L'UE pointe AstraZeneca du doigt dans son différend avec Londres sur les vaccins
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\ 15h52
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LONDRES (Reuters) - La Grande-Bretagne a exigé lundi de l'Union européenne qu'elle autorise les livraisons de vaccins contre le COVID-19 fabriqués dans l'UE, dernier épisode en date d'un différend entre Londres et Bruxelles, qui en attribue la responsabilité à AstraZeneca.
"Ce n'est pas la faute du Royaume-Uni, ce n'est pas la faute de l'UE", a dit un haut responsable de l'Union. "Chacun doit trouver un accord avec une entreprise qui a survendu sa capacité de production. AstraZeneca doit livrer les doses à ses clients de l'UE."
Les dirigeants des 27 pays de l'Union doivent débattre jeudi, lors d'un conseil européen en ligne, de l'éventualité d'une interdiction des exportations de vaccins de l'UE vers la Grande-Bretagne.
Dimanche, le Premier ministre britannique, Boris Johnson, s'est entretenu au téléphone avec le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande, Angela Merkel, pour tenter d'éviter une telle issue.
Le porte-parole de Boris Johnson s'est refusé à dire si Londres envisageait des mesures de représailles.
"Je ne vais pas entrer dans des hypothèses mais notre position est claire: nous ne voulons pas voir certains pays mettre en place des restrictions à l'export sur les vaccinations", a-t-il dit.
Selon AstraZeneca, le Royaume-Uni s'appuie sur une clause de son contrat de fourniture qui empêche les exportations de son vaccin tant que le marché britannique n'est pas intégralement approvisionné, explique l'UE.
La Commission européenne, qui a coordonné les commandes de vaccins pour les 27 pays de l'Union, met en avant l'exigence de réciprocité en soulignant que l'UE a exporté quelque 35 millions de doses depuis fin janvier, dont dix millions vers la Grande-Bretagne, alors que cette dernière n'en a exporté aucune.
L'UE DIVISÉE SUR LES INTERDICTIONS À L'EXPORT
"Notre position, c'est que nous attendons d'AstraZeneca qu'il livre à l'Union européenne les doses prévues au contrat. Des contacts sont en cours avec la société", a dit Eric Mamer, porte-parole de la CE, lors d'une conférence de presse.
Les pays de l'UE ne sont toutefois pas au diapason sur le sujet: si la France, l'Allemagne et l'Italie sont favorables à des restrictions à l'exportation en cas de non-réciprocité, d'autres comme les Pays-Bas, la Belgique et l'Irlande sont plus prudents.
Le Premier ministre irlandais, Micheal Martin, a ainsi estimé que toute restriction européenne dans ce domaine serait "une mesure rétrograde".
La porte-parole du gouvernement allemand Martina Fietz a déclaré que Berlin souhaitait un réexamen des règles européennes en matière d'exportations de vaccins car "beaucoup de vaccins partent de l'UE vers des pays tiers" alors que "quasiment rien n'est exporté de Grande-Bretagne ou des Etats-Unis".
Un responsable européen a déclaré dimanche à Reuters que l'UE avait refusé à Londres son feu vert aux livraisons de doses du vaccin d'AstraZeneca produites dans une usine néerlandaise sans même attendre que le laboratoire en fasse la demande formelle.
"Les Britanniques insistent sur le fait que l'usine d'Halix aux Pays-Bas doit leur livrer les produits pharmaceutiques fabriqués là-bas. Ça ne marche pas", a-t-il dit.
Le site de Leyde, exploité par Halix, un sous-traitant d'AstraZeneca, figure comme site de fabrication aussi bien dans le contrat signé par la Grande-Bretagne que dans celui conclu par l'UE. Il n'a pas encore été homologué par l'UE mais AstraZeneca s'attend ce que cela soit le cas fin mars ou début avril.
(Avec Elizabeth Piper et Sarah Young à Londres, Philip Blenkinsop à Bruxelles et Thomas Escritt à Berlin; version française Marc Angrand, édité par Bertrand Boucey)