L’ultime ambition de la loi Travail, les accords d’entreprises, objet de détricotage
Au fil des semaines et des amendements, la loi Travail portée par Myriam El Khomri réduit peu à peu ses ambitions réformatrices. Face à la difficulté de trouver une majorité, le passage de la loi en 49.3 est sur le point d'être décidé, un Conseil des ministres extraordinaire est convoqué ce 10 mai à 14h30. Dans la négociation qui se joue au sein même du parti socialiste et de ses alliés : l’article 2 qui inverse la hiérarchie des normes entre l’entreprise, la branche et la loi sur le temps de travail.
Malgré les revirements gouvernementaux entre la version 1 et 2 de la loi El khomri, les changements apportés en commission des affaires sociales, les concessions faites à la jeunesse, il restait tout de même un changement de paradigme important dans la loi portée par Myriam El Khomri : la primauté de l’accord d’entreprise sur la branche et la loi en matière de temps de travail.
Ce principe était soutenu par les syndicats réformateurs, et en particulier par la CFDT qui considère l’entreprise comme le lieu privilégié de la négociation et du dialogue social.
Mais cette démarche, objet de l’article 2 de la loi, est fortement contestée par un certain nombre de députés, rejeté par les syndicats CGT et FO, et peu soutenu par le rapporteur du projet de loi, Christophe Sirugue au motif qu’elle entraîne une inversion de la hiérarchie des normes.
Cette inversion serait, pour ses détracteurs, forcément défavorable aux salariés et risquerait de mettre à mal le business des entreprises par une spirale de dumping social au sein des filières. Le rapporteur du projet de loi a donc concocté un amendement où l’accord serait écrit par l’entreprise mais soumis à la branche pour "avis a priori" (elle aurait maximum un mois pour se prononcer).
Le Medef s'oppose à la régulation par les branches
On réintroduit donc la branche dans le jeu. Si cet amendement est soutenu par le gouvernement, dans son marchandage avec sa majorité, il ne restera plus grand-chose de la loi Travail, hormis la sécurisation juridique du licenciement économique. Et encore reste à discuter du périmètre des difficultés économiques l’autorisant (national, européen ou mondial).
En conférence de presse ce matin Pierre Gattaz a marqué son opposition à cette régulation par les branches. "Les branches c’est bien mais ce n’est pas l’instrument du 21ème siècle, c’est celui des trente glorieuses, du 20ème siècle, d’une époque où la concurrence était française. Aujourd’hui la concurrence c’est le monde, et il faut s’adapter sinon les entreprises vont créer de l’emploi en dehors de France."
Au fil des réécritures, le patron de l’organisation patronale voit globalement s’éloigner l’ambition initiale du texte qui était de créer de l’emploi. "Et c’est à cette aune que nous jugerons de la version finale".
Aujourd’hui trois sujets provoquent un fort rejet de la part de l’organisation patronale : la taxation des contrats courts, le mandatement syndical pour signer des accords dans les entreprises où il n’y a pas de délégués syndicaux, l’extension du Compte personnel d’activité en particulier à destination des retraités. Se jugeant incapable à l’heure actuelle d’avoir une vision précise de ce que sera le texte final, le Medef a reporté sa décision de quitter ou non la table de négociation de l’assurance-chômage en signe de protestation.
L’ultime ambition de la loi Travail, les accords d’entreprises, objet de détricotage
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