L’industrie nucléaire mondiale prise en tenaille entre renouvelables et gaz de schiste

Selon le World Nuclear Industry Status Report 2017, 10 nouveaux réacteurs sont entrés en service en 2016 et en 2017, dont la moitié en Chine. Mais la rentabilité de cette énergie est menacée par le gaz de schiste et son attractivité par les énergies renouvelables.

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L’industrie nucléaire mondiale prise en tenaille entre renouvelables et gaz de schiste
Centrale nucléaire de Chooz

Constructions de centrales, démarrages et arrêts définitifs de réacteurs de puissance, lancements, durées, retards et arrêts de chantiers… Le World nuclear industry status report (WNIS) dresse chaque année un panorama détaillé de l’état du parc nucléaire civil mondial, de son évolution depuis 1951 et de l’actualité de ses principaux acteurs. Et même s’il ne traite ni de démantèlement, ni de la gestion des déchets, ni d’emploi, et que son auteur, le consultant indépendant Mycle Schneider, est résolument pour une sortie du nucléaire, ce rapport reste un document de référence.

Dans l’édition 2017, qui vient d’être publiée, on apprend ainsi que la production nucléaire mondiale a augmenté de 1,4 % en 2016, notamment grâce à une hausse de 23 % en Chine mais la part du nucléaire dans la production électrique mondiale est restée quasi stable à 10,5 % (-0.2 %). Dix réacteurs ont été mis en service en 2016, dont cinq en Chine, et deux en 2017, dont un en Chine et un au Pakistan, mais de construction chinoise.

53 réacteurs en construction

La mise en construction de nouveaux réacteurs – qui débute avec le bétonnage de la plaque du réacteur pour les auteurs de ce rapport – semble ralentir. Seuls trois réacteurs ont été mis en construction en 2016, dont deux en Chine et un au Pakistan (toujours de construction chinoise), contre dix en 2015. Celui de Hinkley C au Royaume-Uni, n’est pas considéré comme démarré par le rapport. En 2017, seule l’Inde a entamé la construction d’un nouveau réacteur. À mi-2017, 53 réacteurs nucléaires étaient en construction dans 13 pays, dont 20 en Chine. La durée moyenne des 51 chantiers menés entre 2007 et 2017 a été de dix ans, avec un minimum de 4 ans en Chine et un maximum de 43,5 ans aux Etats-Unis. Les causes de retards de constructions ont pu être documentées pour 37 chantiers.

La construction du projet Angra-3 au Brésil a été arrêtée suite à un scandale de corruption. L’arrêt définitif d’un chantier n’est pas rare. Depuis 1980, 90 réacteurs n’ont jamais été achevés. En 2017, sur quatre projets aux États-Unis, deux ont été arrêtés. "Un scénario où Hinkley Point C ne serait jamais terminé est crédible", veut croire Mycle Schneider.

Fin de l’exception chinoise ?

Pour l’expert, le ralentissement de 2017 pourrait indiquer "le début de la fin de l’exception chinoise, qui tire l’industrie nucléaire depuis 2010, même s’il est un peu tôt pour l’affirmer". En revanche il est clair que ce marché atone est dévastateur pour les industriels du secteur. En avril 2017, Toshiba a déposé le bilan de sa filiale américain Westinghouse, le plus important constructeur de centrale au monde. Et l’Etat français a dû se lancer dans une grande opération de recapitalisation d’Areva, dont l’activité de construction de centrales doit être reprise par EDF, ne laissant à l’entreprise que ses activités liées au combustible et au traitement des déchets.

403 réacteurs en activités dont 53 ont plus de 41 ans

Côté fermeture, deux réacteurs, l’un en Russie et l’autre aux États-Unis, ont été déconnectés du réseau en 2016. En 2017, la Suède et la Corée du Sud ont fermé leur plus vieux réacteur. L’âge moyen de la flotte mondiale (403 réacteurs) est de 29,3 ans, et 64 réacteurs dépassent les 41 ans.

Mais les réacteurs en fin de vie ne sont pas les seuls à fermer. "Il y a déjà eu six fermetures de réacteurs pour des raisons économiques aux États-Unis, même avant la fin de leur période de vie, car les investissements nécessaires sont plus élevés que les retours sur investissement", explique Juan Camillo Rodriguez, analyste chez AutoValue. En cause notamment, les gaz de schiste ayant fait chuter le prix du KWh autour de 20 dollars. "La première victime a été le charbon, et la deuxième le nucléaire", explique Andreas Rüdinger, un consultant indépendant qui a participé au rapport.

Des ENR de plus en plus compétitifs

Les gaz de schiste ne sont pas les seuls à menacer la rentabilité du nucléaire. Les énergies renouvelables pèsent de plus en plus lourd dans les mix énergétiques. Et ils drainent la plupart des investissements des états. "240 milliards ont été investis dans les énergies renouvelables en 2016 contre une dizaine de milliards pour le nucléaire. On est dans un rapport de 1 à 24", observe Andreas Rüdinger. Et contrairement au nucléaire qui est une énergie de coûts fixes, les prix des renouvelables ne cessent de baisser. "On a assisté à une réduction des coûts de 90 % entre 2009 et 2016 dans le photovoltaïque et de 50 % pour l’éolien. Et on voit une réduction des coûts unitaires de presque 30 % par MW installé", rappelle l’analyse. Des prix bas qui font réfléchir à deux fois les États à investir dans le nucléaire. Une mauvaise nouvelle pour la filière.

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