Intelligence artificielle : l’Académie des Technologies pointe les limites du rapport Villani
Si la France s’est doté d’un grand plan de développement de l’intelligence artificielle (IA), un rapport de l’Académie des technologies, présenté lundi 9 avril, apporte un autre éclairage sur ce marché capital pour le futur des entreprises françaises.
Suite à la publication du rapport Villani et l'annonce de la stratégie "France IA" du président Emmanuel Macron, l'Académie des technologies vient de publier un rapport qui apporte une autre vision sur les efforts que la France doit accomplir pour se replacer en pointe dans ce domaine. « Nous nous inscrivons globalement dans les mêmes objectifs que ceux évoqués par Emmanuel Macron et nous pensons qu’il faut conforter l’écosystème de l’Intelligence Artificielle en Europe » a expliqué Yves Caseau, président de la commission Technologies de 'l'information et de la communication de l'Académie des technologies qui a néanmoins ajouté: « pour notre part, nous avons préféré nous intéresser plus à l’écosystème aval, c'est-à-dire celui des usages, des applications, par opposition à l’écosystème amont de la recherche. »
Réfléchir à l'après RGPD
Autre différence, l’Académie des Technologies milite en faveur d’une ouverture plus grande sur les données, une position particulièrement à contre-courant en cette période de mise en place du RGPD et du scandale Facebook/Cambridge Analytica. « Le volume des données est multiplié par 8 chaque année, or ce sont surtout les données du futur qui comptent et pas celles du passé. Il faut maintenant se poser la question de comment on pourra faciliter la collecte des données dans le futur. Enfin, il faut mettre en place une stratégie de financement de projets qui nous permette de réussir dans la compétition internationale. »
Privilégier une approche sectorielle
Sur ce point, l’Académie des Technologies se démarque plus nettement de l’approche Villani. Yves Caseau juge les entreprises et les industriels français bien trop frileux face à l’IA : « Nous n’avons pas un problème d’offre : les technologies sont là, mais il y a un problème de demande. » Les rédacteurs du rapport suggèrent la mise en place d’écosystèmes sectoriels baptisés "IA + X", avec des technologies IA déclinées par secteurs, pour les transports, la santé, etc. Le constat des rédacteurs du rapport, c'est que si la plupart des entreprises du CAC40 se sont effectivement emparées du sujet IA, elles le font encore sur le mode de l’expérimentation et ne se dotent pas des moyens de calcul qui leur permettrait d'accélérer leurs innovations. François Bourdoncle, ex-fondateur d'Exalead et du groupe de travail de l'Académie des technologies a ajouté : « Tous les secteurs d'activité sont aujourd'hui concernés et on ne peut acheter sur une approche de sous-traitance la compétence sur son propre métier. Se saisir de ces sujets d’apprentissage automatique est au cœur de métier des entreprises. Elles ne peuvent l'acheter à l’extérieur et ne pas se saisir de ces problématiques aujourd'hui, c’est prendre le risque au niveau de son propre métier demain. »
Impliquer les centres d'essai dans l'adoption de l'IA par l'industrie
Outre l'intégration de notions d'IA dans les cursus de formation des managers français afin de leur faire pleinement intégrer cette nouvelle dimension dans leurs stratégies d'entreprise, les membres du groupe de travail de l'Académie des technologies suggèrent de mettre à profit les structures comme les IRT ou encore les Centres d’essais afin de permettre aux industriels de s'acculturer sur l'IA et l'apprentissage automatique et créer leurs propres cas d'usage.
Aux approches défendues par Cédric Villani et Emmanuel Macron, les représentants de l'Académie des technologies proposent d'ajouter une dimension "IA + X" axée sur les applications opérationnelles de l'IA dans les entreprises.