Feuilleton eurodollar
« Nous repartons vers une autre bulle, celle de la dette des Etats », Alexander Law, chef économiste pour Xerfi.
Pour tenter de comprendre les implications d’un euro fort, Alexander Law explique les enjeux sous-jacents et les impacts sur l’économie d’un dollar à 1.50 €.
« Il faut relativiser, un euro à 1,50$ ce n’est pas catastrophique pour l’économie. D’une part nos clients sont pour la plupart situés dans l’euroland. D’autre part, les achats de matières premières et de pétrole s’effectuant en dollar, c’est plutôt une bonne nouvelle de ce côté-là. Sur le long terme, un euro fort encourage les industriels à gagner en compétitivité en ajustant leurs structures de coûts. Il est vrai qu’hors euroland, nous sommes moins compétitifs par exemple qu’un pays comme l’Angleterre qui laisse filer sa monnaie, au plus grand plaisir des exportateurs insulaires. »
L’économie américaine est soutenue en partie par la Chine, pensez-vous que cette situation va durer ?
Le modèle économique américain s’appuie sur une augmentation régulière du pouvoir d’achat, soutenu par des importations de produits peu chers, donc majoritairement chinois. Concernant le dollar, tant que les chinois renoncent à une politique monétaire souveraine, tout va bien pour les Etats-Unis. L’inconnue pour l’économie américaine réside dans les relations sino-américaines. Pour l’instant, avec 1000 milliards de dollars en réserve, la Chine a intérêt à ce que l’économie US reste en l’état et besoin que le consommateur américain lui passe commande. Autrement dit, il n’y a pas à court terme d’alternative au dollar.
Néanmoins, en ouvrant le robinet à liquidité, la FED joue-t-elle avec le feu ?
Avec cette politique « laxiste » sur les taux, on voit une très nette corrélation entre le loyer de l’argent américain et les prix des matières premières. Rien ne justifie une envolée des prix du pétrole, ni des matières premières. Les indicateurs conjoncturels ne justifient en rien ces envolées. Et je reste d’ailleurs étonné des prévisions ultra optimistes de croissance que je peux lire ici et là. Sur quels chiffres s’appuient-elles ? Comment croire qu’avec une envolée aussi grande du chômage l’économie peut reprendre ?
Autrement dit, nous revenons à la situation ante-crise ?
Absolument. On voit bien que les banques renouent avec les profits et remboursent très vite leurs emprunts auprès des Etats pour éviter la mise en place de mécanisme de régulation. Même cause, même effet, d’ici à 5 ans maximum nous allons nous retrouver une autre bulle, peut-être encore plus grave qui est celle de la dette des Etats. Peut-être avant, les cycles de crise se rapprochent de plus en plus.