Goodyear Amiens-Nord : la judiciarisation maximum

Le processus de fermeture de l’usine Goodyear d’Amiens nord (Somme) est engagé depuis le 31 janvier 2013. Pourtant, la CGT, avec son avocat Me Rilov, joue son va-tout en attaquant les procédures devant les tribunaux. Le point sur les procédures en cours.

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Goodyear Amiens-Nord : la judiciarisation maximum

Claude Bartolone, le président de l’Assemblée nationale, a reçu mercredi 18 décembre le rapport de la Commission d’enquête parlementaire sur les causes et les conséquences de la fermeture de l’usine Goodyear d’Amiens nord (1 175 salariés).

Cette fermeture continue de faire grand bruit alors que le processus est engagé depuis le 31 janvier 2013. Ce jour-là, la direction de Goodyear a informé le CCE de la fermeture complète de son usine d’Amiens nord qui fabrique à la fois des pneus de "tourisme" d’entrée de gamme et des pneus "agricoles".

Mais la CGT, majoritaire sur le site, ne l’admet pas. Pas question de "finir comme les Peugeot ou les Conti" a prévenu Mickael Wamen, le bouillant leader CGT ; pas question non plus de prendre part aux négociations concernant le livre 1 et 2 du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE). Avec son avocat Me Rilov, le syndicat joue son va-tout en attaquant les procédures devant les tribunaux. "La stratégie de la CGT est clairement de judiciariser le dossier", confirme Catherine Charrier, secrétaire CFE-CGC du comité central d’entreprise (CCE), en désaccord avec les deux autres syndicats présents au CCE (CGT et CFDT).

Régularité du PSE : la CGT déboutée

Le 18 décembre se tient au tribunal de grande instance (TGI) d’Amiens une audience sur le fond de dossier. Le tribunal doit se prononcer sur les motifs économiques qui ont conduit la direction de Goodyear à fermer l’usine d’Amiens nord. La CGT et le CCE ont également contesté la régularité du PSE, mais ont été déboutés. Le TGI de Nanterre avait, en effet, jugé "irrecevable" leur demande le 24 septembre 2013, mettant "hors de cause" la direction de Goodyear Dunlop. "Il n’est pas établi", énonce le jugement de référé, que la direction de Goodyear Dunlop ait procédé à un transfert d’activité et d’emplois avant la présentation du plan de sauvegarde de l'emploi".

La cour d’appel de Versailles (Yvelines) a confirmé ce jugement le 17 décembre, validant à son tour le PSE. Elle a jugé suffisantes les informations communiquées par Goodyear au CCE et infondées les allégations de transfert d’emplois et de fabrication.

Me Rilov a d’autres fers au feu. Le 20 décembre est attendu le jugement en référé du TGI d’Amiens sur la procédure d’information-consultation du CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Selon la CGT, trois CHSCT sur quatre "n’ont pas été valablement consultés" concernant le PSE. Si cela était avéré, cela remettrait en cause toute la validité de la procédure, car la consultation du CHSCT se situe en amont du processus.

Risques psychosociaux

Mais la CGT et Me Rilov estiment avoir d’autres "biscuits" contre la direction avec un rapport de 2013 de l’inspection du travail sur les risques psychosociaux et les conditions de travail au sein de l’usine Goodyear d’Amiens nord. Me Rilov a saisi le juge des référés du tribunal administratif d’Amiens pour obliger la direction du travail - au sein de la Direccte - à lui fournir ce rapport de l’inspection du travail. L’audience au tribunal administratif se tiendra le 19 décembre.

La CGT et Me Rilov espèrent faire condamner le gouvernement qui interviendrait, selon eux, pour empêcher la communication de ce rapport qui serait une "bombe" de nature à invalider le plan social. Des questions se posent à l’observateur. Comment se fait-il que le CHSCT qui se réunit mensuellement n’ait pas été informé de ce rapport ? Et si les conditions de travail sont ce que laisse entendre la CGT, comment ont-elles pu échapper à la vigilance du CHSCT ?

L’affaire des "4x8" plus la crise de l’automobile

Le bras de fer entre la CGT et la direction est en réalité le prolongement de cinq ans de conflits, ponctués de référendums et même de médiations, dont celle en 2010 de Bernard Brunhes. Tout avait commencé en 2008 avec la décision de la direction de Goodyear de changer l’organisation du travail de ses deux sites d’Amiens pour accroître leur compétitivité. Il s’agissait de mettre en place quatre équipes ("les 4x8") au lieu des trois équipes de semaine et des deux équipes du week-end.

Si l’accord "4x8" était signé par l’usine Dunlop (Amiens sud) située à 50 mètres - ce qui avait valu à son leader syndical CGT d’être rayé du syndicat - il n’a jamais été ratifié par la CGT d’Amiens nord. Par la suite, alors que la crise de 2008 mettait à genoux le secteur automobile, la direction de Goodyear se disait acculée à une réduction de capacité en Europe et obligée de sacrifier un site. A Amiens sud (Dunlop), elle investissait pour fabriquer des pneus à forte valeur ajoutée. A Amiens nord, elle décidait de stopper la fabrication de pneus "tourisme" et de vendre l’activité "agricole". Intéressé, le groupe américain Titan posait ses conditions. Il ne reprendrait le site que si le PSE était en route. La CGT a fini par quitter la table des négociations considérant que les garanties de durée apportées par Titan n’étaient pas suffisantes.

L’axe Taylor-Montebourg

C’en était trop pour Maurice Taylor, le patron de Titan, qui jetait l’éponge. Peut-être pas pour toujours. Voici quelques semaines, Arnaud Montebourg défrayait la chronique en déclarant avoir reçu une offre de reprise chiffrée de la part de Titan. La direction de Goodyear ayant assuré qu’elle n’avait, elle, pas reçu d’offre, on pouvait en déduire que Titan n’avait qu’un interlocuteur sur ce dossier, le Ministère du redressement productif. Feuilleton à suivre !

Claire Garnier

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