
Mais le non-respect des dispositions de l'accord par le Maroc pourra entraîner la suspension du protocole de pêche...
Pierre-Olivier Rouaud
Le texte intégral du protocole entre l'Union européenne et le Royaume du Maroc sur la pêche
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