“Le monde a besoin de nouvelles sources de pétrole. Les eaux profondes constituent la meilleure promesse en réponse à cette demande. Ces sources s’avèrent cependant coûteuses à développer et les opérateurs ne les poursuivront pas à moins de pouvoir en réduire les coûts de manière significative”, a déclaré John Gremp, PDG de FMC Technologies en annonçant la création de Forsys Subsea le 22 mars. Et cette réduction des coûts, le français Technip et l’américain FMC la chiffrent à 30% dès à présent, sans doute plus à terme.
Une solution intégrée, du fond à la surface
Les deux partenaires ont mis en commun les savoir-faire de leurs sociétés-mères pour proposer “une solution ‘seabed to topside’ (du fond à la surface) qui permet d’éliminer de nombreuses interfaces“, expliquait aujourd’hui à quelques journalistes le PDG de Technip lors d’une conférence commune avec son homologue de FMC.
C’est de leur expérience commune sur des gisements offshore qu’est née l’idée d’une intégration entre le SPS (production et traitement sous-marin), domaine de FMC Technologies et le SURF (ombilicaux, risers et flowlines sous-marins), spécialité de Technip. Pour John Gremp, “cette intégration n’est pas un standard low-cost. Nous nous appuyons sur les technologies de nos deux sociétés. C’est ce qui rend cette coentreprise unique, et rend son offre très difficile à reproduire par des concurrents. Son point fort est sa capacité à entrer très en amont dans le projet.”
Forsys affirme être en mesure d’offrir “le niveau de fiabilité le plus élevé“ pour “le coût total le plus bas de l’industrie“. Effectivement, une réduction du coût de 30% pour la partie exploitation / extraction, c’est un chiffre qui va frapper quelques majors qui ont en portefeuille des gisements aux réserves certaines, mais non-rentables à développer aujourd’hui, en raison de la chute brutale du prix du baril de pétrole depuis juin 2014.
Basée à Londres avec des représentations de Houston à Singapour, Forsys Subsea s'est vu attribuer 320 salariés détachés par les deux entreprises-mères.
Réduire les coûts plutôt que le nombre de projets
En offrant des solutions plus standardisées comportant moins d’interfaces, Forsys Subsea prône une réduction des coûts plutôt qu’une réduction du nombre de projets. Car la baisse du prix du pétrole a provoqué une réduction massive des capex. De nombreuses sociétés annoncent des réductions de leurs budgets d’investissement dans l’exploration-production, et les projets en offshore profond ou ultra-profond sont parmi les plus touchés. “Dans l’environnement de marché actuel qui évolue rapidement, les clients ont besoin de relations plus poussées et de solutions plus intégrées. Cela nécessite pour l’industrie de revisiter sa façon de travailler et de proposer une nouvelle voie” affirme le PDG de Technip Thierry Pilenko dans un communiqué commun, avant de résumer la démarche de la nouvelle société : “Simplicité, standardisation, innovation, créativité technologique.”
Une solution qui devrait séduire les opérateurs en mal de rentabilité, mais aussi les autres, selon John Gremp : "Je ne crois pas qu’ils refusent un discount de 30%, même s’ils sont rentables. Certains clients sont ouverts à penser différemment, ceux-là sont notre cible. D’autres sont trop attachés à leur façon de fonctionner pour l’instant, cela leur prendra plus de temps. Mais continuer comme ca n’est pas tenable, même si le prix du pétrole remonte et se stabilise. “ Thierry Pilenko ajoute: "nos clients auront encore le choix. Mais voir que deux entreprises leader s’associent, et annoncent un coût total réduit de 30% et plus, cela devrait faire sonner une alarme chez les opérateurs. Vont-ils vraiment continuer à saucissonner les contrats ?"
Les deux PDG ont précisé lors d'une conférence téléphonique commune le 23 mars que leur démarche n'était pourtant pas née de la chute des prix du pétrole, mais du constat - intervenu avant le krach pétrolier - que leurs démarches étaient complémentaires. L'idée d'une alliance stratégique, puis d'une coentreprise pour le mettre en oeuvre, est née il y a plus d'un an, selon Thierry Pilenko et John Gremp. Aujourd'hui, ce dernier relève à quel point la démarche était justifiée: "le secteur a de sérieux problèmes. La production future viendra de l’offshore profond, mais il n’est plus rentable. De nombreuses découvertes seront les reserves d’hydrocarbures de demain. Mais comme les ramener à la surface ? Nous constatons que nos anciens modèles économiques ne répondent plus à cette demande. Voilà pourquoi nous avons décidé de tester cette solution avec Technip."
Myrtille Delamarche