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L’industrie, atout maître des sucriers français
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Echec d’une alliance entre les sucriers Cristal Union et Tereos
L’industrie, atout maître des sucriers français
Depuis plusieurs années, les sucriers français ont investi dans leurs usines pour se préparer à la libéralisation du marché européen du sucre. Face à des cours en chute, la compétitivité des sucreries sera leur atout maître. Enquête.
Depuis début septembre, dans l’Aisne, l’Oise, la Somme ou encore la Marne, le spectacle est identique. Des hordes de camions sortis des champs de betteraves sillonnent nuit et jour les routes pour alimenter les sucreries qui tournent à plein régime. Cette année, la campagne de récolte et de production a débuté deux semaines plus tôt que d’habitude. La faute à "l’après-quota", qui constitue une révolution dans le secteur. Contingenté depuis cinquante ans, le marché européen du sucre est libéralisé : à partir de ce 1er octobre, les industriels européens ne sont plus limités dans leur production et peuvent exporter.
Dans les champs comme dans les sucreries, les volumes ont donc augmenté de 20 à 30% pour tirer parti de cette opportunité. Et la bataille industrielle fait rage, en particulier en France, premier producteur mondial de sucre de betteraves, même si 80% du sucre mondial est issu de la canne. Bienvenue dans la patrie de Tereos, numéro trois mondial du sucre (4,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires, connu pour la marque Beghin Say), et Cristal Union, quatrième acteur européen (2,5 milliards d'euros, marque Daddy).
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Base 100 en 2010
20 000 de tonnes de betteraves déposées chaque jour à Origny
A l’usine d’Origny Sainte-Benoîte (Aisne), spectaculaire site historique et vaisseau amiral de Tereos en raison de ses multi-activités (sucre, bétaïne, distillerie de betterave et de blé), pas moins de 900 camions déposent chaque jour, 20 000 de tonnes de betteraves dans la cour, devant d’immenses silos de sucre en béton.
Pesées (pour rémunérer en conséquence les planteurs), elles vont subir de multiples étapes de lavage, en plein air, dans de gigantesques tambours et systèmes de flottations différentiels. Avant d’être finement rappées en "cossettes", puis passer dans de larges tubes où navigue, à contrecourant, de l’eau chaude. Le jus sucré récolté est alors filtré, puis concentré par évaporation avant la cristallisation : la cuisson dans d’énormes chaudières en cuivre de 50 mètres cube, déchargeant, toutes les deux heures et demie, 37 tonnes de sucre en cristaux qui seront malaxées, séchées puis conditionnées.
De la betterave au sucre blanc… en douze heures
A 40 kilomètres de là, le même processus est réalisé derrière les bâtiments de brique rouge de l’usine de Sainte-Emilie de Cristal Union, dans la Somme, d’où sortent chaque jour 280 000 de tonnes de sucre. "En douze heures, on passe de betteraves à un sucre blanc directement assimilable par l’organisme ou qui servira de matière première à nos clients de l’agroalimentaire", raconte Vincent Lagasse, le directeur du site.
Un process à la haute technicité et qui doit pouvoir tourner en continu, sept jours sur sept, durant 110 jours chez Cristal union, 140 chez Tereos. Mais ici, pas d’opérateurs postés à la chaine comme dans le reste de l’agroalimentaire : les équipements sont autonomes et parfaitement automatisés. Hormis l’intervention des spécialistes de la maintenance, les salariés sont relativement épargnés du bruit, et de l’odeur de fermentation naturelle dégagée par l’eau se chargeant en sucre. Car beaucoup travaillent dans les salles des contrôles, où multiples écrans et ordinateurs leur permettent de vérifier des milliers de paramètres et de conduire les lignes à distance.
Au sein de l’agro, la noblesse du métier du sucre
"Des générations d’ingénieurs agro ont été attirés par la noblesse de ce métier, qui relève de l’industrie lourde avec ses importants Capex et process, raconte Frédéric Le Moigne, associé du cabinet Proconseil. Car la sucrerie est d’une relative complexité technique pour avoir un bon rendement matière, un beau sucre, et la meilleure empreinte environnementale possible."
Haute technicité et ticket d’entrée élevé : pas étonnant, dès lors, que seulement trois industriels se partagent, en France, vingt-trois des vingt-cinq sucreries de betterave : les coopératives Tereos et Cristal Union, mais aussi Saint Louis Sucre, propriété du groupe allemand Südzucker, numéro deux mondial du sucre derrière le brésilien Raizen.
Un marché concentré, en quête de compétitivité
Mais pour faire face à la concurrence mondiale qui s’annonce, la filière française devait impérativement améliorer sa compétitivité, notamment en termes de taille critique et d’optimisation du parc industriel, alertait dès 2015 le cabinet d’étude PwC dans une étude.
Un travail réalisé aux yeux d’Alexis Duval, le président du directoire de Tereos. Dès 2006, une réduction drastique des quotas à l’échelle européenne avait conduit à un premier mouvement de concentration, avec "la fermeture d'une sucrerie sur deux" mais "permis d'accroître considérablement la compétitivité européenne"… même si elle n’est toujours pas à la hauteur du sud du Brésil.
Dans l’Hexagone, trois usines de Tereos ont ainsi disparu en dix ans, tandis que Cristal Union a fermé un site et rapatrié le conditionnement d’un autre sur sa gigantesque sucrerie de Bazancourt (Marne). Mais, dans le même temps, chacun a poursuivi ses recrutements et investi dans ses sites pour les optimiser, en rallongeant les campagnes de production, saturant les capacités industrielles, réduisant les consommations d’énergie…Chez Tereos, ce sont 600 millions d’euros qui ont été investis en quatre ans dans les usines. Cristal Union investit pour sa part une centaine de millions d’euros par an.
Priorité à l’efficacité énergétique
Economie circulaire, maitrise énergétique, baisse des intrants, optimisation logistique : dans les sucreries, la priorité donnée à l’efficacité énergétique commence à porter ses fruits. Chez Tereos, la consommation d’énergie a ainsi reculé de 15% entre 2010 et 2017. Chez Cristal Union, un projet de longue haleine aux 45 millions d’euros va permettre d’alimenter en gaz Sainte-Emilie, et de l’acheminer pour les villages alentours. La chaudière au fioul tourne pour la dernière fois cette année : elle laissera la place à deux chaudières haut rendement pour fournir de la vapeur, et faire tourner le turbo-alternateur. "Betterave, énergie et main d’œuvre sont les trois grands postes de notre structure de coûts, la betterave pouvant représenter jusqu’à la moitié. Mais la question de l’énergie est centrale : pour l’environnement, mais aussi pour nous : on investit pour du long terme", reconnaît Xavier Astolfi, le directeur général adjoint de Cristal Union.
Chez les sucriers français, l’économie circulaire est au cœur du process. "99% des matières premières que nous transformons sont valorisées à l’échelle du groupe, via les coproduits pour la nutrition animale, l’eau de la betterave recyclée ou encore les effluents transformés en biogaz", raconte Hugues Maquin, le directeur du site d’Origny Sainte-Benoîte.
Choisir entre sucre et éthanol…
Mais, pour rester compétitif, Tereos mise aussi sur des équipements assurant la "flexibilité de la production sucre ou éthanol pour tirer parti au mieux de l'évolution des marchés tout au long de l'année". Même arbitrage chez Cristal Union. Car c’est le point noir de cette rentrée. Alors que les sucriers français avaient connu une bonne campagne 2016-2017, les cours du sucre ont chuté ces derniers mois. Depuis le début de l'année 2017, la livre de sucre a perdu plus du quart de sa valeur à la Bourse de New York. Un bas de cycle qui s’explique par un excédent de production sur le marché mondial, après deux ans de déficit. La faute aux ambitions des acteurs européens, mais pas que… Après des années de préparation et d’investissements, le contexte de l’après-quota se révèle donc bien moins favorable qu’escompté par les Français. Chez Cristal Union, on se prépare à "une année de transition", reconnaît Xavier Astolfi. En attendant, la campagne qui bat son plein dans les sucreries s’annonce bonne.
Gaëlle Fleitour
La France, poids lourd du sucre
La France est la première productrice mondiale de sucre de betterave. Mais 80% du sucre mondial est issu de la canne, la compétition est donc sévère avec les raffineries du Brésil ou du Moyen-Orient. En 2016, les 25 sucreries et sucreries-distilleries de l’Hexagone ont produit 4,5 millions de tonnes de sucre et 9 millions d’hectolitres d’alcool de betterave, dont la moitié d’éthanol carburant.
L’industrie, atout maître des sucriers français
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