Foils et flaps, ces technos qui font voler les Sea Bubbles au-dessus de la Seine
Dans le cadre d’une nouvelle phase de test du 16 au 20 septembre, la start-up Seabubbles a reçu l’autorisation de faire naviguer ses taxis fluviaux à 30km/h sur la Seine, bien au-delà de la réglementation en vigueur, et de doubler les autres bateaux. Un assouplissement des règles rendues possible grâce aux foils, ces ailes immergées qui permettent au bateau de « voler » au-dessus de l’eau presque sans faire de bruits ni de remous.
Les foils donnent des ailes à Seabubbles. Du 16 au 20 septembre, les taxis fluviaux de la start-up co-dirigée par Alain Thébault et Anders Bringdal, les Bubbles, sont autorisés par la préfecture d’Ile-de-France à naviguer à 30km/h sur la Seine et de doubler les autres bateaux - deux choses inédites sur le fleuve de la capitale. La réglementation habituelle interdit en effet de dépasser 12 km/h dans Paris et 18 km/h ailleurs.
« Les règles sur la Seine datent d’un autre âge, du temps des péniches Frayssinet, explique Alain Thébault. Quand vous naviguez avec un bateau classique, vous générez des vagues, qui sont des nuisances pour les riverains sur les péniches et produisent une sorte de bouillon sur le fleuve. »
Une trainée réduite de 30% à 40%
Mais les Sea Bubbles, qui sont testés de 8h à 10h et de 15h à 17h entre Issy-les-Moulineaux et Bercy, ne sont pas des bateaux comme les autres. Propulsés par deux moteurs électriques, ils ne font aucun bruit. Surtout, ils reposent sur deux ailes immergées (des « foils »), qui leur permettent de s'élever à 50 cm au-dessus de la surface de l’eau à partir d'une vitesse très faible, de 6 à 9 km/h, leur donnant des airs de « taxis volants ». Ces foils « génèrent une portance qui soulève le véhicule, quelle que soit sa masse, et réduit la trainée d’environ 30 à 40% par rapport à un bateau normal », détaille Alain Thébault.
Cette technologie est « le fruit de 35 ans de navigation », ajoute-t-il. Largement adoptée par les skippeurs depuis le Vendée Globe 2016, elle a été démocratisée par Alain Thébault lui-même grâce à son hydroptère, un voilier conçu en 1994 par Airbus, DCNS et Dassault Aviation à sa demande. « C’était vraiment un bateau pionnier, insiste-t-il. Nous nous sommes crashés à trois reprises mais, en 2009, nous avons battu le record mondial de vitesse à la voile à plus de 51 nœuds. »
Une stabilité assurée par des flaps
« Reste la question de stabilité, ajoute Alain Thébault. Car pour aller vite, il faut « voler » de manière stable. » D’autant plus que sur un fleuve, la surface de navigation est beaucoup plus réduite qu’en mer. Pour assurer cette stabilité, les ailes immergées du Bubble sont dotées de volets (des « flaps ») orientables de bas en haut et actionnable par commande électrique, comme les ailes d’un avion.
Les équipes de Seabubbles ont également installé à bord du dernier prototype du taxi volant une centrale à inertie et un calculateur afin de déterminer un domaine de vol du bateau (une vitesse de décollage, une vitesse maximale, une inclinaison dans les virages…). « Le bateau ne peut pas sortir de ce domaine de vol, donc le pilote ne peut pas faire de bêtise », poursuit Alain Thébault.
« Aujourd’hui Seabubbles sait faire voler les bateaux à n’importe quelle vitesse, assure-t-il. J’ai proposé à Elisabeth Borne, la ministre des Transports, de calquer la vitesse autorisée sur le fleuve à celle des voies sur berges, soit de 40 ou 50 km/h. Nous aurions, dans Paris, la faculté de se déplacer d’est en ouest en allant trois fois plus vite qu’une voiture coincée dans les bouchons. »
Pas encore de réponse de la ministre concernant une augmentation de la vitesse ces taxis volants mais la préfecture d’Ile-de-France, qui soutient ce projet, envisage une commercialisation dès le premier trimestre 2020. Alain Thébault, de son côté, développe deux autres véhicules, alimentés non plus par des batteries mais par une pile à hydrogène : le Hi-Bus, un taxi de 12 personnes conçu sous l’impulsion d’Albert de Monaco pour désenclaver le Rocher, et BeachBubble, à destination des particuliers.