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Le folklore a été respecté. Devant les magasins de grandes villes américaines, les files d’attente se sont formées au milieu de la nuit. Et le 3avril au matin, quelques minutes après l’ouverture, les premiers acheteurs ressortaient en brandissant fièrement leur trophée. 300 000 iPad se seraient écoulés dès le premier jour, 450 000 au bout de cinq jours. Bravo à Apple, qui a su faire monter la pression, rendre son produit encore plus désirable par l’attente.
L’iPad, qui sera commercialisé en France le 24 avril, est un objet réussi. Pas de déception quand on le découvre, même si sa prise en main n’est pas idéale quand on ne peut pas le poser sur ses genoux... Son interface est mise en valeur par un écran d’excellente qualité. Est-ce pour autant la révolution annoncée par Steve Jobs, le PDG d’Apple? Lors de la présentation officielle de la tablette fin janvier, il avait tout simplement comparé l’iPad… aux tables de la Loi de Moïse. « La dernière fois qu’une tablette a déchaîné tant de passion, il y avait des commandements écrits dessus! », pouvait-on lire sur une diapositive de la présentation.
Faut-il partager cet enthousiasme ? L’iPad n’est pas, de loin, la première tablette, cet objet hybride, ni smartphone, ni ordinateur portable qui n’a, jusqu’à présent, pas trouvé grâce auprès du grand public. En 2002 déjà, Bill Gates avait lancé avec force superlatifs la version de Windows pour tablette PC. Et Steve Jobs, lui, a fait certains choix radicaux, refusant d’ouvrir l’iPad. Une option cohérente dans un souci de facilité d’utilisation et de maîtrise de la chaîne économique. Une manière de marquer que sa tablette n’est pas, à la différence des prédécesseurs, le dérivé d’un microordinateur, mais bien un objet différent, post-informatique.
Tout pour l'utilisateur
« L’iPad est une synthèse créative », lance Jean-Louis Frechin, le fondateur de l’agence de design numérique NoDesign et enseignant à l’ENSCI. Selon lui, tous les ingrédients existaient, mais seul Apple a trouvé la bonne recette. Apple est comme un grand chef, comme Sony l’a été à sa grande époque. La rupture n’est pas tant dans l’objet, mais dans son usage et sa cible. Car si l’iPad embarque tous les composants d’un ordinateur mobile multimédia, il n’en n’est pas un. « C’est un produit grand public, presque un Minitel de la culture », analyse Jean-Louis Frechin. Signal fort, dès 2007, Apple avait retiré le mot «computer » de son nom.
Objet grand public, l’iPad n’est pas pour autant un objet personnel comme l’iPhone. Ce serait plutôt un hybride personnel/familial. Et si, pour l’instant, ce sont les «geeks» qui se l’arrachent, l’objet vise plutôt les primo-utilisateurs, les seniors que la logique informatique rebute ou les enfants et non les internautes chevronnés. Plutôt que de concurrencer les mini PC, « l’iPad pourrait remettre en cause la deuxième télévision dans les foyers. Il pourrait même passer par-dessus les services des box internet », anticipe Jean-Louis Frechin. Il pourrait aussi devenir la tablette multimédia de demain dans les avions, les trains à grande vitesse... « Le succès de l’iPad pourrait également venir de secteurs où on ne l’attend pas, comme l’éducation », anticipe Bernard Benhamou, le délégué aux usages de l’internet auprès du secrétaire d’Etat à l’Economie numérique et à la Prospective. Autre voie de développement, celle des entreprises à l’image de l’iPhone, dont les applications professionnelles se sont multipliées. A son lancement, il était pourtant considéré comme un smartphone grand public.
Pour certains, l’iPad est un objet révolutionnaire. «Son apparition est un événement majeur, écrit sur son blog, Rafi Haladjian, le père du lapin communicant Nabaztag. L’iPad inaugure la fin officielle de l’informatique pour introduire vraiment la vie numérique.» De fait, un ordinateur, héritage de la machine à écrire, est trop complexe à utiliser, «notamment pour les 15 à 20%des personnes qui ont des problèmes de lecture », observe Bernard Benhamou. La logique, qui a dominé l’informatique jusqu’à maintenant, consiste à compacter le maximum de fonctions dans des logiciels, alors que les utilisateurs n’en exploitent qu’une infime partie. Elle a atteint aujourd’hui ses limites.L’iPad, lui, privilégie la simplicité et l’usage. «Apple met en avant l’expérience utilisateur, pas la performance technique. Sa recette? Penser simplement le logiciel, concevoir des appareils désirables et faire attention à tous les détails », résume Jean-Louis Frechin.
Un départ en flèche
300.000 iPads (entre 499 et 829 dollars selon les modèles) ont été écoulés le jour de leur sortie aux États-Unis le 3 avril.
-> 1 million d'applications téléchargées
-> 250.000 livres électroniques achetés sur iBook
Les deux versions (Wi-Fi et Wi-Fi 3G) de l'iPad permettent de...
-> lire des journaux, des livres
-> regarder des films, des photos
-> surfer sur internet, jouer
-> consulter les mails
L’absence de connecteur USB est vraiment agaçante pour les habitués de l’informatique et complique l’échange de gros fichiers. Tout comme celle d’un décodeur pour le format Flash, très répandu sur internet pour les animations. Des choix qui simplifient effectivement l’usage, mais qui guident les pas des utilisateurs vers l’App Store, la boutique en ligne. Enfin, le système d’exploitation monotâche déroutera les utilisateurs d’ordinateurs. Un défaut qui sera réglé à l’automne avec l’arrivée d’une nouvelle version du système d’exploitation.
Un modèle économique à définir
Reste que le succès de l’iPad dépendra du modèle économique mis en place par Apple avec les éditeurs de presse, ceux du livre et surtout avec les opérateurs de téléphonie mobile. Alors qu’aux Etats-Unis, le produit vedette d’Apple dans sa version 3G sera commercialisé fin avril en exclusivité avec l’opérateur AT&T, la situation n’est pas tranchée en Europe. Des discussions sont en cours mais aucun opérateur n’a signé d’accord officiel avec Apple pour une éventuelle subvention de l’iPad 3G. Un point critique pour en vendre de grandes quantités. Les opérateurs semblent en effet perplexes.
Tout d’abord, parce que les deux services les plus lucratifs pour eux (voix et SMS) sont absents de l’iPad. « Cet appareil est le précurseur d’un nouveau modèle économique entre les opérateurs et les autres acteurs de la chaîne de valeur. Ils vont en effet devoir subventionner de plus en plus d’appareils connectés qui ne sont pas des téléphones », décrypte Thomas Husson, analyste au cabinet Forrester. Ensuite, parce qu’ils jugent le modèle économique défavorable. Ils craignent en effet que l’iPad avec ses nombreuses applications vidéo ne viennent saturer davantage leurs réseaux. Car si les opérateurs profitent de l’explosion du trafic des données en termes de revenus (3,1 milliards d’euros en 2008 en France, en hausse de 27%), la croissance des besoins de capacité implique qu’ils doivent dépenser toujours plus pour adapter leurs infrastructures. Des investissements plus coûteux que les revenus générés. Selon eux, le partage de valeur n’est pas au rendez-vous. Alors qu’Apple conserve 30% des recettes par application payante téléchargée sur iPhone pour en reverser 70% aux développeurs, les opérateurs ne touchent pas un centime.
Selon Virginie Lazès, directrice associée au sein de la banque d’affaires Bryan Garnier, le rapport de force n’est pas en faveur des opérateurs. « Apple est unique et fort, les opérateurs nombreux et avec des stratégies différentes. S’ils se mettaient tous d’accord, ils pourraient refuser de subventionner la tablette. Mais ils veulent tous être le partenaire privilégié de l’américain.» En attendant la multiplication des tablettes qui aideront à créer un véritable marché concurrentiel.
Camille Chandès, Patrice Desmedt et Aurélie Barbaux
Unique, mais pas seul
Les tablettes existent depuis longtemps. Sans remonter jusqu’au GRiDPad de GRiD Systems conçu en 1989, Microsoft avait lancé en 2002 une version de Windows pour tablette PC, destinée au grand public. Sans succès. Depuis, les produits n’ont cessé de s’alléger tout en gagnant en performance. Aujourd’hui, l’Archos 9 du français Archos, déjà commercialisé, présente des caractéristiques techniques proches de celles de l’iPad. Intrinsèquement plus performant et ouvert (il peut servir de magnétoscope numérique et se connecter à un réseau 3G par l’intermédiaire d’un téléphone mobile). Il souffre néanmoins du retard pris par Windows dans le domaine de l’interface tactile et de quelques millions de dollars pour orchestrer de véritables campagnes marketing. Archos propose aussi des tablettes plus compactes, plus légères et plus économiques, qui reposent sur le système Android de Google. Les américains HP et Dell, le taïwanais Asus et même le finlandais Nokia ont eux aussi annoncé le lancement de leur version d’une tablette tactile multimédia.
Photo : L’Archos 9 présente des caractéristiques techniques proches de celles de l’iPad.
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